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Littérature et danse

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Par   •  19 Novembre 2017  •  Cours  •  8 002 Mots (33 Pages)  •  996 Vues

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MENVIELLE                                                        M2 Poétiques et histoire littéraire

Emilie

Littérature et danse

La littérature et les arts ont établis très tôt des liens privilégiés, évoqués dans la formule d’Horace « Ut pictura poiesis ». Ainsi, depuis ses débuts, la création littéraire n’est pas un genre artistique isolé et indépendant mais elle renvoie à un dense réseau de correspondances avec différentes formes d’expression artistique (peinture, sculpture, photographie, cinéma, etc.). Aujourd’hui cette correspondance des arts ne cesse de s’intensifier.

Ce cours aborde les questions trans-sémiotiques et trans-artistiques qui sont aujourd’hui en plein essor. De cette manière, nous nous situons dans le champ des recherches sur l’intermédialité qui pourrait se définir comme l’étude des relations entre des objets relevant de médias considérés traditionnellement comme distincts. L’objectif est de sortir du cloisonnement artistique pour s’ouvrir à la question de la relation des arts en étudiant les interférences entre les textes littéraires et les domaines artistiques.

La danse tisse des liens directs avec les autres arts (musique, théâtre, opéra) et invite à l’exploration de différents dispositifs d’hybridation. Nous nous intéresserons exclusivement aux intersections transdisciplinaires récentes entre la littérature et la danse. Or, il peut paraître paradoxal de rapprocher ces deux arts puisqu’il semble que tout les oppose. En effet, il s’agit de deux modes sémiotiques distincts : la littérature est un art du langage verbal qui joue avec les mots alors que la danse est un art du corps, muet, visuel et musical, mais aussi un art de l’image, du mouvement et du rythme. Pourtant une multitude de rapports possibles existent entre la danse et la littérature.

Dès lors, comment appréhender et rendre compte de la danse à travers le prisme de la littérature et de l’écriture ? Quels rapports se tissent entre l’écrit et la danse, entre l’écrivain et le chorégraphe ? Pour répondre à ces questions, il s’agira de faire un panorama de la littérature française et francophone essentiellement du XIXe et xxe siècles à travers le dialogue avec la danse.

  • Les écrivains et l’art chorégraphique : perspective historique

Beaucoup d’écrivains se sont intéressés à la danse. Dès l’Antiquité nous notons la présence de pantomimes et de textes théoriques sur la danse. Lucien de Samosate, philosophe sophiste au iie après J-C écrivit un des premiers traités sur la danse, De saltatione, dans lequel il fait une apologie de la danse au sens large du terme (mime). Au xvie et xviie siècle, la danse devient un art important. C’est une discipline très sérieuse considérée comme un langage supérieur. En témoigne la comparaison assez courante du danseur avec l’orateur qui parle un langage muet dans lequel la gestuelle domine la parole.

Plusieurs raisons expliquent l’intérêt de la danse pour tant d’auteurs :

  • Une admiration très sincère pour cet art
  • Une sorte de défi littéraire : mettre en mots un art très difficile à évoquer
  • Permet de mieux dire certaines choses (côté indicible de l’art)
  • Un idéal poétique tel le vide ou le silence (nous renvoyons aux conceptions de Mallarmé et de Baudelaire)
  • Permet d’introduire un spectacle : textes de commande (notamment Valéry et Cocteau)
  • Un aspect financier (Mallarmé devait gagner sa vie en tant que critique de danse et de théâtre)
  • Une fascination pour la beauté, en particulier pour la beauté féminine : regard d’homme sur un corps de femme. Il y a une dimension érotique voire sexuelle des textes sur la danse

