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Commentaire Tarn Et Garonne Du 4 Avril 2014

Note de Recherches : Commentaire Tarn Et Garonne Du 4 Avril 2014. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  15 Avril 2015  •  9 446 Mots (38 Pages)  •  4 351 Vues

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Certaines décisions du Conseil d’Etat statuant au contentieux ont vocation à façonner le contentieux administratif ; l’arrêt du 4 avril 2014 rendu sur le pourvoi du département du Tarn-et-Garonne en constitue une parfaite illustration et son apport jurisprudentiel dépasse très largement la solution d’espèce rendue à l’occasion de son examen.

Le département du Tarn-et-Garonne avait engagé une procédure de passation d’un marché public aux fins de location de véhicules automobiles de fonction et avait finalement conclu celui-ci avec la société Sotral sous la forme d’un marché à bons de commande (article 77 du code des marchés publics).

M. François Bonhomme, alors conseiller général du Tarn-et-Garonne estimant ce contrat illégal, a sollicité du Tribunal administratif de Toulouse l’annulation de la délibération du 20 novembre 2006 par laquelle la commission permanente de ce conseil général avait autorisé son président à signer ce marché public (article L.3211‑2 du code général des collectivités territoriales). Ce faisant, il n’a fait qu’utiliser la voie de droit ouverte traditionnellement à l’encontre des actes détachables de la passation d’un contrat public (Conseil d’Etat, 4 août 1905, Martin, n° 14220, Rec. p. 749, obs. Hauriou S.1906.III.49, GAJA n° 15). Les premiers juges firent droit à ses conclusions et annulèrent pour excès de pouvoir cette délibération par un jugement du 20 juillet 2010 au motif que l’avis d’appel public à la concurrence était incomplet.

Le département interjette alors appel devant la Cour administrative d’appel de Bordeaux qui confirmera le jugement entrepris par un arrêt du 28 février 2012 (CAA Bordeaux, 28 février 2012, requête numéro 10BX02641, inédit au recueil) suivant ainsi la jurisprudence la plus classique du Conseil d’Etat quant aux recours ouverts aux tiers à l’encontre d’un contrat d’une collectivité territoriale.

Un pourvoi a alors été formé par cette collectivité à l’encontre de ce dernier arrêt. Son examen sera renvoyé à l’Assemblée du contentieux afin d’étudier l’opportunité du renversement de la solution, plus que centenaire, issue de l’arrêt Martin.

La formation la plus solennelle du Conseil d’Etat était interrogée sur le basculement du contentieux contractuel vers le plein contentieux lorsque celui-ci était initié par un tiers aux conventions suivant ainsi la voie initiée par la décision Société Tropic Travaux signalisation (Conseil d’Etat, Assemblée, 16 juillet 2007, requête numéro 291545, concl. D. Casas, rec. p. 360, obs. Ph. Cossalter DA n° 10‑2007 p. 35, GAJA n° 113, GACA n° 68) et prolongée envers le déféré préfectoral (Conseil d’Etat, 23 décembre 2011, Ministre de l’Intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales er de l’immigration, requête numéro 348647, rec. p. 662, obs. P. Delvolve RFDA 2012 p. 683). La cassation sera prononcée et, après rétention du litige (article L.821-2 du code de justice administrative), le jugement sera réformé et la demande de première instance rejetée.

Par ce « grand arrêt », le Conseil d’Etat modifie profondément les voies de droit ouvertes à l’encontre d’une convention et parachève la transformation du cadre dans lequel s’inscrit l’office du juge administratif du contrat.

Si l’ouverture prétorienne d’une nouvelle voie de droit par le truchement d’une décision d’Assemblée est fréquente devant la juridiction administrative (I.), on constatera également que la Haute juridiction provoque, par ce biais, une unification bienvenue des règles régissant le contentieux contractuel (II.)

I. L’ouverture prétorienne d’une voie de droit nouvelle à l’encontre du contrat

Le droit administratif étant un droit essentiellement prétorien, le Conseil d’Etat n’hésite pas à ouvrir l’exercice de voies de droit ou à modifier les conditions de recevabilité d’une requête par sa jurisprudence. A ce titre, il a admis la possibilité d’un « déféré en inexistence » (Conseil d’Etat, SSR., 28 février 1986, Commissaire de la République des Landes, requête numéro 62206, rec. p. 50, obs. J.‑M. Auby RDP 1986 p. 1468) ou d’exercer un recours aux fins d’homologation des transactions administratives (Conseil d’Etat, Assemblée, avis, 6 décembre 2002, Syndicat intercommunal des établissements du second cycle du second degré de l’Haÿ-les-Roses et Société CDI 2000, requête numéro 249153, concl. G. Le Chatelier Rec. p. 433, GACA n° 73).

C’est par ce biais qu’il avait précédemment admis l’ouverture du recours tendant à la contestation d’un contrat par les concurrents évincés (Conseil d’Etat, Assemblée, 16 juillet 2007, Société Tropic travaux signalisation, op. cit.) dont se posait ici la question de la systématisation aux recours intentés par des tiers qui ne revêtent pas cette qualité.

A. L’état du droit et les différentes solutions ouvertes

Historiquement, le recours pour excès de pouvoir avait été admis à l’encontre des décisions par lesquelles l’administration choisissait de contracter et des conventions qui en résultaient (Conseil d’Etat, 30 avril 1863, Ville de Boulogne, requête numéro 32994, concl. Robert, Rec. p. 404). Cependant, cette solution était antérieure à la loi du 5 avril 1884 qui a réorganisé les recours à l’encontre des délibérations et actes des « collectivités locales ». Il a été ensuite distingué entre les recours juridictionnels, ouverts aux parties et dirigés contre le contrat lui-même, et les recours administratifs offerts aux tiers tendant à la contestation des actes détachables adoptés par les collectivités locales qui étaient alors exercés dans le cadre de la tutelle sans que la jurisprudence « Ville de Boulogne » ne soit explicitement abandonnée.

Dans le cadre de l’ouverture du prétoire administratif, l’arrêt Martin (Conseil d’Etat, 4 août 1905, op. cit.), a écarté la possibilité d’obtenir l’annulation du contrat lui-même au profit d’une annulation ciblée sur les actes détachables, comme la décision de contracter elle-même, lorsque le recours était initié par les tiers. Cette solution prolongeait la distinction opérée antérieurement entre les recours de plein contentieux contractuel et ceux tirés du contrôle de la légalité.

Mais ce choix pouvait également se justifier par la concentration de l’excès de pouvoir vers les manifestations unilatérales de volonté ; les recours contre les actes contractuels étant normalement réservés aux parties. Avec l’arrêt Société Tropic travaux signalisation, il a été ouvert une voie nouvelle au profit des concurrents évincés

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