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Question Du Corpus Affrontement Au Théâtre (Marivaux, Anouilh, Sartre, Koltès)

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Par   •  6 Février 2015  •  3 077 Mots (13 Pages)  •  1 206 Vues

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L’ASSOMMOIR (Zola) 1877

L’alambic

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Et elle se leva. Coupeau qui approuvait vivement ses souhaits, était déjà debout, s’inquiétant de l’heure. Mais ils ne sortirent pas tout de suite ; elle eut la curiosité d’aller regarder, au fond, derrière la barrière de chêne, le grand alambic de cuivre rouge, qui fonctionnait sous le vitrage clair de la petite cour ; et le zingueur, qui l’avait suivie, lui expliqua comment ça marchait, indiquant du doigt les différentes pièces de l’appareil, montrant l’énorme cornue d’où tombait un filet limpide d’alcool. L’alambic, avec ses récipients de forme étrange, ses enroulements sans fin de tuyaux, gardait une mine sombre ; pas une fumée ne s’échappait ; à peine entendait-on un souffle intérieur, un ronflement souterrain ; c’était comme une besogne de nuit faite en plein jour, par un travailleur morne, puissant et muet. Cependant, Mes-Bottes, accompagné de ses deux camarades, était venu s’accouder sur la barrière, en attendant qu’un coin du comptoir fût libre. Il avait un rire de poulie mal graissée, hochant la tête, les yeux attendris, fixés sur la machine à soûler. Tonnerre de Dieu ! elle était bien gentille ! Il y avait dans ce gros bedon de cuivre, de quoi se tenir le gosier au frais pendant huit jours. Lui aurait voulu qu’on lui soudât le bout du serpentin entre les dents, pour sentir le vitriol encore chaud l’emplir, lui descendre jusqu’aux talons, toujours, toujours, comme un petit ruisseau. Dame ! il ne se serait plus dérangé, ça aurait joliment remplacé les dés à coudre de ce roussin de père Colombe ! Et les camarades ricanaient, disaient que cet animal de Mes-Bottes avait un fichu grelot tout de même. L’alambic, sourdement, sans une flamme, sans une gaieté dans les reflets éteints de ces cuivres, continuait, laissait couler sa sueur d’alcool, pareille à une source lente et entêtée, qui à la longue devait envahir la salle, se répandre sur les boulevards extérieurs, inonder le trou immense de Paris.

Introduction :

L’Assommoir est un roman écrit par Zola à la fin du XIXe siècle, en 1877. L’œuvre s’inscrit dans le cadre des Rougon-Macquart, série de romans où l’auteur tente de démontrer le poids du déterminisme social et familial qui pèse sur ses personnages.

Situation du passage :

Gervaise, le personnage principal de L’Assommoir est une jeune femme qui, au début du roman, arrive à Paris avec ses deux enfants et se laisse séduire par un ouvrier zingueur dénommé Coupeau. Celui-ci pour la demander en mariage l’invite chez le Père Colombe, dans un café qui s’appelle précisément « l’Assommoir ». Et nous constatons qu’au moment de quitter les lieux, la jeune femme va au contraire se diriger vers le fond de la salle où se trouve un étrange appareil, qui est un alambic, appareil qui distille de l’alcool. Donc cette page qui a pour objectif de décrire la machine représente comme une contradiction avec les propos de tenus par Gervaise quelques minutes plus tôt à Coupeau puisqu’elle vient de lui expliquer que l’alcoolisme lui fait peur étant donné que son père en avait souffert et en avait fait souffrir les siens. Alors, ne s’agirait-il pas ici de la part du narrateur de nous montrer déjà combien son personnage n’est finalement pas maître de son devenir. Nous nous demanderons donc comment le narrateur procède pour nous laisser entendre qu’en réalité cette curiosité de Gervaise à l’égard de la machine est une annonce prémonitoire du piège dans lequel elle va se trouver malgré elle prisonnière.

Problématique :

Comment le narrateur à travers la description d’une simple machine va implicitement informer le lecteur sur le devenir des personnages ? Et en même temps, comment le narrateur va dénoncer le fléau de l’alcoolisme ?

Annonce du plan :

1/Une focalisation interne au service de la narration

2/ Une double focalisation pour dénoncer les ravages de l’alcool

Analyse :

1/Une focalisation interne au service de la narration

L’appareil est d’abord vu et décrit par le regard des 2 personnages principaux : Coupeau d’abord, puis ensuite Gervaise.

1.1. Le point de vue de Coupeau : un regard innocent qui ne mesure aucun danger

Coupeau est un ouvrier zingueur et nous constatons que son regard sur la machine se caractérise plutôt comme une démarche technique et plutôt objective.

- A la l.8 « (il lui) indique du doigt les différentes pièces de l’appareil » Les termes de « pièces » et d’ « appareil » sont des termes relativement neutres qui n’expriment aucun sentiment particulier à l’égard de l’alambic.

- D’ailleurs il le signifie quand il explique à Gervaise « comment ça marchait » (l.7) Le terme de « ça » qui est péjoratif semble même montrer qu’il établit une grande distance entre lui et cette machine. Le regard de Coupeau fonctionne presque comme une focalisation externe.

- Le personnage se contente de montrer, de détailler et de nommer les éléments qui composent la machine, notamment « l’énorme cornue d’où tombait un filet lipide d’alcool » (l.9) Le terme de « cornue » qui appartient à un vocabulaire technique souligne encore la neutralité du regard. Quant au terme de « filet », il peut vouloir dire que décidément Coupeau n’est guère ému par cette machine insignifiante qui ne représente aucun danger pour lui. Mais si on accorde à ce mot l’acception de piège, les mailles du filet alors commenceraient à s’emparer de lui, alors qu’il n’en a pas conscience…

1.2. Le point de vue de Gervaise : un regard prémonitoire

Gervaise en revanche ne partage pas du tout le même point de vue que Coupeau. Elle ne pose absolument pas le même regard sur cette machine et malgré les explications de son compagnon qui se veut

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