Ainsi Ronsard, librettiste et admirateur de ballet, s’intéresse à la danse. En liant la poésie à la danse, il évoque la danse dans des sonnets lyriques et solennels célébrant Hélène, l’éternel féminin. Par les différents procédés poétiques et métriques, l’auteur propose ici une sorte de correspondance avec les mouvements incessants de la danse. Les mots et les rythmes imitent l’image du vertige voluptueux créé par l’emportement d’une danse. La personnification du ballet et l’énumération des verbes de mouvements réfléchis et à l’infinitif « rompre, se refaire », « se mesler, s’écarter, se tourner » contribuent à définir un spectacle collectif sans fin, renforcé par la comparaison avec le fleuve. Le jeu des assonances en [r], [s] et [t] et des allitérations en [ou], l’usage du préfixe -re, ainsi que la fréquence de la syllabe « tour » crée un rythme musical et rappelle le glissement aérien et fluide des pas et des tours de la danse. Le rythme ternaire et les anaphores en « ores » évoquent le rythme du ballet en introduisant des figures géométriques sur lesquelles repose la danse horizontale de cour. Ronsard met en valeur la signification symbolique de la danse en évoquant sa puissance par l’harmonie de l’univers céleste. Par la danse, la femme aimée se métamorphose au cours du ballet. Elle est idéalisée, comparée à un oiseau, à une déesse : « divine créature ». C’est sa maîtrise de la danse qui lui donne sa supériorité, alors que le poète impuissant est obligé de se taire.

  • Typologie des rapports entre danse et littérature. Analyse d’exemples

L’intitulé du cours « Littérature et danse » laisse ouverte la question de la relation entre danse et littérature. La simple conjonction de coordination « et » dissimule une multitude de rapports possibles entre les deux domaines artistiques. Nous avons distingué trois types de relations, jouant ainsi avec le changement de prépositions :

  • Écrire sur la danse : Alors que beaucoup de critiques évoquent régulièrement l’impossibilité de transmettre par les mots ce que la danse fait à ceux qui la regardent, il s’agit ici de parler, c’est-à-dire de mettre en mots une prestation chorégraphique réelle. Il faudra alors trouver un équivalent entre le mouvement dansé et corporel et le langage verbal en ayant une véritable distance critique et théorique avec cet objet artistique qu’est la danse. On aura affaire à des commentaires, des analyses, des essais théoriques et des critiques de spectacles véritables qui rendent compte et décrivent ce que l’on voit. On peut également intégrer les portraits de danseurs (Colette, Cocteau) et les préfaces. Au xixe siècle, il y eut beaucoup de textes de critiques d’art dans le domaine de la danse, le plus connu étant Théophile Gautier.
  • Écrire la danse : Il s’agit d’aborder la danse dans une dimension narrative et de la concevoir comme un sujet de représentation et d’invention littéraires. En effet, l’écrivain va incorporer la danse à travers des formes multiples dans l’espace clos de nombreux textes fictifs (prose ou poésie) : des scènes dansées, des bals ou des personnages qui dansent en tant qu’éléments poétiques ou narratifs. Il n’y a pas de danse réelle.
  • Écrire pour la danse : La danse est dominée par une tradition littéraire qui a fourni de nombreux sujets de danse, notamment les ballets. Cela équivaut à de la « littérature dansée » : la littérature se met au service de la danse. En effet, certains écrivains fournissent une trame narrative à des chorégraphes destinée à être transposée en spectacle sur la scène chorégraphique. Ce texte technique qui précède la chorégraphie, a pour fonction d’orienter et de coordonner les interventions des différents créateurs de l’œuvre (musicien, décorateur, chorégraphe, etc.). Ce document sera donc le support, l’argument d’une intrigue de ballet. On appelle cela un livret. Il s’agit alors de réfléchir sur la transposition dansée d’œuvres littéraires et le passage d’un code littéraire à un code chorégraphique dans les réalisations scéniques : comment un texte se transforme-t-il en spectacle dansé ? Les mots doivent être traduits par des corps et des mouvements dansés mais aussi par des décors et des costumes. Ce rapport entre la danse et la littérature est proche du modèle de la pantomime ou de la représentation théâtrale, si ce n’est qu’on n’entend pas le texte sur scène. Les livrets sont parfois distribués aux spectateurs avant la représentation scénique afin qu’ils comprennent l’histoire.

Exemple : Don Quichotte, Manon Lescaut, Roméo et Juliette, Cendrillon, Barbe Bleue, L’après-midi d’un faune, May Be, Alice au pays des merveilles ou encore Giselle.

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