Face aux similitudes et aux différences de ces deux mouvements, cette comparaison entre les gilets jaunes et les Sans-culottes est-elle pertinente ?

        “Les révolutions n’ont pas besoin de justification puisqu’elles sont les coups de foudre de la justice.” écrivait Victor Hugo dans les Misérables en 1862.

 En 2018, éclatant comme l’orage, la colère de millions de français et françaises, les poussent à sortir dans les rues pour manifester contre l’augmentation des prix des carburants. Tous unis par un symbole ; ils étaient les gilets jaunes. Ces évènements nous rappellent bien sûr d’autres figures emblématiques des révoltions comme les Sans-culottes. Les Sans culottes étaient le nom donné aux révolutionnaires issus des milieux les plus pauvres. Ils étaient les plus radicaux et souhaitaient donc obtenir une démocratie égalitaire coûte que coûte en 1789. Ainsi, la révolution française de 1789 a mené à un changement majeur et globale du système tandis que le mouvement des gilets jaunes apparaît alors comme une révolte. En effet, il faut bien différencier les deux.

Une révolution est un renversement brusque d’un régime politique par la force. Un changement brusque et violent dans la structure politique et sociale d'un État, qui se produit quand un groupe se révoltant contre les autorités en place, prend le pouvoir et réussit à le garder. Le mot révolution désigne aussi le fait de faire un tour complet représentant ainsi la fin d’un cycle.

 La révolte, ou rébellion, quant à elle,  est un sentiment d’indignation et de réprobation face à une situation. Elle est aussi, dans un sens plus précis, le refus actif d'obéir à une autorité. Elle correspond donc à une large gamme de comportements : non-respect des normes sociales, insoumissions, désobéissances, tentatives d’insurrection, mutineries, rébellions, tollés. Celui qui se soulève de cette façon est désigné comme rebelle.

Face aux  similitudes et aux différences de ces deux mouvements, cette comparaison entre les gilets jaunes et les Sans-culottes est-elle pertinente ?

La première partie sera consacrée à montrer qu’il est pertinent des les comparer car ces deux mouvements ont présenté des similitudes lors de leurs révolutions respectives. Le second mouvements exposera les limites de la pertinence de cette comparaison. Enfin, le dernier paragraphe sera dédié à discuter de l’utilisation de la comparaison dans un argumentaire politique.

        Tout d’abord, il peut-être pertinent de comparer les gilets-jaunes aux Sans-culottes car ces deux mouvements, malgré un écart temporel très important, ont abouti à des ressemblances flagrantes.

En effet, ils portent tout deux un vêtement spécifique comme symbole d’une dissociation avec les classes supérieures. D’un coté, les des pantalons à  rayure contrastant avec les bas, les fameuses «culottes» que portaient les bourgeois et nobles. Et de l’autre, le gilet fluorescent de sécurité routière. Ces deux vêtements représentent un symbole pour leurs mouvements mais aussi un signe de protestation sociale. Ainsi, cette dissociation des classes est la cause des violences, souvent inévitables des révolutions. Par exemple, dans une vision marxiste, les violences résultent de l’affrontement de deux classes : le prolétariat contre les élites. Cette violence révolutionnaire

est résumée dans la phrase de Marx « La violence est l’accoucheuse de toute vieille société qui en porte une nouvelle dans ses flancs». Pour les Sans-culottes, cette violence s’illustre par la Terreur notamment qui  aurait fait environ 40 000 morts. Et les violentes manifestations de 2018 qui ont ôté la vie à 11 personnes.

Ensuite, comparer ces mouvements peut sembler pertinent car ils résultent tous les deux d’un problème économique. Certes en 1789 sévissait une triple crise, mais la cause de la crise sociale et politique était la crise économique. Effectivement, on peut observer que les problèmes économiques sont une cause des révolutions et révoltes. Par exemple, en 1789, la crise économique ravageait la France : le prix du pain avait doublé, les récoltes de blé furent calamiteuses et l’industrie du textile menacée de s’écrouler, et le peu de finance restante est dilapidé dans le soutien apporté aux Américains lors de leur guerre d’indépendance. D’où le rapprochement avec les gilets jaunes qui eux se sont vus contraints de manifester contre une forte hausse du prix des carburants due à la TICPE. De plus, on peut aussi citer les rébellions dues au poujadisme de 1953 à 1958 ou encore avant ; les Jacqueries du Moyen-Age, ce qui nous montre bien que les problèmes économiques ont toujours été cause de révoltes.

Enfin, une révolution s’accompagne toujours de revendications. Et sur ce point, les gilets jaunes et sans culottes se rejoignent dans la mesure où tous deux souhaitent une démocratie directe. Les Sans-culottes étaient les plus radicaux dans leur revendication et lors de  leur arrivée à l’Assemblée Nationale, menés par Robespierre, il purent prendre les mesures nécessaires pour satisfaire leurs revendications. Ils mirent ainsi en place le droit à la subsistance en plafonnant le prix du pain par exemple. Cependant, contrairement aux Gilets-jaunes, les Sans-culotte ont pu accéder aux pouvoirs durant la terreur et se servirent de leur pouvoir pour mettre en place des mesures strictes et punitives. Par exemple, le tutoiement démocratique, jugé comme un affront pour les ex-nobles, ou la création du comité de surveillance qui a pour tâche de dénoncer les traîtres à la Révolution et de les juger (et exécuter ) dans les tribunaux révolutionnaires.

        Toutefois, comparaison n’est pas raison ! Si comparer les gilets jaunes et les Sans-culottes peut être pertinent, il ne faut pas omettre qu’il persiste de grandes limites à cette analogie.

        Tout d’abord, l’une des plus grandes limites qu’il y a lorsque que l’on compare ces deux mouvements est la violence. En effet, la violence de 1789 n’a rien de comparable avec celle de 2018. Certes 11 personnes sont mortes pendant les manifestations gilets jaunes mais il s’agissait d’’accidents. Les policiers français n’ont jamais reçu l’ordre de tirer dans la foule contrairement au 17 juillet 1791 lors du massacre du  Champs de Mars où la Garde Nationale a ouvert le feu sur des manifestants tuant une cinquantaine de personnes. De plus, la période qui suivie fut nommée la Terreur car la violence était partout. En effet, le Comité de Salut publique usa de la guillotine pour faire tomber les traites à la révolution. En parallèle, la violence s’étendit dans toute la France avec : les révoltes fédéralistes, insurrection vendéenne, guerre extérieure menée par les puissances monarchistes d'Europe. La leçon de l’histoire est claire : l’aspiration à une démocratie transparente, directe, débouche sur une dictature qui se retourne contre le peuple lui-même : 71 % des victimes de la Terreur appartiennent au tiers-état. Cette violence totale est donc une preuve que la révolution 1789 est d’une ampleur bien plus importante que les mouvements de révoltes des gilets jaunes.

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