Le portrait de Marche-à-Terre

Littérature comparée : Le portrait de Marche-à-Terre

« Il gardait une attitude prophétique et apparaissait là comme le génie même de la Bretagne » (p.61), voilà comment Balzac décide de terminer le portrait de Marche-à-Terre. Cet extrait s’inscrit après un long tableau de la Bretagne : de ses lieux et de ses personnages. À ce moment précis, nous sommes à Fougères, où les Bleus emmènent les conscrits réclamés par la République afin de combattre les Chouans. Marche-à-Terre apparait brusquement au milieu de la scène et reste énigmatique autant pour le lecteur que pour les Bleus. Dans ce portrait, l’auteur peint en Marche-à-Terre une représentation de la Bretagne profonde et mystique où règne une grande « superstition ». Il est le fer de lance de la chouannerie.

Comment Balzac fait-il de Marche-à-Terre le portrait global de « la Bretagne en 1800 » ?

Nous verrons comment la description du personnage est excessivement péjorative, qu’il représente parfaitement la Bretagne et ses chouans, créant ainsi une certaine confusion à son égard. Et enfin, comment l’atmosphère pesante parvient-elle à nous faire deviner l’embuscade dirigée par le marquis de Montauran.

1. Marche-à-Terre : « un demi-dieu barbare »

• Description péjorative surdéveloppée. Cela commence dès son apparition avec « un personnage encore plus bizarre » (p.59)
• Beaucoup d’usage du terme « grossier » : « blouse en toile rousse plus grossière encore » (p.59), « morceaux de bois grossièrement travaillés » (p.60), « la grossièreté de cet homme taillé comme à coups de hache » (p.61)
• Le début de l’extrait est marqué par une grande comparaison avec le milieu animal. Marche-à-Terre est d’abord comparé à un bœuf « une tête presque aussi grosse que celle d’un bœuf, avec laquelle elle avait plus d’une ressemblance. » (p.59)

Ses cheveux font penser aux pelages des chèvres « Ses longs cheveux luisants, semblables aux poils de ses peaux de chèvres » (p.60)

• Comparaison de Marche-à-Terre avec le bœuf encore une fois, description plus précise et raciste : « Ses larges lèvres retroussées par des dents blanches comme de la neige, ses grands et ronds yeux noirs garnis de sourcils menaçants, ses oreilles pendantes et ses cheveux roux appartenaient moins à notre belle race caucasienne qu’au genre des herbivores » (p.59) 
• Déshumanisation complète du personnage : « l’absence complète des autres caractères de l’homme social rendait cette tête nue plus remarquable encore » (p.59) « Les peaux de biques […] ne laissaient distinguer aucune forme humaine » (p.60)

La fin de l’extrait donne également cet impression. Marche-à-Terre est qualifié comme étant « une sorte de demi-dieu barbare » et « le génie même de la Bretagne » (p.61)

Marche-à-Terre est perçu péjorativement par le narrateur qui ressent une sorte de « dégout » et incompréhension. Il est considéré comme sauvage, au même titre que les animaux peuplant la Bretagne. Une incompréhension qui se fait sentir dans la suite du texte lorsque ce personnage suscite une grande confusion parmi les Bleus.

1. Un personnage qui suscite la confusion

• Tout au long de cet extrait, nous pouvons remarquer que Marche-à-Terre est comparé à la nature de nombreuses fois. Et non pas seulement en étant comparé à des animaux : « les anguleux contours offraient une vague analogie avec le granit qui forme le sol de ces contrées » (p.59) On peut comprendre ici que l’homme ne fait qu’un avec le lieu, il est presque indéfinissable, transparent.
• Sa ressemblance avec les conscrits crée également une confusion dans l’esprit du commandant « vit à deux pas un personnage encore plus bizarre qu’aucun de ceux emmenés à Mayenne » (p.59)

On le compare encore à eux « blouse en toile rousse plus grossière encore que celles des pantalons des conscrits les moins fortunés » (p.59)

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