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Littérature - Oedipe Roi

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Par   •  29 Janvier 2017  •  Dissertation  •  1 973 Mots (8 Pages)  •  839 Vues

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Première question

Jocaste est un personnage tragique dans nos deux œuvres : reine endeuillée par la perte de Laïos, elle finit par épouser son fils et contribue à semer la peste sur Thèbes avant de se pendre à la fin de la tragédie. Figure essentielle du mythe, élément clé du tragique, il semble intéressant de se poser la question suivante : quelles images de la figure maternelle les œuvres de Sophocle et de Pasolini représentent-elles ? Dans un premier temps, nous verrons la figure maternelle que représente Jocaste. Ensuite, nous observerons la relation fusionnelle ou pas que Jocaste et Mérope entretiennent avec Œdipe.

Chez Sophocle, jusqu’à la révélation, il n’y a pas d’ambiguïté : Jocaste est la femme. Au moment de la révélation, une ambivalence éclate, elle devient alors monstrueuse. Dans l’œuvre de Pasolini, c’est plus complexe car on retrouve la même actrice dans le premier fragment du film et dans la partie mythique. En effet, il y a un même jeu d’actrice : même visage hiératique, même chignon relevé, même teint très pâle, yeux sans sourcils ; presque une allure fantomatique. D’après Pasolini, « elle est un pur mystère. […] Avec Jocaste, j'ai représenté ma propre mère, projetée dans le mythe, et une mère qui ne mue pas : comme une méduse, elle change, peut-être, mais elle n'évolue pas. D'où l'aspect fantomatique ». Il y a ici un modèle intemporel de la mère. Cela amène à une dimension autobiographique puisque Pasolini dit s’être inspiré d’une photo de sa mère pour les costumes de Jocaste dans le prologue. Dans une autre scène, on voit Jocaste en haut et Œdipe, son fils, en bas ce qui fait référence  la lignée familiale.

Jocaste et Mérope représentent deux figures maternelles opposées. En effet, Mérope reste celle qui accueille (gestes de tendresse). Bien qu’elle pleure lorsqu’Œdipe part, leur relation n’est pas fusionnelle : avec Polybe, ils représentent une image des parents qui acceptent que leur fils s’éloigne. Avec Jocaste, c’est différent. Dans le prologue, Œdipe se confie souvent à sa mère ce qui fait référence à la vie de Pasolini. On peut donc dire que la mère et son fils ont une relation fusionnelle mais ça ne s’arrête pas là. En effet, il y a une connaissance et un mépris de l’inceste : Jocaste en rit. Assume donc-t-elle l’inceste inconsciemment ? Ne pressent-elle pas au fond d’elle-même la vérité ? Dès qu’il est question d’inceste, Jocaste a des sourires et des regards ambigus. Cependant, la figure maternelle n’est pas tellement mise en scène chez Pasolini : dans une scène, on voit Jocaste en haut et Œdipe, son fils, en bas ce qui fait référence à  la lignée familiale. Cette relation symbolique d’Œdipe et Jocaste réfère à celle de Jocaste et sa mère.

Pasolini reprend donc les grands traits de la figure maternelle de la Jocaste de Sophocle mais il lui donne une force et une présence beaucoup plus forte grâce à sa présence continue à l'image.

Deuxième question

Avant d'être un personnage de tragédie ou de film, Œdipe est avant tout un personnage mythologique. En effet, le mythe voulait qu'Œdipe, fils de Laïos et Jocaste, tue son père et couche avec sa mère. Son destin en était ainsi, et par définition, il devait s'accomplir inexorablement. On peut alors se poser la question suivante : comment se manifeste le destin dans l’œuvre de Sophocle et de Pasolini ? Pour répondre à cela nous nous intéresserons dans un premier temps au nom d'Œdipe. Nous verrons ensuite en quoi « la vie finit là où elle commence » chez Sophocle et chez Pasolini. Enfin nous nous pencherons sur le pouvoir qu'a ou non Œdipe sur son destin et plus généralement sur sa vie dans les deux œuvres.

