Douze hommes en colère

La parole est notre principal objet d’expression. Cela nous permet d’exprimer nos idées et opinions mais aussi d’exercer une autorité. Ce phénomène est notamment visible dans la vie sociale. Une autorité peut être formée dans le cadre d'une recherche de vérité, de pouvoir, d’une volonté de contrer les injustices. Cela peut être le cas à l'occasion d’un débat avec un jury qui décidera de l’avenir d’un accusé par exemple. Notamment avec l’adaptation au cinéma de la pièce de Reginald Rose, écrivain, dramaturge et scénariste américain, réalisé par Sidney Lumet, grand réalisateur américain, et sorti en 1957 nommé 12  hommes en colère. Un groupe de 12 hommes blancs, aucunes femmes ou individus représentatifs des minorités, se regroupent pour voter sur l’avenir d’un jeune homme de couleur accusé d’avoir tué son père. Il est basané et d’une classe sociale différente de celles des jurés ce qui n’arrange pas son cas. Dans les années 50 les personnes de couleurs étaient représentées comme des délinquants peu importe leur profession ou leur rang social. Le racisme était très présent. Seul 1 homme le nomme non-coupable, le juré n°8, contre 11 autres qui l’accuse d’être coupable, or la décision doit être prise à l'unanimité. Celui-ci émet seulement des suppositions sur la culpabilité de ce jeune homme et arrive à convaincre un à un les 11 autres jurés et parvient à introduire dans leur esprit “le doute légitime” grâce notamment à sa forte autorité. Cela nous amène donc à nous demander : Comment l’humain imposent-ils son autorité au sein d’un groupe social ? Pour répondre à cette problématique nous aborderons dans un premier temps les compétences qu’utilisent l’orateur pour imposer son autorité puis dans un second temps nous verrons les effets que procurent ces compétences sur le public.

Un bon orateur connaît son autorité et sait comment l’utiliser. Elle peut venir du rang social dans lequel est l’Homme, donc présente depuis toujours ou encore venir de la manière dont s’exprime l’Homme, donc acquise au cours du temps. Si cet Homme est un bon orateur, il doit connaître et appliquer les trois devoirs de l’orateur selon Cicéron : docere, instruire/informer par la rigueur de son argumentation, delectare/placere/consiliare, plaire/charmer par la qualité de son style et movere, émouvoir par l’humour et le pathétique. Dans le film 12 hommes en colère, le protagoniste dont son nom d’acteur est Henry Fonda utilise ses trois devoirs pour convaincre les autres jurés sur l’innocence de l’accusé. Tout d’abord avec docere, il se base sur les faits de l’audience en découpant chaque preuves et témoignages comme par exemple avec celui de la femme qui avait vu le jeune homme tué son père devant ses yeux alors qu’elle ne voyait pas bien en vue du manque de ses lunettes de vues sur le moment. Ce détail a été par ailleurs trouvé par le vieil homme, le juré n°9, qui avait remarqué les mêmes traces de lunettes sur les côtés du nez de la femme que sur le nez du juré n°4. Cela est de plus signe d’alliance et du début du fonctionnement de l’autorité du juré n°8 sur le reste du jury. Par la suite avec delectare, malgré son manque de parole au début du débat il a su se faire imposer par la suite. Il parle lentement et peu fort, pourtant on pourrait penser que l’on doit parler fort pour faire valoir son autorité or lui n’a pas besoin de cela pour qu’on l’écoute ; regarde dans les yeux la personne avec qui il discute, il se lève et utilise aussi le toucher. Il tente aussi de se mettre dans la peau des personnes qui ont témoigné ou même de l'accusé, c'est ce qu'il fait tout le long du film même, il ne dit pas qu’il est coupable ou non mais laisse juste la place au doute. Et enfin movere, il use les sentiments sur les autres jurés en leur disant que le jeune homme aurait pu tuer son père comme une revanche après les violences qu’il a subi durant son enfance par sa famille. Pour appuyer son discours le protagoniste utilise aussi beaucoup de gestes majoritairement de la main mais aussi des jeux de regards, il se lève, se déplace dans la salle, il utilise ses notes, se touche le visage, se rassoit. Il ne lui faudra finalement que 4 tours pour réussir à obtenir un vote à l’unanimité sur l’innocence de l’accusé. La rhétorique est à la recherche de la vérité. On pourrait penser que le jury n°8 est l’incarnation de la rhétorique, il souhaite à tout prix la vérité, que le jeune homme soit le tueur ou non. Ce film se construit autour d’une réflexion sur la tension entre le désordre et l’ordre. Or la rhétorique vise à mettre de l’ordre. Comme dit précédemment, le seul homme qui a voté non coupable est l’incarnation de la rhétorique donc c’est lui qui vise à mettre de l’ordre dans tout ce désordre que sont les autres jurés grâce notamment à son autorité. Le discours de Périclès dans l’ouvrage la guerre de Péloponnèse de Thucydide reproduit ce même schéma. Périclès énonce un discours en l’honneur des premiers soldats morts au combat lors de la guerre de Péloponnèse. Il est l’incarnation de l’ordre dans le désordre et le chaos de la guerre qui leur ont fait perdre de nombreuses vies. L’art de la parole est divisé en trois différents types de discours créés par Aristote. Tout d’abord le genre délibératif qui interroge, débat sur l’utile et le nuisible, et regarde le futur ; le genre judiciaire qui interroge le juste et l’injuste, et regarde le passé ; et enfin le genre épidictique ou démonstratif qui interroge le beau et le laid, et regarde le présent. Par exemple dans le cas de 12 hommes en colère, ils utilisent le genre judiciaire. Ou encore durant la cérémonie de Perceval, il utilise le genre délibératif.

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