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La différence entre la prose et la poésie

Analyse sectorielle : La différence entre la prose et la poésie. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  30 Janvier 2015  •  Analyse sectorielle  •  1 272 Mots (6 Pages)  •  766 Vues

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le poète nègre est à la fois entièrement poète et parleur dans sa relation au langage et aux choses telle que la décrit Sartre ici, et dément par sa singularité cette description théorique, puisque le mot se fait aussi miroir du monde tout en étant parfaitement autonome. Tout se passe comme si, malgré eux, les poètes de cette Anthologie,opéraient une synthèse déclarée comme impossible dans Qu’est-ce que la littérature ? L’emploi du langage à des fins d’expression poétique défie le sens commun puisqu’il est mimétisme et refus conjoint du mimétisme. Dans les cas extrêmes, le mot produit ce feu d’artifice sonore décrit par Rabelais dans l’épisode des paroles gelées du Quart livre, et se fait parfaitement autonome vis-à-vis du référent voire du signifiant, au premier abord. download as a pdf file Téléchargez la version PDF

* Etude publiée par le Professeur Annie Urbanik-Rizk

II Révélation qu’une poésie engagée est possible :

A. Eclatement de la distinction entre prose et poésie :

Plus encore qu’une leçon politique qui renvoie l’occidental à ses responsabilités de colon et à une identité authentique et universelle, la poésie de la négritude est avant tout pour Sartre, une leçon poétique. S’il y a initiation, elle est plus dans l’ordre de la rhétorique que du contenu poétique. La révélation se fait aussi révolution, retournement total. Les distinctions entre la stérilité poétique et la fécondité du verbe prosaïque sautent. Ces poèmes noirs font éclater tous les repères du futur auteur des essais critiques sur Baudelaire et Mallarmé. Celui qui vient d’énoncer des différences capitales entre prose et poésie dans Qu’est-ce que la littérature ? en 1947 est confronté à la rude épreuve de l’auto-critique.

«Mais cette introduction serait incomplète si, après avoir indiqué que la quête du Graal noir figurait dans son intention originelle et dans ses méthodes la plus authentique synthèse des aspirations révolutionnaires et du souci poétique, je ne montrerais que cette notion complexe est en son cœur, Poésie pure»[1]

Jusqu’alors, pour Sartre la poésie était confinée dans le ciel absolu de l’idéal abstrait, dans sa pureté mallarméenne qui faisait de la formule du poète «la fleur absente de tout bouquet». Seule la prose renvoyait à la concrétude du monde et pouvait le mirer pour en dire les affres ou les turpitudes. Or, voilà qu’un souffle rythmé, plein de vie et de fureur met à mal toutes ces représentations et prouve que la poésie peut dire le monde.

«Je te nomme Soir, ô Soir ambigu. Feuille mobile, je te nomme

Et c’est l’heure des peurs primaires surgies des entrailles d’ancêtres.

Arrière inanes faces de ténèbres à souffle et mufle maléfique !»[2]

La distinction entre prose et poésie que Sartre établit dans Qu’est-ce que la littérature ? ne date pas d’hier. Il y reprend en effet l’idée qui se fait jour chez les poètes français depuis la première moitié du XIX ème selon laquelle «dès qu’une chose devient utile, elle cesse d’être belle. Elle rentre dans la vie positive, de poésie, elle devient prose.» [3]

D’entrée de jeu, Sartre refuse à la poésie la capacité à s’engager de même que la peinture, la sculpture ou la musique en se fondant sur une dichotomie essentielle à ses yeux :

«[…](l’empire des signes, c’est la prose ; la poésie est du côté de la peinture, de la sculpture, de la musique.[…] Les poètes sont des hommes qui refusent d’utiliser le langage.[…] En fait, le poète s’est retiré d’un seul coup du langage-instrument ; il a choisi une fois pour toutes l’attitude poétique qui considère les mots comme des choses et non comme des signes.[ …] L’homme qui parle est au-delà des mots, près de l’objet : le poète est en-deçà. Pour le premier, ils sont domestiques, pour le second, ils restent à l’état sauvage.»[4]

En assignant ainsi l’utilité de l’engagement à la parole et à la prose tout en plaçant la poésie dans le ciel éthéré de l’inutile et du stérile, Sartre se situe à mi-chemin entre l’esthétique du réalisme socialiste qui n’excluait ni la peinture, ni la sculpture et les discours célèbres sur la poésie pure ou mystique de l’abbé Brémond. Il en demeure à une conception mallarméenne du poète « en grève devant la société» selon les propres mots de Mallarmé. L’hermétisme du

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