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Jurisprudence : source du droit ou autorité

Commentaire de texte : Jurisprudence : source du droit ou autorité. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  22 Octobre 2018  •  Commentaire de texte  •  2 685 Mots (11 Pages)  •  1 355 Vues

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TD Droit privé séance 3 : commentaire de la phrase de Carbonnier

« La jurisprudence n’est pas une véritable source du droit civil, comparable à la loi ou même à la coutume. Mais elle est une autorité, et une autorité considérable en droit civil. »

« Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi pourra être poursuivi comme couple de déni de justice. » (Code civil, art 4)

C’est dans ce contexte que née la jurisprudence, elle correspond à l’ensemble des décisions prononcées par les juridictions. En latin juris-dictio est l’étymologie de jurisprudence, autrement présenté, elle a pour rôle de dire le droit, la jurisprudence dit donc le droit. C’est la façon dont telle difficulté juridique a été tranchée par une juridiction. On dit que la jurisprudence doit combler les silences de la loi. (la jurisprudence a tendance à reproduire un jugement, pour ne pas remettre en cause un jugement similaire précédent.)

La loi est par définition la principale source du droit civil, et par ailleurs une règle de droit écrite, générale et impersonnelle, elle est votée par le Parlement au sens organique et formel. Et la loi est aussi d’origine étatique, dans une définition plus large car ici on inclut les règles de droit rédigées par le gouvernement, c’est-à-dire au sens matériel.

Quant à la coutume, c’est une source du droit non-écrite généralement mais qui peut l’être tout de même. Qui était au début une pratique, devenue aujourd’hui un usage répété, public, paisible (sans violence) avec une constance c’est-à-dire ce que l’on nomme l’élément matériel. Mais il faut nécessairement que les personnes intéressées la considèrent comme devant être obligatoirement suivi de peine, de sanction. Il doit alors y avoir un consensus au sein de la population. La coutume est alors source du droit quand elle acquiert un caractère contraignant, c’est ce que l’on nomme l’élément psychologique.

Notre objet d’étude est une citation de Carbonnier (Droit civil. Introduction, PUF, 2004, p273) « La jurisprudence n’est pas une véritable source du droit civil, comparable à la loi ou même à la coutume. Mais elle est une autorité, et une autorité considérable en droit civil. »

Carbonnier défendait l’idée que la jurisprudence n’était pas une source du droit, mais plus une autorité juridique.

Donc si la place de la jurisprudence n’est pas égale à celle de la loi ou de la coutume, elle est inférieure. On peut alors se demander en quoi la jurisprudence est une source mineure du droit civil ? Nous verrons premièrement l’infériorité de la jurisprudence et deuxièmement l’autorité de la jurisprudence sur les autres sources de droit civil.

I° L’infériorité de la jurisprudence

La jurisprudence est considérée comme une source du droit inférieure à la loi ou encore la coutume, car théoriquement la jurisprudence n’a aucune valeur normative car les juges ne peuvent pas créer des normes. La raison est que lorsqu’ils se prononcent dans une affaire : ils ne se prononcent que dans celle-ci. Art 5 du Code civil : « Ce que fait le juge ne se prononce que dans une affaire et que pour les deux parties. »

A) La loi supérieure à la jurisprudence

La loi est en soi, supérieure à la jurisprudence. Le juge n’est pas législateur, il ne peut créer de loi. Cela fut édictée par Art 5 Cciv. « il est défendu aux juges de prononcer par voix de dispositions générales et réglementaires sur les causes qui leurs sont soumises. » Il y a donc interdiction d’édicter des règles générales, texte conçu pour éviter le retour du pouvoir des juridictions de l’ancien régime qui s’étaient octroyées le pouvoir de légiférer en rendant des décisions générales ayant une force comparable à la loi. (théorie de séparation des pouvoirs législatifs, judiciaires et exécutifs). De plus, la décision de la jurisprudence pour un litige n’engage que les parties concernées au litige c’est l’effet inter partes, seules les deux parties d’un procès auront la sanction, seront notifiés de la décision. Les décisions de justice ne sont pas publiées de façons automatiques et officielles. Alors que les lois le sont.

