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La nourriture dans les contes de Perrault

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Par   •  10 Décembre 2023  •  Commentaire de texte  •  5 173 Mots (21 Pages)  •  123 Vues

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Commentaire de texte : Les contes de Perrault

Par Sonia Foughalli-Atti et Kaia Kapica

Pour le cours de Nadine Jasmin

Université de Strasbourg 

« Je bois à la soif à venir. Je bois éternellement, ce m'est éternité de beuverie, et beuverie d'éternité. Chantons buvons ». Dans Gargantua de Rabelais la nourriture, la boisson, est omniprésente. Elle permet à l'auteur à la fois de faire voir l'évolution morale et physique du protagoniste éponyme, mais aussi porteuse d'une porteuse d'une réflexion et d'une jouissance sur les mots, sur la langue. La nourriture peuple également les contes, que ce soit de manière anecdotique ou comme trame principale de la fable. Les contes en prose et en vers de Perrault n'échappent pas à cette présence. de Grisélidis au Petit Poucet, l'eau, le vin, les festins et les petits bouts de pains aide à la création d'un sens, celui du conte, et sont le reflet de la perception de l'auteur et de son temps. Cette omniprésence de la nourriture rend compte de son "omnipotence". Pourtant le conte, merveilleux par sa définition, ne semble pas pouvoir coexister avec ce qui appartient au domaine des besoins naturels, la nourriture, le prosaïque par excellence. C'est pourquoi il est intéressant de s'interroger sur ce qu'apportent les aliments au domaine du merveilleux, et à celui plus généralement de la poétique du conte, mais également comment ils contribuent à sa désacralisation et apportent un sens nouveau, plus latent. Si la nourriture permet à la fois de créer le merveilleux ou au contraire d'y insérer du réalisme, c'est également celle-ci qui apporte un sens plus latent et pluriel. S'élabore alors une cuisine langagière où la nourriture se fait le support de l’écriture.

I.La motif de la nourriture : une oscillation entre le merveilleux et le réalisme d’une époque

Le motif de la nourriture apparaît d'emblée comme un motif propice à la trame, il va faire évoluer l'intrigue. Dans un premier temps, la nourriture apparaît comme une aide à nos protagonistes. Nous pouvons le constater à plusieurs reprises dans Cendrillon et Peau d'Âne par exemple. En effet, la nourriture se révèle dans ces deux contes comme une voie menant inopinément à l'amour. C'est grâce à la fameuse citrouille que Cendrillon parviendra au bal, puisque sa Marraine-fée changera la citrouille en un beau carrosse. Dans Peau d'Âne, c'est la galette qui mène le Prince à Peau d'Âne puisqu'elle fait tomber son anneau -de manière tout à fait hasardeuse- dans la pâte qu'elle pétrit. Nous pouvons donc également soulever l'exemple du conte Les Fées. Assurément, il n'est pas question de nourriture, ce qui entre en jeu dans ce conte c'est l'eau. Celle-ci va à la fois lancer l'action et mettre en relief sa dimension merveilleuse. Car en effet, c'est en effectuant un geste simple : abreuver une pauvre femme -qui est en réalité une Fée- que la soeur cadette se voit récompensée d'un don merveilleux à l'image de son honnêteté. A contrario, sa soeur aînée connaît une fin pour le moins tragique, il est alors intéresser d'étudier la nourriture en tant qu'annonciatrice de malheurs.

Bien que la nourriture apparaisse pour nos personnages comme un moyen d'arriver à « leurs fins », elle se montre -dans un deuxième mouvement- véritablement comme un « élément perturbateur ». Elle va en quelque sorte mener nos héros à des complications. Prenons l'exemple de La Belle au bois dormant, l'intrigue est déclenchée lors d'un festin auquel une vieille fée n'est pas conviée, et qui jettera un maléfice à la Princesse. Dans Le Petit Poucet, la fratrie s'égare et ne retrouve plus son chemin, car les miettes semées par le petit dernier ont été mangées par des oiseaux. Mais alors que cet aspect semble perturber nos protagonistes, il est en fait capital quant à leur évolution tout au long de leurs péripéties. Outre ces deux aspects que nous venons de soulever -la nourriture tend également à élever socialement nos protagonistes.

Nous sommes donc amenés dans ce troisième mouvement à nous pencher sur le motif de la nourriture comme un moyen qui permet d'élever nos protagonistes à un rang « supérieur ». La lecture de Cendrillon montre qu'elle est humiliée et exploitée, mais ce statut change dès lors où elle parvient à s'introduire au bal (qui nous le rappelons est un lieu de festivité aux diverses menus). Néanmoins, si la « Vilaine Cucendron » devient la « jolie Princesse », son affranchissement n'est pas simplement lié au fait qu'elle ait réussi à s'introduire au bal, en effet, Cendrillon maîtrise parfaitement les codes de la société -qui lui permettront d'accéder au trône-, et s'inscrit dans une logique de "don", je cite p.265 : « Elle alla s'asseoir auprès de ses soeurs, et leur fit mille honnêtetés : elle leur fit part des oranges et des citrons ». Les oranges et les citrons étaient à cette époque-là des fruits de grand luxe que l'on servait aux invités. La nourriture répond alors à un schéma ternaire en ce sens qu'elle est à la fois adjuvante, annonciatrice et médiatrice. Cependant, il est intéressant d'étudier la nourriture dans sa dimension merveilleuse.

L’écriture de Perrault se caractérise par les idéaux esthétique de son temps, à savoir brièveté, concision, et clarté. On comprend alors que la description de la vaisselle -aussi brève soit-elle n'est pas anodine. L'exemple le plus flagrant se trouve à la p.186 dans La Belle au bois dormant, je cite : « On mit devant chacune d'elles un couvert magnifique, avec un étui d’or massif, où il y avait une cuillère une fourchette, et un couteau de fin or, garni de diamants et de rubis. » Un autre exemple que l'on peut citer est celui de La Barbe bleue, l'incipit s'ouvre par : « Il était une fois un homme qui avait de belles maisons à la Ville et à la Campagne, de la vaisselle d'or et d’argent.. » Évoquons également le beau Flacon qui prit la mauvaise soeur dans Les Fées. L'ensemble des récipients qui servent à boire, et à manger est mis en valeur, et contribue ainsi au merveilleux. D'autres éléments nous fascinent tout au long de la lecture, l'exemple du boudin qui apparaît dans Les Souhaits Ridicules, nous fascine. Cet univers ainsi que  ses attributs nous sont étrangers, et donc sont plus aptes à nous séduire. Perrault va plus loin dan sa créativité, notamment en métamorphosant les aliments. L'aliment devient alors source de magie qui participe au merveilleux, et donc au rêve. C'est le cas dans Cendrillon lorsque la Marraine-fée transforme la citrouille en un beau carrosse, nous plongeons ainsi dans un imaginaire symbolique, puisque la métamorphose de la citrouille en carrosse est à l'image de l'ascension de Cendrillon, -domestique en charges des plus viles tâches- devenue Princesse.

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