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Première chambre civile de la Cour de cassation, arrêt du 5 juillet 2017

Commentaire d'arrêt : Première chambre civile de la Cour de cassation, arrêt du 5 juillet 2017. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  13 Novembre 2023  •  Commentaire d'arrêt  •  2 458 Mots (10 Pages)  •  106 Vues

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Par occupation, les meubles ayant cessé d’être appropriés peuvent être acquis. Dans cette catégorie, se retrouvent les trésors, les res derelictae et les épaves. Les trésors, eux, suscitent beaucoup de convoitises et ont toujours provoqué de nombreux débats quant au droit de les conserver ou non. Parallèlement, dans ces situations, l’interrogation principale reste à savoir à qui revient ce trésor découvert. Depuis 1803, la définition du trésor est restée inchangée néanmoins des équivoques perdurent. Telle est la précision apportée par la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 5 juillet 2017, publié au bulletin pour relater que toute chose ne constitue pas un trésor.

En l’espèce, il s’agit d’un brocanteur qui, en janvier 1985, a fait l’acquisition d’un tableau peint sur bois qu’il a présenté par la suite à un antiquaire. Celui-ci remarque des éclats de dorure et conseille au brocanteur de le confier à un restaurateur afin de le nettoyer. Le restaurateur a alors révélé que, sous la peinture apparente, se trouvait une œuvre du XVème siècle attribuée après plusieurs années de recherches et de restauration, au peintre Jean Malouel. En 2011, le musée du Louvre a fait l’acquisition de cette œuvre nommée le Christ de pitié pour un prix de 7,8 millions d’euros.

L’antiquaire a assigné le brocanteur pour obtenir sa condamnation à lui verser la moitié du produit net de la vente. La juridiction de premier degré déboute le demandeur de son action. Il interjette appel devant la Cour d'appel de Riom. La Cour d’appel de Riom, par un arrêt confirmatif, en date du 04 avril 2016 déboute l’appelant de sa demande. Il forme un pourvoi en cassation. La Cour de cassation rend un arrêt, en date du 5 juillet 2017 par lequel elle rejette le pourvoi.

Les motifs de la Cour d’appel de Riom se fondent sur le fait qu’il s’agit bien d’un trésor au sens de l’article 716 mais rejette la qualité d’inventeur aussi bien de l’antiquaire que du restaurateur. Ce dernier ne saurait être inventeur puisque l’œuvre a été révélée dans le cadre d’une commande professionnelle tendant à cette fin. Il ne s’agissait donc pas d’une découverte par le pur effet du hasard, ce qui devait exclure la qualité d’inventeur du restaurateur. Quant à l’antiquaire, il ne pouvait avoir découvert le trésor puisque ce n’est pas lui en toute hypothèse qui par sa seule intervention et l’effet du pur hasard a mis à jour la peinture de Jean Malouel.

Les moyens des parties s’articulent ainsi : l’antiquaire, pour son conseil estime qu’il est à l’origine de la découverte, que son intervention était décisive dans la découverte du tableau cache, ainsi que le restaurateur, soutenant avoir révélé l’œuvre, font valoir notamment qu’ils sont inventeurs du trésor en application de l’article 716 du Code civil pour obtenir une récompense.

La question à laquelle devait répondre les juges de la Cour de cassation est de savoir si l'œuvre cachée sous la peinture apparente d’un tableau, appartenant à un propriétaire initial peut revêtir la qualité de trésor au sens de l'article 716 du Code civil.

La Cour de cassation, au visa de l’article 716 du Code Civil, estime que l’œuvre dissimulée ne saurait être un trésor au sens de cet article puisqu’elle est en réalité la propriété du brocanteur. La qualification de trésor étant rejetée, il ne lui est plus nécessaire de se demander qui en est l’inventeur. Le pourvoi est donc rejeté grâce à une substitution de motifs.

Cet arrêt présente l’intérêt de porter sur la qualification de trésor dont les conditions et le régime d’attribution fondé sur l’équité suscitent de nombreuses interrogations. Il sera vu dans un premier temps la solution bienvenue de la cour de Cassation sur la qualification du trésor (I) et dans un second temps, le rejet justifié de la qualification de trésor exclusif de toute rétribution pour l’antiquaire (II).

I) La solution bienvenue de la cour de Cassation sur la qualification du trésor

La qualification de trésor doit juridiquement répondre aux exigences de l'article 716 du Code civil qui le définit en son second alinéa comme « toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le pur effet du hasard». Aussi est-il notamment exigé que la nécessité du hasard est requise concernant la découverte de l’objet du litige (A) et qu'il soit enfoui ou caché (B).

A) La nécessité du hasard dans la découverte du tableau

Pour une partie de la doctrine, la découverte du trésor par l'effet du hasard n'est pas une condition de qualification du trésor, elle n'en est qu'une circonstance. Pourtant, le pur effet du hasard est une condition inscrite dans la définition même du trésor posée par l'alinéa 2 de l'article 716 du Code civil. En effet, la découverte du tableau caché par le restaurateur n'est que le résultat de la commande du brocanteur. Cette restauration fait effectivement suite au bon conseil de l'antiquaire, sans pour autant que ce conseil ne soit suffisamment déterminant pour être assimilé à la réalisation de la condition du hasard. C'est d'ailleurs ce que relevait la Cour d'appel en rappelant que la présence de traces de dorure ont attiré l'attention de quelques personnes qui n'ont pour autant pas jugé opportun d'acquérir la peinture, mais explique en grande partie la cause de recherches plus approfondies, de sorte que si l'on présume ou soupçonne l'existence d'un trésor, il n'y a plus de hasard.

La Cour d’appel de Riom avait considéré que ce n’était pas l’antiquaire qui avait découvert, par le pur effet du hasard, l’œuvre attribuée au peintre Jean Malouel, découverte qui résultait en réalité des travaux de nettoyage du restaurateur d’art. L’antiquaire indiqua, tout d’abord, qu’il avait conseillé au brocanteur de faire nettoyer le tableau afin de vérifier ce qui se trouvait sous la peinture apparente et que c’est donc ce conseil qui avait été décisif dans la découverte de l’œuvre, dont il avait déclenché le processus, de sorte qu’il en était l’inventeur au sens de l’article 716 du Code civil. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi, en procédant par substitution de motifs, et préféra ne pas s’attarder sur les conditions de la découverte de la peinture primitive. Pour vérifier si la découverte a eu lieu par le pur effet du hasard, il semble nécessaire de sonder la psychologie de l’auteur de la découverte.

La justification de cette condition

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