Analyse linéaire de La Reine Morte
Commentaire de texte : Analyse linéaire de La Reine Morte. Recherche parmi 302 000+ dissertationsPar Marco8532240 • 4 Juin 2025 • Commentaire de texte • 2 030 Mots (9 Pages) • 36 Vues
Lecture analytique n°1
La Reine Morte, Acte 1, tableau 1, scène 1
(L’audience)
Introduction :
- Ce texte est un extrait …
- Présentation de l’auteur : Henry de Montherlant …
- Présentation de l’œuvre : ….
- Présentation de l’extrait : Cet extrait …
- Problématique : comment l’auteur présentent-il au spectateur un affrontement diplomatique dans un contexte de crise politique ?
- Lecture
- Présentation des axes :
- Axe 1 : l.1 à 11, Ferrante cherche à apaiser la tension en montrant de la compassion
- Axe 2 : l.12 à 29, un affrontement diplomatique
- Axe 3 : L. 30 à 37, la clôture magistrale de l’entrevue.
- Lignes 1 à 11 : Ferrante cherche à apaiser la tension en montrant de la compassion
- Dès les premières lignes, Ferrante cherche à dominer l’échange, montrant toute son expérience politique.
- Il construit son ethos (son charisme royal) en rappelant sa fonction et en utilisant la première personne du singulier :
- « le roi », « moi », « je » et « m’ » l. 2, « le mien » l.2
- Ponctuation : ton solennel
- Dans l’ensemble de la réplique : 11 marqueurs de première personne.
- Par une formule très habile, Ferrante, pourtant dans une situation politique très délicate, cherche à retourner la culpabilité contre l’infante, en lui enjoignant d’apaiser son ressentiment au vu de la compassion du roi :
- « si je vous dis que je comprends votre mal et si votre mal n’en est pas adouci, à votre tour vous m’aurez offensé ». (L.1 et 2).
- Hypothèse (si) = pas brutal, apaisement diplomatique
- C’est la compassion qui est le premier atout utilisé par Ferrante dans cet extrait :
- C’est l’autre raison qui explique l’utilisation massive de la première personne : Ferrante fait mine de prendre la situation de l’Infante personnellement très à cœur.
- L.2 : « votre mal est le mien » : phrase lapidaire, par laquelle Ferrante rejoint l’Infante dans sa douleur.
- Afin de sortir de ce mauvais pas diplomatique, Ferrante s’associe au désarroi de l’Infante en lui expliquant le contexte de la discussion qu’il a eu avec son fils :
- La récurrence des marqueurs de négation montrent une apparente impuissance face au manque de franchise de Pedro : « je ne puis dire plus », « il n’y avait que l’ennui », « il n’a pas de goût », « ne fût pas ».
- Afin de rétablir la relation diplomatique, se dissocie de son fils et s’associe au sentiment de honte de l’Infante :
- « au Prince / mes intentions » (l. 2-3) // « Il me cacha / son obstination » (l. 5)
- « c’est à vous qu’il la jette, avec une discourtoisie qui m’atterre ».
- Allitération en « t » : colère / indignation
- Par cette dernière phrase, le roi s’associe à nouveau à la douleur de l’infante, toute en personnalisant la situation : le nom commun « discourtoisie » est un euphémisme qui fait glisser le sujet hors du champ politique, pour l’amener sur le terrain sentimental. Le prince a fauté contre l’amour courtois, il ne s’agit plus d’un faux pas diplomatique grave.
- Cette tentative habile de Ferrante fait réagir vivement l’Infante qui montre ici sa compréhension des manœuvres politiciennes, malgré son jeune âge :
- elle met le doigt de manière lucide sur la distinction à opérer entre « la femme » et « l’Infante »
- L’Infante montre ainsi à Ferrante qu’elle ne se laissera pas abuser par son apparente compassion, et qu’elle voit clair dans sa stratégie qui consiste à la considérer non comme une princesse humiliée mais comme une femme blessée.
- Lignes 9 à 11 : l’Infante laisse éclater sa colère et devient blessante : elle n’est pas sensible à la compassion du roi, et fait preuve d’irrespect montrant son orgueil royal.
- Impératif : « laissez-moi »
- Adverbe de temps : « maintenant » : fermeté.
- Orgueuil, fierté royale et vibrante : dans mon pays / dans mon pays.
- Par une construction de comparaison, l’infante oppose le Portugal et l’Espagne :
- Navarre : pays doux et respectueux.
- Portugal : pays d’insultes, pays qu’elle n’aime pas, pays manquant de douceur.
- L’opposition « brume des neiges » / « souffle odorant » sonne comme une insulte à l’égard du peuple portugais.
- On retrouve dans la réplique de l’infante un phrasé poétique qui caractérise les dialogues de Montherlant.
- Lignes 12 à 29, un affrontement diplomatique
- La ligne 12 marque une rupture dans le ton de Ferrante : il coupe la parole à l’Infante, coupant ainsi le flot de sa parole insultante.
- « Partir ! »
- La triple exclamation et le parallélisme de construction exprime toute la tension de la situation et la véhémence du roi.
- Cela permet aussi, et surtout, de reprendre le contrôle de la parole, notamment en rappelant à l’Infante les enjeux stratégiques (« perdre »).
- L. 12 à 14 : « plutôt perdre que supporter » : par cette maxime éloquente, l’Infante affirme la supériorité de l’honneur sur la stratégie politique.
- Ce sens de la formule nous rappelle l’importante des mots qui sonnent, en politique : cet affrontement diplomatique se déroule devant des spectateurs (les dames d’honneur), qui représentent ici le public. IL faut gagner par les mots, être éloquent.
