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Etude Sur Le Paysage Pictural Du Peintre Baudelaire

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Par   •  23 Février 2013  •  9 398 Mots (38 Pages)  •  1 672 Vues

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Etude sur le paysage pictural du peintre Baudelaire

PARK KI-Hyun

(Université de Chonnam)

Table des matières

I. Introduction

II. Paysage de la nature et de la ville dans les critiques d'art

III. Crépuscule : le duel du rouge et du noir

IV. Paris en clair-obscur

I. Introduction

Les deux premières publications véritables de Baudelaire ont été successivement le Salon de 1845 puis le Salon de 1846 : deux écrits sur l'art et non pas telle ou telle des futures Fleurs du mal don't nous savons pourtant que de nombreux poèmes étaient déjà rédigés à l'époque. Un tel choix signale d'emblée que les éléments de l'activité créatrice et de la réflexion du poète sur sa pratique d'écrivain sont indissociables de sa réflextion sur l'art et, partant, sur l'image. On peut dire que chez les poètes romantiques, et post-romantiques, un des éléments primordiaux du poème est l’image, et que le rôle fondamental du poète est de créer, en organisant ses images, une structure essentiellement suggestive. Baudelaire cherche à organiser les images poétiques selon des critères esthétiques semblables à ceux qui règlent la composition du tableau. Donc dans l’oeuvre de Baudelaire, l’analyse de la peinture joue un rôle central de ressourcement et de cristallisation des problèmes de la poésie moderne. Yves Bonnefoy nous démontre le rapport entre poésie et peinture chez Baudelaire, surtout sa fascination pour la couleur de Delacroix:

Quand sa parole s’englue dans des mensonges, des peurs, des paresses, ce dont il souffre comme d’un ternissement de l’innocence première, Baudelaire, par exemple, s’enthousiasme pour la couleur de Delacroix, “éclatante”, dit-il, autant qu’“obscure”, ou rapproche ses propres roses et noirs, qu’il croit équivoques, de ceux de Manet, qui ont la limpidité des minéraux. Dans la nuit qui s’“épaissit”, qui va être une “cloison”, la couleur pure, qui peut s’intensifier, s’enflammer, et consumer ainsi la figuration toujours trouble, lui semble mieux qu’aucune beauté des mots la voie d’un retour aux “années profondes”. Et c’est en peintre qu’il essaie alors de faire tenir sur cet arrière-fond nu et noir les “vapeurs roses” du crépuscule ou les rougeoiements du charbon. Comme c’est en peintre encore qu’il note, dans Fusées - mots silencieux, c’est l’ange de la couleur qui passe : “Les ténèbres vertes dans les soirs humides de la belle saison” Yves Bonnefoys, «Peinture, poésie; vertige, paix», dans Le Nuage rouge, Mercure de France, 1992, p. 320. C’est nous qui soulignons.

La peinture a nourri et réconforté en maintes circonstances la pensée poétique de Baudelaire. Pour lui, les images sont une passion au sens fort. Qu’on se rappelle la glorification des images dans Mon coeur mis à nu : «Glorifier le culte des images (ma grande, mon unique, ma primitive passion)» Voici les abréviations employées: (I, II) : Oeuvres complètes, texte établi, présenté et annoté par Claude Pichois, Gallimard, «Bibliothèque de la Pléiade», 2 tomes, 1975 et 1976 ; (CPI, CPII) : Correspondance, texte établi, présenté et annoté par Claude Pichois avec la collaboration de Jean Ziegler, Gallimard, «Bibliothèque de la Pléiade», 2 tomes, 1973. (I, 701)

. Par «images», il faut entendre d’abord celles que font les peintres ou les graveurs comme dans le Salon de 1859, où Baudelaire parle de son amour pour elles : «Très jeunes, mes yeux remplis d’images peintes ou gravées n’avaient jamais pu se rassasier, et je crois que les mondes pourraient finir, impavidum ferient, avant que je devienne iconoclaste» (II, 624)

. Les arts plastiques sont pour Baudelaire, outre un réservoir d’images à transposer, un ensemble de techniques dont s’inspire sa poétique. L’image picturale hante donc Baudelaire, qu’il écrive en vers ou en prose, sur la musique ou sur la peinture. Cette hantise de l’image se rattache aux enjeux essentiels de sa poésie et de son esthétique. Ce que nous enseigne Baudelaire dans son discours sur le visible en peinture, c’est que le discours sur les arts engage une poétique : une théorie du poème comme rythme, figure et image. Donc dans ce sens nous allons regarder comment Baudelaire «peint» le paysage avec la prose et la poésie, et analyser quel rôle la couleur joue dans le paysage baudelairien.

II. Paysage de la nature et de la ville dans les critiques d'art

Avant d’analyser les aspects du paysage imaginaire ou réel, des Fleurs du mal au Spleen de Paris, il nous faudrait considérer les critiques esthétiques exprimées dans le Salon de 1846 et dans le Salon de 1859. Baudelaire propose sa méthode critique en distinguant les coloristes d’avec les dessinateurs dans le Salon de 1846. Cette méthode s’étend jusque dans les domaines du portrait et du paysage. Par exemple, dans le domaine du portrait Sur les portraits écrits sur et par Baudelaire, voir un bel essai de Michel Schneider, Baudelaire. Les années profondes, Seuil, 1994.

, il établit la division entre deux manières différentes. D’une part la manière d’Ingres est «de rendre fidèlement, sévèrement, minutieusement, le contour et le modelé du modèle, ce qui n’exclut pas l’idéalisation, qui consistera, pour les naturalistes éclairés, à choisir l’attitude la plus caractéristique, celle qui exprime le mieux les habitudes de l’esprit”. (II, 464)

D’autre part, la manière imaginative des coloristes est de «faire du portrait un tableau, un poème avec ses accessoires, plein d’espace et de rêverie. Ici l’art est plus difficile, parce qu’il est plus ambitieux. Il faut savoir baigner une tête dans les molles vapeurs d’une chaude atmosphère, ou la faire sortir des profondeurs d’un crépuscule”. (Ibid.)

Dans le domaine du paysage, le problème est plus complexe. En 1846, alors que le paysage historique rehaussé d’une anecdote historique ou d’une fable morale n’a pas encore disparu, en dépit de sa décadence, Baudelaire annonce sa fin avec d’autant plus de force qu’il reconnaît en Corot, Rousseau et les Barbizoniens, les réformateurs d’un genre qu’ils délivrent de ses mauvaises habitudes néoclassiques. Il apprécie les

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