Débat Rousseau / Condillac

Débat Rousseau / Condillac sur l’origine des langues

        L’homme s’entoure d’un univers sonore, afin de recueillir et d’élaborer en lui l’univers des objets. Les rapports que les hommes entretiennent avec les objets sont fondamentalement et exclusivement réglés par la manière dont le langage les lui transmet. Nous sommes à l’époque des Lumières : Condillac, un philosophe matérialiste et Rousseau débattent dans un salon littéraire devant des hôtes. L’origine des langues est la thèse de ce vif débat que nous allons découvrir.

« - Bonjour cher Rousseau.

• Bonsoir l’ami ! fit-il avec un sourire hypocrite. Donc… Parlons de ce sujet très important qui me tient à cœur…
• Oui, l’origine des langues.
• Exactement. Réfléchissez, ce sujet vous tient tant à cœur que vous venez me parler : le verbe parler vient de « parole ». C’est la faculté d’exprimer et de communiquer la pensée au moyen du système des sons du langage articulé émis par les organes phonateurs. Nous exprimons notre pensée et nous communiquons entre nous au moyen d’un système de signes conventionnels vocaux et/ou graphiques constituant une langue : le langage est donc la réalisation de cette faculté.
• Non, vous m’avez invité. Mais non, pour moi, l’origine des langues vient des besoins des hommes et permet de les rapprocher entre eux.
• Certes, les hommes ont des besoins mais ce sont toutes les passions qui les rapprochent entre eux : l’amour, la haine, la pitié, la colère. D’où l’origine des premières langues chantantes et passionnées : les cris, les plaintes, les accents.
• Pour moi, la parole humaine est apparue pour désigner des choses et mieux satisfaire les besoins du corps. On touche à la corrélation fonctionnelle entre la bouche et la main, entre le mot et la chose.
• C’est une théorie du passage au signe naturel qui donne la possibilité pour le sujet humain de manipuler les signes à son gré et d’entrer dans le monde du langage. Mais imaginez si les besoins étaient les seules raisons pour rapprocher les hommes, quelles en seraient les conséquences selon vous ? Les personnes seraient dispersées et ne verraient aucun intérêt à se rapprocher entre elles car elles auraient tout à porter de main (boire,manger). Il n’y aurait aucun rapport aux autres et ce serait triste vous ne trouvez pas ? J’aimerai avoir votre avis sur ce point Mr Condillac car je suis pratiquement sûr que mon raisonnement est juste, mais vous pourrez peut être essayer de me convaincre si vous êtes vraiment très fort.
• Est-il plus important de manger ou de s’exprimer ?
• Vous avez raison, manger est un besoin vital pour l’homme mais je vous l’ai déjà dit : il pourrait se débrouiller seul, sans avoir recours au langage. Un silence de quelques secondes s’installe. Ah mon cher Condillac, vous êtes bien loin de la réalité. Prenons l’exemple de l’amour qui désigne un sentiment intense d’affection et d’attachement envers un être vivant ou une chose qui pousse ceux qui le ressentent à rechercher une proximité physique, intellectuelle ou même imaginaire avec l’objet de cet amour. Cette conception comprend un large éventail de sentiments différents et sous ses diverses formes agit comme un facteur majeur dans les relations sociales et occupe une place centrale dans la psychologie humaine.
• C’est vous cher Rousseau qui n’y comprenez décidémment rien. L’amour répond à un besoin, le sexe pour la reproduction humaine.
• Nos idées ainsi que nos thèses sur ce sujet ne se rejoindront vraisemblablement jamais. Nous pouvons donc conclure ce vif débat.

Ainsi, se conclut cet entretien sur l’origine des langues avec deux thèses bien distinctes : les passions et les besoins des hommes.

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