Comment Apollinaire renouvelle-t-il le lyrisme traditionnel grâce à l’hermétisme ?

Commentaire stylistique

Problématique : Comment Apollinaire renouvelle-t-il le lyrisme traditionnel grâce à l’hermétisme?

1. Le lyrisme traditionnel

1. Expression lyrique

-Mise en scène de la première personne : occurrences de déictiques de la P1 « je » en tête de vers (vers 1, 5, 13) dès le début du poème centralise la focalisation sur l’expression de la première personne, reprit par « m’ » (v.2), les possessifs « mon », « ma », « mes » (v.5,6,8,13,14), et le pronom tonique « moi » (v.3). C’est l’éthos du poète qui est mis en scène.

-Apostrophe au début de la deuxième strophe qui fait de la « Mémoire » le destinataire  (v.7)

-Les références à la nature : « le soleil » (v.6), « oiseaux » (v.6),« cygnes » (v.9), « serpents » (v.9), « vipères » (v.8), « l’Océan » (v.13). Le poète est inscrit dans cette isotopie (cf. COI): « Je flambe dans le brasier » (v.1), « Je trempe […] dans l’Océan »

-L’isotopie du feu sature le poème : « brasier », « ardeur », « flambent », « le feu », « le soleil ». Le feu est utilisé dans un sens concret « brulures », « brasier » ; sert à exprimer les sentiments « ardeur » ; employé comme métaphore « Je flambe ». La polyptote « flambe » (v.1)/ « flambent » (v.3). La dérivation « feu »/ « flamme »/ « flambe ».

1. Reprise de topoï poétiques pour exprimer le je  

-La plupart des vers constituent une unité sémantique (hormis les v.1/2 et v2/3/4/5)

-Les vers 12 et 13 de la deuxième strophe sont écrits en alexandrin, cette strophe comporte d’ailleurs des rimes croisées en ABAB (forlignent/bonheur/cygnes/chanteurs).

-Apollinaire use de la métaphore classique du feu pour désigner la passion amoureuse « Je flambe » (v.1), la thématique du feu semble se référer à la passion amoureuse destructrice comme dans la tradition classique.

-Références religieuses « croyants », « interçis », « l’éternité », « immortels » et à la mythologie grecque « Tyndarides ». Apollinaire par l’onomastique de son nom semble lié à Apollon. Le vers 6 associe par le coordonnant « et » sa « face » et le « soleil ». Le poète se définissant par sa nature supérieure.

-Au vers 7 la continuité entre le poète et son héritage classique (ici grec) est marquée par des[…]aux « Des Tyndarides aux vipères ardentes de mon bonheur »

-Le poème suit un schéma actantiel : Tout d’abord dans la strophe 1 le poète est consumé par le feu ce qui lui permet d’accéder à une forme de résurrection « Voici ma vie renouvelée » (v.11). Le poète semble se régénérer par le feu.

-L’éthos du moi se construit en opposition aux autres personnages. D’abord aux « mains des croyants » (v.2) et aux « membres des interçis » (qui sont rapprochés par l’hypozeuxe) et qui semblent être désigné par l’impératif du vers 4. Ce sont des personnages mais qui ne sont désignés que par synecdoque ce qui accentue l’effet de séparation. Enfin le poète semble accéder à une nature supérieure, quasi-divine qui le protège du feu, rappelant la figure traditionnelle du uatès. Il est ainsi séparé des autres désignés par « ceux » (v.17) en opposition au « moi » du vers précédent. Cette séparation est marquée par la négation du vers 16 « Il n’y a plus rien » , le pronom rien double la négation.

1. Renouvellement poétique par l’hermétisme

1. Forme et effets de brouillage

-Apollinaire inscrit son poème dans la modernité. Il est en écrit en vers libre. Le flou syntaxique suscité par l’absence de ponctuation créer un flou sémantique. Dans le vers 4, « Eloignez du brasier les ossements » l’antéposition du verbe indique une tournure impérative mais on ne connait pas le destinataire. On peut songer aux « croyants » dont le poème mentionne les mains au vers 2 ou aux « interçis » dont le poème mentionne les membres au vers 3. Au vers 7, « Combien » qui est marqué par la majuscule pourrait être perçu comme un adverbe exclamatif d’intensité ou comme un adverbe interrogatif ce qui change le sens des trois vers suivants. L’interprétation syntaxique joue alors un rôle très important. De plus, se pose ici aussi la question du destinataire.

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