Le destin peut être défini comme une fatalité suivant laquelle tout arrive dans l'existence d'un homme. Œdipe, avant même sa naissance, serait donc voué à une histoire déjà toute tracée. Ainsi, il est intéressant de se pencher sur son nom lui-même. A la naissance, lorsqu'un prénom est attribué à un homme cela constitue pour lui le tout premier pas vers son identité individuelle, et la destinée d'Œdipe est déjà bien présente dans son nom. En effet, trois traductions sont généralement attribuées à ce nom : Œdipe pourrait tout d'abord signifier « celui aux pieds enflés ». Cela implique que toute sa vie il errera, boiteux, dans une existence instable voire bancale. Ce nom peut également être traduit comme « celui qui a deux pieds ». Cela renvoie directement à la solution de l'énigme de la Sphinx. Il est donc inscrit dans le destin d'Œdipe de résoudre l'énigme et d'arriver à la tête de Thèbes. Cependant, nous pouvons noter que cette deuxième signification n'est pas avérée dans le film de Pasolini puisqu'Œdipe tue la Sphinx et ne résout aucune énigme. Cela dit, il est vrai que l'épisode de la Sphinx est antérieur au début de la tragédie de Sophocle. Même s'il n'est pas décrit par le dramaturge, il est mentionné dans l’œuvre, notamment lors de la joute verbale entre Œdipe et Tirésias. Enfin, Œdipe est « celui qui sait » et, si le chemin vers la vérité sera difficile pour lui, c’est son destin de savoir et donc de découvrir sa propre vérité. Le destin d'Œdipe est donc présent dans son nom lui-même et ce qu'il s'agisse d'Œdipe roi ou de son adaptation filmique. En ce sens, on retrouve l'image du destin chez Pasolini tout comme chez Sophocle par le biais du nom même d'œdipe.

La célèbre formule d'Œdipe « la vie finit là où elle commence » est à bien des égards, très significative, autant chez Sophocle que chez Pasolini. Tout d'abord cela signifie que le commencement de la vie d'un homme en définit sa fin. Il est alors intéressant de noter que chez Pasolini, nous assistons à la naissance d'Œdipe dans le prologue, alors que chez Sophocle, le personnage est déjà roi de Thèbes à l'ouverture de la pièce. Chez Pasolini, nous voyons donc le commencement de la vie d'Œdipe. Nous pouvons alors penser que rien n'est déjà joué, que son destin n'est pas encore établi puisqu'il n'est pas encore né au tout début du film. Chez Sophocle en revanche, dès le début de la pièce, Œdipe est face à la lourde responsabilité de sauver la ville de Thèbes. Dans ce sens, au début des œuvres, là où le destin semble ne pas être véritablement établi chez Pasolini, il pèse déjà sur Œdipe chez Sophocle. Ensuite, cette citation suggère une répétition, un cercle infini du destin. A ce sujet, les villes de Thèbes et Corinthe sont très révélatrices chez Pasolini. En effet, dans la pièce de théâtre, le protagoniste étant déjà souverain de Thèbes, la ville de Corinthe n'a pas de véritable importance dans le récit. En revanche, dans le film, nous sommes témoins de la fuite d'Œdipe de Thèbes à Corinthe puis de Corinthe à Thèbes pour échapper aux oracles. Lorsqu'il est enfant, les parents d'Œdipe décident en effet de l'éloigner pour échapper aux oracles. Il est alors recueilli par le roi et la reine de Corinthe qui l'élèvent comme leur propre fils et lui cachent la vérité de son adoption. Jeune adulte, Œdipe va consulter l'oracle qui lui révèle la prophétie. Persuadé que ses parents sont à Corinthe il décide de partir. On pourrait ici penser qu'il reprend la main sur son destin, mais cette fuite va permettre aux prédictions de l'oracle de se réaliser. Sur la route de sa fuite, Œdipe arrive à des croisements qui sont symboliques du destin. En effet, il y a là un choix à faire. Il se cache alors les yeux et tourne sur lui-même avant de se diriger vers Thèbes. Ce comportement étonnant montre qu'Œdipe s'en remet au hasard, ou peut-être est-ce le destin qui le pousse à Thèbes. Quelle qu'en soit la raison, le retour d'Œdipe à Thèbes est donc pour lui un retour au point de départ de sa vie. Pasolini insiste donc sur une représentation cyclique de la vie, et même, du destin lui-même plus que cela n'est le cas chez Sophocle.

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