Montesquieu s’exprimait alors sur le fait que le juge ne peut pas créer des règles générales, mais simplement répéter ce qu’a voulu la société et/ou l’autorité publique. Il n’est que la « bouche » des lois. Si on a un système comme en France, dominé par la loi, le juge est considéré comme un simple agent d’application, quasiment neutralisé dans l’activité de création des normes. C’est cela-même que Montesquieu évoquait.

La jurisprudence, reste subordonnée à la loi, dans une position de soumission qui l’empêche de devenir source et d’acquérir son autonomie. La loi est presque sacrée car elle est l’expression de la volonté générale, et sont inscrites et sanctionnées, c’est l’effet erga omnes. Enfin, la jurisprudence ne permet pas d’offrir la sécurité juridique attendue d’une source du droit. Les règles ont une organisation qui est dite lente. L’intervention des tribunaux au cas par cas, ils peuvent valablement résoudre un problème précis mais pas immédiatement offrir un ensemble de solutions cohérentes pour l’ensemble de la matière. Compte tenu de son mode de formation il est reproché à la jurisprudence de bâtir un droit fait de solutions juxtaposées, difficiles à articuler et inutilement compliquées. Carbonnier disait « immense gaspillage d’intelligence et de temps ». Un autre défaut de la jurisprudence est « Les revirements de jurisprudence » qui sont parfois plus difficiles à interpréter que la loi car leur formulation est souvent plus complexe. La description des faits et du droit est mêlée pour les juges du fond, il est difficile de déterminer la portée de la solution. Alors même que nous verrons que la loi fait parfois preuve de manque d’intelligibilité, si la jurisprudence a en plus ce défaut, sa place n’en sera que plus restreinte.

La coutume qui est la seconde source du droit à laquelle nous nous intéresserons, elle naît de la répétition d’éléments suivis de façon instinctive mais qui n’était pas obligatoire. C’est ce qui fait son originalité dans son mode de formation qui l’oppose à la loi, et pourtant elle devient, elle aussi une source du droit et devient en même temps supérieure à la jurisprudence.

B) La coutume supérieure à la jurisprudence

La supériorité de la coutume par rapport à la jurisprudence réside dans plusieurs principes. La coutume est une réponse à un besoin de la société, il n’y a donc aucun sentiment de contrainte pour que le peuple s’y conforme. Il y aussi l’idée de continuité, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de perturbations brutales, cela suit simplement l’évolution des besoins. Alors que pour la jurisprudence, il existe le problème de la justification des arrêts de règlement, beaucoup de critiques ont été soumises sur l’origine des décisions de justice rendues au nom du peuple français par des magistrats exerçant au nom de leurs compétences mais qui ne sont pas élus et donc n’expriment pas la volonté du peuple, il y a donc un décalage entre la volonté du peuple et la jurisprudence. De plus, des règles jurisprudentielles rétroactives sont apparues. Le juge ne peut se prononcer, ne peut faire naître une règle, que lorsqu’une affaire lui est soumise. Par fonction, il se prononce donc sur des faits qui se sont déjà déroulés. Donc la règle énoncée nécessairement rétroactive. Quand la règle est énoncée par la jurisprudence le citoyen ne peut pas adapter son comportement pour être en conformité. La rétroactivité est facteur d’insécurité juridique pour les justiciables… Par ailleurs la jurisprudence est seulement un éclairement aux règles normatives, ne pouvant pas en créer, ne se faisant pas législateur. L’effet de la jurisprudence reste alors intra partes, tandis que la coutume (le droit coutumier) s’applique à une génération, une population. Avant, l’usage prenait sa valeur de « source du droit » au bout de 30 ou 40 ans, tout une population s’y conformait (exception pour le droit Romain), l’application était beaucoup plus courte l’effet était erga omnes, le peuple n’avait pas de changement brutal, comme pour la jurisprudence. La coutume a tellement pris d’ampleur qu’elle peut empêcher une loi de s’appliquer à certaines situations. Dans le cas suivant par exemple : La cour de cassation rejette le pourvoi d’associations de défense d’animaux dans le cadre de Corridas car il est écrit dans un article du Code pénal (art 521-1) qui puni cette pratique, que s’il s’agit d’une coutume (le terme n’est pas employé mais c’est ainsi qu’il faut l’entendre) alors le moyen n’est pas fondé. Les coutumes peuvent alors empêcher la loi d’être appliquée (mais ne peuvent la réfuter). De plus la coutume est assortie d’une très grande force juridique. La pression sociale est parfois beaucoup plus efficace que la « crainte du gendarme », la jurisprudence est alors soumise à la coutume tout comme elle l’est à la loi.

