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Commentaire Le myrte Yves Bonnefoy

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Par   •  4 Août 2015  •  Commentaire de texte  •  3 499 Mots (14 Pages)  •  2 844 Vues

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Le Myrte

L’œuvre d'Yves Bonnefoy est marquée par la volonté d'ancrer le langage dans la matière. Ainsi, comme en témoigne le recueil Un Feu va devant nous, les thèmes de l'arbre, la pierre, le feu et l'eau, etc jalonnent toute sa création poétique. Yves Bonnefoy s'inspire à la fois du symbolisme Mallarméen et du surréalisme pour proposer une nouvelle définition de la poésie moderne. « Le Myrte », constitue la cinquième pièce du recueil Un Feu va devant nous et se présente comme un poème de facture assez traditionnelle. Il est composé de trois quatrains d'alexandrins, à l’exception de deux décasyllabes au second et sixième vers. Le poème expose, dans un langage simple, un souvenir vu à travers le regard du poète. Cependant ce souvenir se détache de la subjectivité du narrateur pour atteindre une certaine universalité. Comment à partir d'un souvenir, le poète recrée-t-il, par le langage, un monde qui rallie idée et matière ? Tout d'abord nous allons voir comment le poème déconstruit la réalité pour recréer un monde onirique. Ensuite, nous montrerons que l'écriture du poème s'ancre dans la matière. Enfin, nous verrons en quoi le poème propose une réflexion sur la fonction poétique.

Un univers onirique

Une impression de rêve semble se dégager de tout le poème, et constitue le premier indice d'une déconstruction de la réalité.  L'univers onirique se construit ici par le biais de plusieurs procédés. D'une part la tension entre héritage classique et modernité permet de crée une forme nouvelle, propre à générer l'onirisme.D'autre part, le poème évolue dans une simplicité conquise, qui renforce l'impression d'un monde imaginaire. Enfin, l'intemporalité plonge le poème dans une atmosphère merveilleuse et universelle.

Tension entre héritage classique et modernité.

Le poème se place, dès la première lecture, entre héritage classique et modernité. Le lecteur peut relever la présence d'alexandrins, dont le rythme donne au texte une noble grandeur. Cependant ce rythme classique est bouleversé par le décasyllabe aux vers 2 et 6. Or le décasyllabe correspond au vers de l'oralité, en opposition totale avec l'alexandrin. De cette opposition née une forme inédite, générant une forme d'onirisme. L'absence de rime, dans les deux premiers quatrains, contribue à renforcer la tension entre héritage classique et modernité. Par ailleurs, le texte se place du côté de la poésie classique et romantique par les thèmes du souvenir et de l'amour avec des éléments du corps qui rappellent le blason : « les lèves » (v.2), « tes cheveux » (v.8), « nos corps » (v.10). Cependant les références au blason et à l'amour ne se sont qu'allusives.Et de plus, la présence du pronom « je » ,associé au thème souvenir, ne génère pas de lyrisme dans le sens classique du terme. En effet, dans ce poème il n'y a aucun épanchement de sentiments, tout passe par la sensation. Le lecteur a ainsi l'impression de se trouver à la frontière entre deux formes, l'une classique, l'autre moderne. De ce poème hybride, se dégage alors un fort onirisme.

  1. 2. Une simplicité conquise

En dehors de cette tension entre héritage classique et modernité, l'impression de rêve né aussi de la simplicité du poème. La syntaxe du texte est très claire, voire simpliste ; il y a très peu de subordonnées, aucune inversion sujet-verbe. Le lecteur peut aussi relever les nombreux groupes nominaux minimaux, composés uniquement d'un déterminant et d'un nom commun. Les rares groupes nominaux étendus, sont seulement précisés par des adjectifs épithètes, comme par exemple : « tes cheveux clairs » (v.8), et « la pierre heureuse » (v.4). La syntaxe du poème permet donc bien de rendre d'un monde raréfié, d'où se dégage une impression d’irréalité. Par ailleurs, le lexique du poème est plutôt simple et courant. Le lecteur peut relever les noms communs « terre », « arbre », « pierre », « feux » qui attestent cette idée de lexique simple. Les verbes sont plutôt rares et uniquement conjugués à l'imparfait et au présent. Il s'en dégage une certaine passivité, en lien avec l'impression d’irréalité du poème. Ainsi, l'écriture du poème évolue dans une quête de simplicité, propre à déconstruire la réalité. Et nous verrons plus tard, que ceci aboutit à un nouveau monde, fait de rêve et d’indétermination.

  1. 3. Universalité du souvenir

Cette indétermination se caractérise par une absence de repère spatio-temporels dans le poème. Le thème du souvenir indique au lecteur qu'il se trouve dans un espace appartenant au passé ; cependant la dimension temporelle reste incertaine. En effet l'utilisation de l'imparfait à valeur durative brouille tous les repères. Alors qu'un souvenir appelle en général une narration. cet imparfait place l'écriture du côté de la description,  Ainsi la valeur des verbes donne une dimension intemporelle au poème. Cette intemporalité permet de transposer l'expérience personnelle du poète à une expérience collective. Le souvenir, dont il est alors question, tend vers l'universalité. La présence du présent aux vers 3 et 12 témoigne de cette universalisation du souvenir. En effet, le présent prend ici une valeur étendue, c'est à dire qu'il s'accomplit à la fois dans le passé, le présent et le futur ; d'où le sentiment d’intemporalité universelle. Par ailleurs, seul l'adverbe « parfois » constitue un repère temporel, mais ce repère est par nature indéterminé. En effet, il indique seulement qu'une action s'est déjà produite au moins une fois. La réitération de l’adverbe dans les 3 quatrains : « parfois je te disais » (v.1), « parfois je te savais » (v.5) et « parfois le lit tournait » (v.11) ancre le poème dans une intemporalité répétitive. Cette intemporalité contribue à plonger le poème dans une atmosphère de rêve. En outre, l'absence de référents précis aux pronoms marque aussi l’indétermination. Les pronoms « je », « tu » et « nous » ne peuvent s'interpréter qu'en rapport avec la situation d'énonciation. Or le lecteur ne sait rien sur cette situation. Enfin, ces même pronoms personnels témoignent de l'universalisation du poème. Il y a tout d'abord le pronom sujet « je » qui s'appose au pronom complément d'objet « te ». Il s'en suit leur union à travers le pronom sujet « nous » au vers 5. Il s'en dégage bien l'idée d'un passage de l'expérience personnelle du poète à une expérience collective.

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