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Quelle est la cible commune visée dans les deux textes ? Quelles sont les critiques formulées par les deux auteurs ?

Cours : Quelle est la cible commune visée dans les deux textes ? Quelles sont les critiques formulées par les deux auteurs ?. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  13 Novembre 2015  •  Cours  •  2 108 Mots (9 Pages)  •  4 219 Vues

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1. Quelle est la cible commune visée dans les deux textes ? Quelles sont les critiques formulées par les deux auteurs ? (2 points)

Ce sont les courtisans qui sont visés respectivement par La Fontaine et La Bruyère : ils sont désignés par les termes « Messieurs les Courtisans » (v.16), « la cour » (v.17), mais aussi par les impersonnels « chacun » et « on » dans la fable « Les obsèques de la lionne », et par les phrases « Ils ne sont pas les Satellites1 de Jupiter, je veux dire ceux qui pressent et qui entourent le prince, mais ils l’annoncent et le précèdent », et « ils se lancent impétueusement dans la foule des courtisans » dans le texte B. La Fontaine adresse ses critiques aussi bien au roi lui-même, qu’il juge aisé à berner par la flatterie (v.52-55 : « Amusez les Rois par des songes, Flattez-les, payez-les d’agréables mensonges : Quelque indignation dont leur cœur soit rempli, Ils goberont l’appât, vous serez leur ami »), qu’aux courtisans eux-mêmes, à la fois perçus comme possédés par des réactions grégaires, tels des pantins, des « ressorts » privés de volonté propre. Il leur reproche donc tout d’abord d’être des êtres malléables, sans moralité ni valeur, prêts à tout pour complaire à personne royale (v.17-19 : « Je définis la cour un pays où les gens, Tristes, gais,prêts à tout, à tout indifférents, Sont ce qu’il plaît au Prince », « C’est bien là que les gens sont de simples ressorts »), et de former ainsi un corps social vil, qu’il est possible de dresser comme on le fait d’un animal (v.21 : « Peuple caméléon, peuple singe du maître »). Cet esprit de soumission, qui n’autorise aucune contestation du pouvoir ni aucun esprit critique, s’accompagne de flatterie (le terme revient par deux fois dans le texte : v.28 « flatteur », v.53 « flattezles »), de mensonge et de vilénie (le « flatteur » exagère la réaction du cerf, le livrant aux foudres royales : v.28, « Bref, il ne pleura point. Un flatteur l’alla dire, Et soutint qu’il l’avait vu rire). La Bruyère pour sa part décrit ses deux personnages, Cimon et Clitandre, comme des courtisans possédés par une activité débordante en apparence comme le souligne l’énumération « l’empressement, l’inquiétude, la curiosité, l’activité », mais en réalité parfaitement inutile, tout juste bonne à faire croire qu’ils sont indispensables à la bonne marche de l’État : « Leur profession est d’être vus et revus ». À l’instar des courtisans de La Fontaine, ils demeurent donc dans la superficialité (cf. le verbe « paraître » dans la fable), et leur savoir est caractérisé par son inutilité (« instruits à fond de toutes les nouvelles indifférentes, (…) ils savent à la cour tout ce que l’on peut y ignorer »). Ils se joignent enfin sans réflexion (« impétueusement ») à une foule anonyme perpétuellement dans le sillage du Roi(« ils se lancent impétueusement dans la foule des courtisans ; tout ce qui se trouve sur leur passage est en péril »), comme le feraient des animaux (le narrateur dit d’ailleurs d’eux qu’ils « portent au vent », expression réservée aux chiens !) : le moraliste rejoindrait-il ici le fabuliste ?

2. Quels sont les moyens littéraires employés pour convaincre et persuader dans ces deux textes ? Vous répondrez à la question de façon organisée et argumentée, en citant les textes, et en relevant les procédés stylistiques et rhétoriques caractéristiques. (3 points)

Le texte de La Fontaine, comme c’est le cas généralement dans les fables, entremêle le monde des animaux et celui des hommes, créant un univers imaginaire où la critique du pouvoir et des courtisans peut prendre place tout en garantissant une relative impunité à l’auteur. C’est ainsi qu’il est question de l’« antre » du lion, de loups et d’un cerf, mais aussi de notions proprement humaines et même contemporaines de l’époque d’écriture, comme les « Prévôts », la « cérémonie », la « compagnie », ou encore le « temple » et le « patois » : ce subtil équilibre permet la création d’un monde plaisant, voire poétique. À cela s’ajoute l’art du récit, conduit avec fermeté et légèreté : ainsi la situation initiale et la situation finale ne prennent chacune qu’un seul vers (v.1 : « La femme du Lion mourut », v.51 : « Le Cerf eut un présent, bien loin d’être puni »), et deux discours directs viennent rompre le fil de la narration (v.33 : « Le Monarque lui dit », v.39 : « Le Cerf reprit alors »), rendant le texte vivant par la caractérisation des personnages. L’efficacité de l’argumentation est également servie par une savante alternance entre action et portraits des personnages d’une part, et réflexion générale et moralité d’autre part : ainsi le narrateur, après une première partie consacrée à la description de la cour empressée aux obsèques de la lionne, se livre à une première analyse sociale : v.17 « Je définis la cour un pays… », puis reprend le fil de l’histoire : « Pour revenir à notre affaire » (v.24), avant de livrer la morale finale : « Amusez les Rois par des songes… » (v.52). L’esprit critique du lecteur est donc perpétuellement sollicité – à la différence de celui des courtisans eux-mêmes ! Enfin, ne négligeons pas l’effet important produit sur le destinataire par le recours à la première personne (« Pour revenir à notre affaire ») et à la deuxième personne du pluriel (v.11 : « Jugez si chacun s’y trouva »), ainsi que l’art de la versification, qui permet d’imprimer une vivacité concourant grandement au plaisir de la lecture, comme dans le vers 18 « Tristes, gais, prêts à tout, à tout indifférents », où le rythme du vers est accéléré par une accumulation redoublée d’un chiasme. Ainsi, la moralité qui vient clore la fable est renforcée par le plaisir qu’a eu le lecteur à savourer le récit, et prend force de vérité, d’autant plus qu’ont été employées avec finesse au long du textedes tournures généralisantes et des présents gnomiques2 : « On dirait », « C’est bien là », « les gens », par un fabuliste qui s’affirme avec autorité : « Je définis… ».

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