Mais malgré le fait que la jurisprudence ne soit pas entièrement une source de droit, elle n’en reste pas moins importante et omniprésente dans le droit civil, alors devons-nous exclure totalement le fait qu’elle soit une source du droit sachant qu’elle intervient quand la loi, ou la coutume ne règlent pas un litige ?

II° La nécessité de la jurisprudence comme autorité du droit

La jurisprudence a tout de même une place importante même si elle n’est pas une des sources principales du droit, et selon Carbonnier une autorité. Le déclin de la loi, et l’évolution de la notion de jurisprudence amènent à penser à une place plus grande pour celle-ci au sein du système juridique.

A) Entre loi et jurisprudence

Il y a une crise de la loi. La loi, telle qu’elle fut conçue depuis 89, elle ne doit pas suffire à tous les problèmes de la société, le droit ne doit pas provenir uniquement de la loi. Beaucoup de critiques ont été émises à l’égard de la loi, tout d’abord remettant en cause sa qualité.

D’abord l’instabilité du droit. Elle n’énonce plus des principes durables, elle dépend des circonstances, la loi devient donc plus temporaire. Aujourd’hui il existe même des lois expérimentales. Elle devient une norme technique au lieu d’être une norme juridique. Pourtant elle n’est pas que mécanique, mais aussi morale. Les lois sont déterminées par ce que l’on peut mesurer. Elles sont le fruit d’une démarche pragmatique, se contentent de faire le constat de la réalité. Comme pour le cannabis. C’est la santé publique qui compte, mais certains veulent légaliser cette drogue sous prétexte que l’on n’arrive pas à stopper sa consommation, la loi étant porteuse de valeur, on peut donc la remettre en question sur ce point.

Comme précédemment évoqué, la loi devient de plus en plus complexe. Le conseil n’arrive pas à freiner cette complexité, si elle n’est pas accessible et intelligible, elle n’est alors normalement pas conforme à la constitution. Le droit échappe de plus en plus aux citoyens. Elle se voit être de plus en plus prescriptive, ne contient pas que du droit, le législateur remplit des lois avec des dispositions qui n’ont aucune valeur juridique. L’Interprétation devient alors indispensable, c’est donc la jurisprudence. C’est le « Supplément de législation » qui viendrait compléter l’arsenal législatif. Que ce soit la coutume, ou encore la jurisprudence, qui apparaît alors comme une source du droit. La place du juge a évolué. Aujourd’hui il peut créer des normes, mais c’est un pouvoir subordonné, il doit respecter la loi. Ces principes sont reconnus dans le Code civil Italien : « il reconnaît au juge de découvrir des principes. » C’est alors de la norme créée par le juge. En plus de créer des règles, il peut les étendre. Le juge a dégagé un devoir de loyauté qui est applicable à toutes les personnes concernées par l’entreprise, c’est le juge qui l’a décidé. Il peut donner une fonction normative à un texte qui ne l’ait pas. Il fait « revivre des textes juridiques disparus ou abolis » Les décisions du conseil deviennent erga omnes.

