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Commentaire d’arrêt : Cass. civ. 1re, 20 avril 2022, n° 20-22.866

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Par   •  15 Février 2024  •  Commentaire d'arrêt  •  1 995 Mots (8 Pages)  •  82 Vues

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Roumane Mélissa

Cass. civ. 1re, 20 avril 2022, n° 20-22.866

Dans un arrêt en date du 20 avril 2022 la première chambre civile de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence sur la qualification de l’exception tirée de l’extinction de l’obligation principale issus de la prescription biennale du code de la consommation.

En l’espèce, par acte sous seing privé du 22 novembre 2007, une banque a consenti à des emprunteurs un prêt immobilier garanti par le cautionnement d’une société. La banque a assigné les emprunteurs et la caution en paiement des sommes restant dues au titre du prêt. La Cour d’appel a rejeté la demande en paiement et ordonné au frais de la banque la mainlevée de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire. La banque a formé un pourvoi en cassation.

La banque soutenait que la prescription biennale prévue à l’article L. 218-2 du Code de la consommation, en tant qu'exception purement personnelle au débiteur principal résultant de sa qualité de consommateur, ne pouvait être opposée au créancier par la caution. Ainsi, la cour d’appel aurait violé l'article 2313 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue du 15 septembre 2021 en rejetant sa demande contre la caution, en arguant que les emprunteurs ayant invoqué la prescription biennale avaient éteint la dette, ce dont la caution bénéficierait.

L'acquisition de la prescription biennale de l'article L. 218-2 du code de la consommation, procédant de la qualité de consommateur, affecte-t-elle le droit du créancier, de sorte qu'il s'agit d'une exception inhérente à la dette dont la caution, qui y a intérêt, peut se prévaloir, conformément aux dispositions du code civil ?

La Cour de cassation a effectué un revirement de jurisprudence et a rejeté le pourvoi. La Cour rappelle en premier lieu que l'action des professionnels envers les consommateurs se prescrit par deux ans. En second lieu, elle rappelle que conformément à l'article 2313 du Code civil, la caution peut opposer au créancier les exceptions inhérentes à la dette du débiteur principal, mais pas celles purement personnelles à ce dernier. Finalement, la cour affirme que la prescription biennale procédant de la qualité de consommateur affecte le droit du créancier, constituant ainsi une exception inhérente à la dette que la caution peut invoquer.

Il conviendra d’étudier dans un premier temps Un revirement de jurisprudence reconnaissant la prescription biennale comme une exception inhérente à la dette (I), puis nous aborderons Un revirement de jurisprudence controversé (II).

  1. Un revirement de jurisprudence reconnaissant la prescription biennale comme une exception inhérente à la dette

Dans la jurisprudence en date du 20 avril 2022, la Cour de cassation opère une rupture avec la qualification traditionnelle de l’exception tirée de la prescription biennale. En effet, elle anticipe la réforme en reconnaissant l’exception tirée de la prescription biennale comme étant une exception inhérente à la dette dont la caution peut se prévaloir.

  1. Une rupture dans la qualification traditionnelle de l’exception tirée de la prescription biennale

En l’espèce, la banque faisait valoir que la prescription biennale de l’article L218-2 du Code de la consommation, relative à l’action des professionnels pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, constituait une exception purement personnelle du débiteur principale. Or l’article 2313 du Code civil dispose que « la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette, mais ne peut lui opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteurs ». À priori l’exception invoquée par les cautions ne pouvait être opposée aux créanciers. L’argument de la banque demeurait dans le fait que la prescription libératoire extinctive à l’égard du débiteur n’éteignait pas le droit du créancier et lui interdisait seulement d’exercer son action contre le débiteur.

La jurisprudence constante de la Cour sur la question de la qualification de la prescription de l’article L. 218-2 du Code de la consommation semblait également tendre vers la demande de la banque. En effet, dans un arrêt en date du 11 décembre 2019 aux faits similaires, la première chambre civile de la Cour de cassation a rendu une décision en ce sens, affirmant que la prescription prévue par l’article L.218-2 Code de la consommation constituait une exception purement personnelle au débiteur principal, provenant de la qualité de consommateur ayant reçu un service de la part d’un professionnel.  Par conséquent, la prescription ne pouvait pas être opposée aux créanciers par la caution.

Cette jurisprudence a été fortement critiquée par la doctrine. Divers arguments ont été avancés pour contester cette approche. Tout d'abord, la qualification même de la prescription comme une exception purement personnelle au débiteur a été remise en question. Ensuite, en contraignant la caution à payer une dette dont le débiteur a été libéré, cette solution pourrait compromettre le caractère accessoire du cautionnement par rapport au débiteur. Enfin, la doctrine soutenait que cette solution serait inopportune pour le débiteur principal, car, disposant d'un recours personnel, la caution se retournerait nécessairement contre lui après avoir payé le créancier.

Dans l’arrêt en date du 20 avril 2022, la première chambre civile opère une véritable rupture avec sa jurisprudence antérieure en rejetant le pourvoi de la banque. Elle affirme qu'il est nécessaire de modifier la jurisprudence et de décider que l’acquisition de la prescription biennale de l'article L. 218-2 du Code de la consommation précédant de la qualité de consommateur, affecte le droit du créancier. La Cour conclut en affirmant qu’il s’agit d'une exception inhérente à la dette dont la caution, ayant un intérêt, peut se prévaloir.

  1. La reconnaissance de la prescription biennale en tant qu’exception inhérente à la dette

La Cour, dans son arrêt du 20 avril 2022, prenant en compte les critiques formulées par la doctrine, justifie sa décision de faire un revirement par rapport à sa jurisprudence antérieure. Elle explique que la solution ancienne entraînait des conséquences particulièrement inéquitables pour le débiteur principal. La jurisprudence constatait qu'une telle solution exposait le débiteur principal au recours personnel de la caution. Cette solution lui retirait ainsi le bénéfice de la prescription biennale attachée à sa qualité de consommateur contractant avec un professionnel fournisseur de biens ou de services.

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