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La force des procédés comiques à l’intérieur de la pièce Le bourgeois gentilhomme de Molière

Dissertation : La force des procédés comiques à l’intérieur de la pièce Le bourgeois gentilhomme de Molière. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  15 Octobre 2017  •  Dissertation  •  3 726 Mots (15 Pages)  •  5 137 Vues

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FAIRE RIRE POUR CRITIQUER :

La force des procédés comiques à l’intérieur de la pièce

Le bourgeois gentilhomme de Molière

Jean-Baptiste Poqulin, mieux connu sous le nom de Molière, est le dramaturge ayant inventé le genre de la comédie-ballet, alliant la musique et la danse à certaines de ses pièces. Il est intéressant de voir que pour la première fois, ce genre mettait en scène des personnages de la vie ordinaire. Dans la pièce Le bourgeois gentilhomme , l’utilisation du comique permet de critiquer la société française, plus précisément la bourgeoisie parisienne qui, par le personnage de Monsieur Jourdain, devient la risée de tous. Cependant, par quels procédés comiques Molière se permet-il de ridiculiser et donc, de critiquer la bourgeoisie française du XVIIe siècle ? Dans le cadre de cette analyse, il s’agira de voir comment les différents procédés comiques employés par Molière permettent la critique de Monsieur Jourdain et de son statut, représentant fictionnel de la bourgeoisie. Nous observerons et repérerons les différents éléments rattachés au comique de mots, au comique de situation, ainsi qu’au comique de caractère.

La première partie de ce travail consistera donc à démontrer de quelle façon le comique de mots ridiculise Monsieur Jourdain. Pour ce faire, il s’avère essentiel de définir les éléments de base de ce procédé comique. Selon Louis Hébert, spécialiste en sémiotique et professeur à l’Université du Québec à Rimouski, le comique de mot est « [la production d’un effet amusant] par les paroles d’une personne [soit] le choix des mots, du niveau de langue [ou encore par l’utilisation de] répétitions . » Ainsi, ce procédé tire sa force humoristique à l’intérieur même du langage, de l’élocution ou des tournures stylistiques.

Dans sa comédie-ballet, Molière emploie le comique de mots à plusieurs reprises et sous plusieurs formes, permettant ainsi de faire paraître le personnage de Monsieur Jourdain dans une posture qui ne lui convient pas. Tout d’abord, nous pouvons remarquer, à l’intérieur de quelques scènes, le langage mutilé, c’est-à-dire un langage quelque peu déformé qui vient fortement contraster avec la dignité dont devrait pourtant faire preuve le protagoniste. Dans la quatrième scène de l’acte deux, lorsque Monsieur Jourdain discute avec le Maître de Philosophie, ce dernier se met à enseigner les voyelles au bourgeois. Il explique à Monsieur Jourdain comment prononcer chaque voyelle, par quels mouvements buccaux il faut s’y prendre et quels sons ces mouvements sont censés produire :

MONSIEUR JOURDAIN : A, E, A, E. Ma foi ! oui. Ah ! que cela beau !

MAITRE DE PHILOSOPHIE : Et la voix I [se produit] en rapprochant encore davantage les mâchoires l’une de l’autre, et écartant les deux coins de la bouche vers les oreilles : A, E, I.

MONSIEUR JOURDAIN : A, E, I, I, I, I. Cela est vrai. Vive la science ! (BG : 69)

Nous constatons que le Maître de Philosophie infantilise le protagoniste en lui décrivant étape par étape comment prononcer chacune des voyelles de l’alphabet, rappelant ainsi un enfant qui apprend à parler. Cette situation contraste fortement avec l’âge et le titre de Monsieur Jourdain, et semble alors l’inférioriser. De plus, le bourgeois, par ses nombreuses exclamations, semble être ébahi par ces découvertes qui n’en sont pas une, puisqu’il a nécessairement prononcé des voyelles auparavant. Comme le mentionne Charles Mazouer dans l’ouvrage Trois comédies de Molière : « C’est d’abord à travers les vœux du Bourgeois, à travers tous les maîtres et tous les artistes dont il veut s’entourer que Molière nous donne une idée de la vie noble et nous fait connaître un peu de son éducation, de ses valeurs, de son genre de vie . » Il est cependant facile de constater la mésadaptation de Monsieur Jourdain à tous ces nouveaux domaines et ses nouvelles connaissances, entre autres par la scène mentionnée précédemment, celle des voyelles et des sons, intimement liée au comique de mots. D’ailleurs, une autre scène emploie ce même procédé, soit la scène quatre du quatrième acte, alors que Covielle traduit à Monsieur Jourdain ce que Cléonte, déguisé en Turc, raconte en un langage incompréhensible :

MONSIEUR JOURDAIN : Son Altesse Turque m’honore trop, et je lui souhaite toutes sortes de prospérités.

COVIELLE : Ossa binamen sadoc babally oracaf ouram.

CLÉONTE : Bel-men.

COVIELLE : Il dit que vous alliez vite avec lui vous préparer pour la cérémonie, afin de voir ensuite votre fille, et de conclure le mariage.

MONSIEUR JOURDAIN : Tant de choses en deux mots ?

COVIELLE : Oui, la langue turque est comme cela, elle dit beaucoup en peu de paroles. (BG : 185-186)

La suite illogique de syllabes utilisée par Covielle et Cléonte embrouille totalement le personnage principal qui ne se doute de rien et croit à la situation. Ces phrases incompréhensibles ont ainsi une double fonction : faire rire les spectateurs conscients de la supercherie et prouver la naïveté et le manque de connaissances de Monsieur Jourdain. Il est tout de même intéressant de s’attarder à l’interrogation du protagoniste qui semble surpris et perplexe envers l’une des traductions de Covielle. Nous pourrions croire à une élucidation, mais nous constatons rapidement le contraire, puisque la simple réplique improvisée de Covielle suffit à convaincre le bourgeois. Cette situation vient donc ajouter à la naïveté de ce dernier, et ainsi, le ridiculise davantage. À noter que cette scène est très intéressante à différents niveaux comiques. C’est pourquoi nous y reviendrons un peu plus loin.

Les répétitions jouent elles aussi un rôle majeur dans l’univers humoristique de Molière et Le bourgeois gentilhomme ne fait pas exception. À la troisième scène de l’acte deux, tous les maîtres demandés par Monsieur Jourdain se mettent à s’insulter mutuellement. Le protagoniste, prisonnier au cœur de cette bagarre de mots, essaie de prendre le contrôle de la situation à l’aide d’une répétition :

MAÎTRE D’ARMES : La peste l’animal !

MONSIEUR JOURDAIN : Messieurs.

MAÎTRE DE PHILOSOPHIE : Impudents !

MONSIEUR JOURDAIN :

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