- Néanmoins ce public peut être aussi acerbe : les dames d’honneur pointent dans leurs murmures l’hypocrisie de l’Infante, qui n’a pas montré dans le passé un amour débordant pour sa Navarre natale.
- L. 15 à 24 : il s’agit de la partie la plus directe de l’affrontement politique :
- Ferrante a besoin de l’Infante reste, pour sauver un mariage politique à l’intérêt
stratégique.
- L’affrontement est visible par les impératifs de Ferrante (restez l. 15 et 22) et l’aspect lapidaire (caractéristique d’un homme habitué à ordonner) des phrases du Roi (l.15, 18, 22).
- Néanmoins Ferrante, rompu aux codes de la diplomatie, sait enrober ses ordres pour être convaincant : « de grâce » l.15, si + CONDITIONNEL PST et PASSE (l. 22- 23).
- L’infante doit partir pour laver son honneur : elle reste ferme et maintient une éloquence qui témoigne de sa fierté :
- « Si Dieu voulait … le bon plaisir de Dieu » : la métaphore filée de la promesse divine met en exergue l’orgueil et la fermeté de la princesse. + subj imparfait = éloquence.
- De même la métaphore du taureau (l.19 à 21) témoigne de la force de l’Infante.
- Renforcée par l’allitération en « r » (Navarre, dur, taureau, résistantes, marche, sur, rocaille).
- Ferrante quant à lui varie les stratégies pour faire plier l’Infante
- Il sème le doute sur les motivations de son interlocutrice : « vous aimez d’avoir mal » est une façon de montrer que l’Infante ne cherche pas à apaiser la situation et qu’elle se complait dans sa position victimaire.
- L.22-23 : il rappelle à l’Infante l’importance des apparences en politique : il faut « éviter le scandale ». Par une proposition subordonnée de condition et l’utilisation du conditionnel, il ouvre habilement deux hypothèses positives créées par l’attente : soit Pedro revient sur son affront, soit l’Infante part à à un moment plus propice.
- L. 24 : l’Infante, par une ultime hyperbole, refuse tout compromis : « je ne revivrai ».
- L. 25 à 29 : Ferrante devient plus agressif et utilise la forme interrogative pour émettre une nouvelle insinuation dissimulée : l’Infante est faible.
- « Est-il donc trop dur » ?
- L’adjectif indéfini « quelques » a ici une valeur d’euphémisme : le roi amoindrit l’effort demandé pour mettre en défaut l’Infante.
- L’utilisation du verbe « pouvoir », à la forme interro-négative à la ligne 27 permet de montrer du doigt l’impuissance de l’Infante. Cette forme habile cherche à pousser l’Infante à la faute : soit elle s’entête et montre de la faiblesse, soit elle est forte et renonce à son projet de départ.
- La réponse de l’infante montre sa maîtrise et sa noblesse : elle réagit vivement (trop dur ?) et suscite l’admiration des dames d’honneur + elle répond par une interrogation, pour éviter habilement le piège d’une réponse qui la mettrait en difficulté « il y a quelque chose que je ne pourrais pas ? ». = maîtrise remarquable de la rhétorique.
- L. 30 à 37, la clôture magistrale de l’entrevue.
- La ligne 30 marque une nouvelle rupture dans cet échange : en effet, Ferrante devient plus volubile et adopte un ton paternaliste.
- Il fait mine de rejoindre l’Infante sur le plan émotionnel « quelle fatigue ! » . Par cette exclamation, il se montre compréhensif.
- La deuxième exclamation, construite comme un parallélisme syntaxique (« mais quel honneur ! ») permet de changer la tonalité de la réplique : F. devient sentencieux, professoral.
- Ce changement de tonalité se confirme à la ligne 31 : Ferrante, sous couvert d’un compliment construit par un comparatif d’égalité devient condescendant, protecteur (« vous êtes aussi grande que vous êtes noble »).
- A la ligne 31, Ferrante s’impose comme une figure paternelle :
- Il annonce la remontrance contre son fils « il va m’entendre », infantilisation du Prince
- Ô ma jeune Princesse : le ton condescendant et paternaliste est particulièrement visible par l’adjectif possessif « ma ».
- Ligne 36 : Ferrante utilise un ton prophétique, une posture de sage et d’ancien, qui annonce à la jeune princesse son avenir.
- Par l’utilisation du futur catégorique « vous vivrez » et d’une maxime (vous vivrez et vous vivrez lavée), le roi s’impose comme celui qui sait, qui connaît et qui enseigne.
- Le pronom indéfini « ON » est ici professoral, tout comme « rien » et le présent de vérité générale « rien ne passe ».
- Ligne 37 : Ferrante laisse à Inès le dernier mot, ce qui peut laisser croire qu’elle le remporte. Néanmoins, sa conclusion « par elles je serai lavée » reprend l’affirmation de Ferrante « vous vivrez lavée » : cette houleuse confrontation finit donc sur un point d’accord, montrant les fruits de l’habileté du roi.
Conclusion :
Ainsi, nous avons pu voir que l’auteur présente dans cet extrait un affrontement politique dans lequel chaque protagoniste cherche à l’emporter par l’art de la parole et la maîtrise des codes de la diplomatie. On peut considérer que Ferrante sort vainqueur de cette épineuse audience, bien qu’en position de faiblesse : les nombreuses stratégies cariées dont il use montrent sa maîtrise de la rhétorique politique. Sa parole politique laissera place à une parole paternelle plus brutale quand il confrontera Pedro à ses actes, ce qui permettra au spectateur de mieux comprendre le caractère complexe du roi.
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