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Préface d'Anthologie de poèmes sur le corps

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Par   •  19 Mai 2019  •  Commentaire d'oeuvre  •  4 212 Mots (17 Pages)  •  697 Vues

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Anthologie de poèmes[pic 1]

L’évolution du corps dans la poésie

[pic 2]

Delphine Treffot

Préface

        De nos jours, la beauté physique est devenue un atout social majeur. Tout est là pour nous le rappeler à chaque instant de notre vie : les publicités, réseaux-sociaux, les discriminations sur le physique, les célébrités ayant un recours abusif à la chirurgie esthétique… De plus, le corps, majoritairement celui de la femme, est grandement sexualisé. Cette anthologie, composée de poèmes de tous les âges, permet de revenir à l’image du corps des temps passés, bien plus pure que celle que nous connaissons maintenant.  

        Epopée, mythes et légendes ont été les premières formes de poésie à proprement parler. L’image du corps apparait d’ores et déjà dans ces textes, qui nous racontent les épopées de demi-dieux, de créatures mythiques et d’Hommes héroïques. Dans L’Illiade, c’est une exaltation des corps masculin héroïques, et le corps est donc lié à la bravoure et à la force. Mais le lecteur se retrouve aussi face à des images sombres dues à de nombreux combats, tel que dans le « chant XXII », où la dépouille d’Hector est trainée sur le sol par le char d’Achille lors de la guerre de Troie. Mais même dans l’antiquité, le corps est aussi lié à l’attirance physique et amoureuse. Dans Les Métamorphoses d’Ovide, un corps harmonieux est attribué aux divinités, et aussi aux personnes d’une lignée valeureuse. Même si un corps délicat peut être une bénédiction, il peut aussi être une malédiction, comme c’est le cas pour Narcisse : homme maudit à tomber amoureux de son propre reflet, ce qui le mènera à la folie.  Mais le corps de la femme est quant à lui uniquement affirmée, jamais décrit. Par exemple, Hélène est seulement décrite « aux bras blancs », alors que sa beauté est à l’origine de la guerre de Troie .

        Bien plus tard, à la renaissance, le corps représente le désir, la fascination, les phantasmes du poète. Le poème devient un moyen de prédilection afin  de dépeindre une possession éphémère, afin de recréer l’émotion qu’évoque le corps désiré, afin même d’arracher au néant le corps de la muse. L’art est aussi un moyen utilisé pour représenter le corps, car plus explicite. Là où le poète use de lyrisme et de figures de style pour donner vie à sa muse, le peintre la reproduit conformément en tableau, comme l’a fait Botticelli dans son tableau « la naissance de Vénus », où il peint sa muse, Simonetta Vespucci, comme une déesse, immortalisant ainsi sa beauté dans la toile. Pétrarque, grand auteur Italien, est admiré pour la perfection de sa poésie versifiant son amour pour Laure. Il a écrit de nombreux sonnets du vivant de Laure, mais également après son décès, afin de rendre immortel l’image de sa bien aimé. Le premier sonnet de son recueil Canzones lui a permit d’adoucir la douleur que lui a causé sa mort. La poésie de Pétrarque a donné naissance au mouvement littéraire du « Néo-pétrarquiste ». Cependant, en France, ce mouvement est assez critiqué, ils voyaient en ces poèmes une image quelque peu irréaliste, qu’on pourrait de nos jours qualifier de « cliché ».

        Mais comment circonscrire la singularité du corps aimé, comment verbaliser l’émotion sans tomber dans ces « clichés pétrarquisant » ? Et bien ceux qu’on appelle les « blasonneurs » ont talentueusement donné une réponse à cette question : ils usent de virtuosité et se focalisent uniquement sur une seule partie du corps. Ce format est ébauché par Claménet Marot, avec « Le blason du beau tétin ». Grâce aux blasons, le corps de la femme est détaillé, mais parfois sans pudeur, comme en proie à un fétichisme obsessionnel. Même si le blason est loin de représenter le corps libre dans son ensemble, un détail corporel pourrait être emblématique du corps tout entier. Cependant, tandis que le blason célèbre le corps, le contre-blason est

une satire féroce. Paul Verlaine et Arthur Rimbaud, ont écrit un sonnet qui s’intitule « sonnet du trou du cul », sorte de pastiche des blasons Albert Mérat, comme par exemple « sonnet de la bouche ». Pour Mérat, le blason est utilisé de manière conventionnelle, afin de célébrer le corps. Son recueil idole comprend 16 sonnets dédiés chacun à une partie du corps, ce qui fait de son œuvre une ode au corps féminin dans son entièreté. Verlaine et Rimbaud ont écrit leur contre blason de manière à provoquer Mérat, avec qui ils ont eu un différend. En effet, les deux auteurs tournent en dérision son style, assez classique. Mais outre le fait d’humilier Mérat, ce sonnet est très provocateur vis-à-vis de la société. Rappelons que lors de la troisième république, tout comportement homosexuel, l’adultère ou la sodomie sont fermement réprouvés. Rimbaud et Verlaine ont donc pour but de choquer les mentalités bourgeoises et puritaines grâce à leur poème, novateur dans la forme, et volontairement grossier dans le contenu. Verlaine a écrit d’autre poèmes qui se veulent progressiste en dépeignant des scènes érotiques, comme par exemple « régals », où il fait l’éloge du corps féminin lors d’un rapport sexuel, lui valant un mépris total de la société de son époque.

        On retrouve cet avant-gardisme chez Baudelaire, dans son recueil Les fleurs du mal. Dés sa sortie, le livre scandalise la société conformiste et soucieuse de respectabilité, et certains de ses poèmes sont jugés comme un « outrage à la morale sociale et religieuse ». Des charges ont été retenues contre Baudelaire, et 6 de ses poèmes ont été censurés de l’œuvre, dont « les bijoux ». Baudelaire est à la fois hanté et émerveillé par le corps : il est l’incarnation du vice, mais lui permet aussi d’échapper au spleen et à l’ennui. Il aime le non-conformisme, le surprenant, mais ces poèmes, fait pour choquer son public puritain, ont souvent plusieurs portées. Son poème n’est pas seulement une évocation crue et pornographique : derrière ses images provocatrice, le dernier tercet des bijoux révèle une déception qui s’apparente au spleen, et qui nous montre un Baudelaire victime de mélancolie à cause de ce corps qu’il ne peut avoir.

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