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Thérèse Raquin, Un dénouement Tragique

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Par   •  15 Janvier 2014  •  1 101 Mots (5 Pages)  •  1 183 Vues

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Le jeudi qui suivit, la soirée chez les Raquin, comme lesinvités continuaient à appeler le ménage de leurs hôtes, fut d’unegaieté toute particulière. Elle se prolongea jusqu’à onze heures etdemie. Grivet, en se retirant, déclara ne jamais avoir passé desheures plus agréables.

Suzanne, qui était enceinte, parla tout le temps à Thérèse deses douleurs et de ses joies. Thérèse semblait l’écouter avec ungrand intérêt ; les yeux fixes, les lèvres serrées, ellepenchait la tête par moments ; ses paupières, qui sebaissaient, couvraient d’ombre tout son visage. Laurent, de soncôté, prêtait une attention soutenue aux récits du vieux Michaud etd’Olivier. Ces messieurs ne tarissaient pas, et Grivet ne parvenaitqu’avec peine à placer un mot entre deux phrases du père et dufils. D’ailleurs, il avait pour eux un certain respect ; iltrouvait qu’ils parlaient bien. Ce soir-là, la causerie ayantremplacé le jeu, il s’écria naïvement que la conversation del’ancien commissaire de police l’amusait presque autant qu’unepartie de dominos.

Depuis près de quatre ans que les Michaud et Grivet passaientles jeudis soir chez les Raquin, ils ne s’étaient pas fatigués uneseule fois de ces soirées monotones qui revenaient avec unerégularité énervante. Jamais ils n’avaient soupçonné un instant ledrame qui se jouait dans cette maison, si paisible et si douce,lorsqu’ils y entraient. Olivier prétendait d’ordinaire, par uneplaisanterie d’homme de police, que la salle à manger sentaitl’honnête homme. Grivet, pour ne pas rester en arrière, l’avaitappelée le Temple de la Paix. À deux ou trois reprises, dans lesderniers temps, Thérèse expliqua les meurtrissures qui luimarbraient le visage, en disant aux invités qu’elle était tombée.Aucun d’eux, d’ailleurs, n’aurait reconnu les marques du poing deLaurent ; ils étaient convaincus que le ménage de leurs hôtesétait un ménage modèle, tout de douceur et d’amour.

La paralytique n’avait plus essayé de leur révéler les infamiesqui se cachaient derrière la morne tranquillité des soirées dujeudi. En face des déchirements des meurtriers, devinant la crisequi devait éclater un jour ou l’autre, amenée par la successionfatale des événements, elle finit par comprendre que les faitsn’avaient pas besoin d’elle. Dès lors, elle s’effaça, elle laissaagir les conséquences de l’assassinat de Camille qui devaient tuerles assassins à leur tour. Elle pria seulement le ciel de luidonner assez de vie pour assister au dénouement violent qu’elleprévoyait ; son dernier désir était de repaître ses regards duspectacle des souffrances suprêmes qui briseraient Thérèse etLaurent.

Ce soir-là Grivet vint se placer à côté d’elle et causalongtemps, faisant comme d’habitude les demandes et les réponses.Mais il ne put en tirer même un regard. Lorsque onze heures etdemie sonnèrent, les invités se levèrent vivement.

« On est si bien chez vous, déclara Grivet, qu’on ne songejamais à s’en aller.

– Le fait est, appuya Michaud, que je n’ai jamais sommeil ici,moi qui me couche à neuf heures d’habitude. »

Olivier crut devoir placer sa plaisanterie.

« Voyez-vous, dit-il, en montrant ses dents jaunes, ça sent leshonnêtes gens dans cette pièce : c’est pourquoi l’on y est si bien.»

Grivet, fâché d’avoir été devancé, se mit à déclamer, en faisantun geste emphatique :

« Cette pièce est le Temple de la Paix. »

Pendant ce temps, Suzanne nouait les brides de son chapeau etdisait à Thérèse :

« Je viendrai demain matin à neuf heures.

– Non, se hâta de répondre la jeune femme, ne venez quel’après-midi…

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