Si le juge censure une loi, elle disparaît de l’ordre juridique. Le conseil constitutionnel change l’ordre juridique pour annuler cette norme, il est alors capable de supprimer une loi, et d’en créer. Ce retour de la jurisprudence s’explique aussi par le fait que l’on estime que le juge est face aux difficultés concrètes de la vie, alors on va profiter de l’expérience du juge (influence du système Common Law). En Mai 2018 le président de chambre cour cassation déclare que la jurisprudence peut créer et/ou fixer des normes, la jurisprudence devient alors la concurrente de la loi.

La coutume, connut aussi un déclin qui (malgré qu’elle ait survécu et qu’elle persiste à régir certains principes) a laissé la place à l’évolution significative de la doctrine comme autorité.

B) Entre coutume et jurisprudence

La coutume connut un affaiblissement, voici les points qui ont contribué à celui-ci :

De manière générale la coutume est considérée comme trop imprécise et trop diverse. De plus, pendant le 19ème siècle, la France a condamné la coutume comme source du droit. Dans les articles suivants du code civil, on laisse quand même la coutume avoir une place importante :

Art 7 du Code civil (loi 21 mars 1804) = tout ce qui est régit par le Code civil, on l’applique. En revanche pour tout ce qui n’est pas prévu par le Code, on utilise le droit romain, la coutume…

Art 111-3 (ancien article 4) Code Pénal : il n’y a pas de crimes et/ou infractions sans loi, c’est le principe de non-rétroactivité. « Nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas prévu par la loi »

Alors pourquoi on autorise les juges à se servir de l’usage ?

L’usage, comme il n’est pas revêtu de la force obligatoire, c’est un complément subsidiaire à la loi. Ce n’est pas une concurrente de la loi (contrairement à la coutume). Le juge l’apprécie ou non en raison du contexte et/ou de la situation. On laisse une pleine amplitude d’interprétation et d’appréciation au bénéfice du juge. On a alors un déclin de la coutume, qui survit quand même mais laisse une grande place à l’évolution de la jurisprudence. Son évolution repose sur l’utilité de ses fonctions dans la conception du système juridique. L’interprétation c’est le fait que la loi existe mais que sa lettre ne suffise pas à trouver immédiatement la solution du litige. Le juge va devoir préciser le sens de la loi mais reste dans le cadre qu’elle prévoit (recherche et précise son sens). En plus de l’interprétation, l’adaptation est aussi recommandée ; certains tribunaux sont confrontés au vieillissement des textes que le législateur n’a pas mis à jour, la jurisprudence prend alors fonction de suppléance de la loi. Dans l’hypothèse où la jurisprudence doit régler une difficulté pour laquelle il n’existe pas de loi. Le juge doit trancher et invente donc la norme. La solution donnée correspond aux valeurs générales du système juridique. La jurisprudence est donc utile au système juridique, elle y incarne une certaine autorité. Mais la difficulté de savoir quelle intensité lui reconnaître entre une autorité et être une source de droit. Portalis admet une place à la jurisprudence. La notion de vide juridique n’existe pas, seulement un vide législatif.

Conclusion :

Pour terminer, on sait alors que la jurisprudence avait autre fois une place de consultation pour par exemple pour les jurisconsultes, qui étaient consultés en matière juridique, leur avis n’était pas une décision de justice. Ou encore que la jurisprudence laisse plus place à l’interprétation des sources normatives plutôt qu’à la création de normes. Mais, avec le temps, elle est non plus devenue une sorte d’autorité, mais certains peuvent la considérer comme une source du droit puisqu’elle doit créer, et en imaginer certains dans les cas où la loi, ou la coutume ne peuvent s’appliquer, ou ne répondent pas à un litige. De plus elle peut aujourd’hui, le juge peut censurer une loi et elle disparaîtra totalement du système juridique, il peut alors supprimer des normes et en créer (reconnue par certain système juridique, comme en Italie), malgré que son champ d’application reste souvent inter partes.

On peut alors la considérer comme une source du droit, mais elle restera inférieure à des sources telles que la loi ou la coutume car elle n’apparaît bien que trop souvent comme un supplément de législation qui tend à combler les vides juridiques que ces deux sources ne peuvent combler elles-mêmes.

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