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Le souci du corps

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Par   •  28 Avril 2022  •  Chronologie  •  3 337 Mots (14 Pages)  •  221 Vues

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Le souci du corps

Serions-nous tous les enfants de Narcisse, épris de notre propre image ?

Toujours est-il que le corps est devenu une préoccupation centrale dans nos sociétés occidentales.

Depuis les années 1960 où fut proclamée sa "libération", il est l'objet d'attentions multiples.

Des secteurs entiers de l'économie se mobilisent pour lui.

On l'habille et on le décore aussi de plus en plus à sa guise.

Exposez et argumentez vos idées à partir de ces affirmations

        Au regard des fortes valeurs d’individualité et de responsabilité personnelle dans l’épanouissement de soi portées par nos sociétés occidentales, nous sommes en mesure de questionner si ce retour du sujet vers lui-même le rend, à l’instar du mythe de Narcisse, captif de l’intérêt qu’il porte à son image de lui-même. En effet, la culture occidentale offre un cadre propice au souci du corps, qui, observé de près et sous divers angles depuis les années 60 avec l’annonce de sa « libération », s’est vu recevoir l’attention de domaines d’activités de grande ampleur afin de le vêtir et de le parer selon le goût de chacun.

        Dans un premier temps, nous aborderons la notion d’ « être soi ». Pour cela, nous emprunterons, d’abord, le concept d’image du corps, développée par le psychanalyste Jacques Lacan, avec la théorie du stade du miroir, puis, nous exposerons la manière dont se constitue l’identité sociale d’un individu.

        Dans un second temps, nous articulerons les notions de corps réel et de corps imaginaire. En ce sens, nous nous appuierons, premièrement, sur la question de la confrontation des individus aux images véhiculées par les différents médias, et, deuxièmement, sur la maîtrise des corps.

        Afin d’alimenter la réflexion autour de la notion d’ « être soi », nous partirons de la présentation du concept Lacanien de l’image du corps.

        Selon Jacques Lacan, l’image du corps d’un individu se constitue à la suite du stade du miroir. Selon sa théorisation, le stade du miroir est une étape du développement psychique du nourrisson qui, confronté à sa vision dans un miroir, comprend que l’image qu’il voit dans son reflet est la sienne. A l’issue du stade du miroir, le bébé perçoit dans la glace son image comme étant unifiée et impressionnante, alors qu’il en est lui-même, dans son corps, à une étape de son développement précoce dans laquelle il se vit comme morcelé et dégradé du fait d’un schéma corporel encore non-abouti et de sa grande dépendance à l’autre. Cette constatation amène le bébé à éprouver une insatisfaction vis-à-vis de sa condition comparativement à ce que lui renvoie le miroir. Cette insatisfaction se résout par un collage du nourrisson à cette image qu’il prend alors pour lui-même. Cette aliénation dans l’image reflétée par le miroir confère, selon la théorie Lacanienne, l’entrée de l’individu dans le monde symbolique et imaginaire (« imaginaire » est à entendre ici comme étant relatif aux images et non à l’imagination), et donc à l’entrée dans le langage. En effet, à l’instar de notre image du corps, les mots qui composent notre langage ne sont qu’imaginaires et symboliques. Cela signifie que, de la même manière que nous n’avons jamais un accès direct à ce qui est désigné par les mots, nous n’avons pas un accès direct au réel de notre corps que nous n’appréhendons qu’à travers le prisme du symbole, permettant la mise en sens, c’est-à-dire à travers notre propre image.

        Les individus évoluant dans nos sociétés occidentales modernes sont constamment renvoyés à leur image, et, comme nous l’avons vu à travers le concept d’image du corps de Lacan, notre image nous la prenons pour nous. Il est donc d’autant plus important pour nous que notre image nous corresponde.

Avec les nouvelles technologies nous ne pouvons échapper à notre image. Qu’elle soit capturée de manière spontanée, comme cela se fait par exemple pour des photos de vacances ou au cours d’une activité quelconque, ou bien qu’elle soit prise de façon préparée, comme lorsque les personnes s’apprêtent en vue d’une photo sur laquelle ils prendront la pose. En conséquence, peuvent survenir des comportements nouveaux avec des tentatives de performer au mieux l’immortalisation de l’image de son corps au détriment de l’appréciation du moment présent.

Par ailleurs, depuis la proclamation de la « libération » des corps dans les années 60, s’est opéré un pernicieux paradoxe dans nos sociétés. En effet, nous avons l’injonction de montrer notre corps, mais, nous sommes sanctionnés s’il ne correspond pas aux normes de beautés. Ainsi, nous nous retrouvons à scruter nous-même nos imperfections corporelles, que nous tentons vainement de masquer. Par ailleurs lorsque nous ne sommes pas dans une chasse aux imperfections, nous tentons tout de même d’effectuer des travaux d’amélioration sur notre corps. Pour ce faire, tantôt nous usons d’attributs externes venant recouvrir nos corps, tels les vêtements et accessoires qui correspondent le plus à nos goûts et nous semblent valoriser nos corps, tantôt nous effectuons des modifications directement sur le corps, allant de transformations ponctuelles comme les teintures de cheveux, l’application de vernis à ongle ou de maquillage, jusqu’à des changements plus définitif tels que tatouages ou actes chirurgicaux.

        Dans le but de poursuivre notre élaboration autour du concept d’« être soi », nous allons présenter les éléments constituant l’identité sociale de l’individu.

Il est important de noter que l’appréciation de son image corporelle, quelle qu’elle soit, est toujours liée au psychisme de l’individu. C’est-à-dire qu’au cours de sa vie, de sa construction et de ses expériences, une même personne peut être amenée à avoir des moments de forte préoccupation corporelle, comme à d’autres moments de son existence se sentir apaisée vis-à-vis de cette question. Etant donné que nos sociétés occidentales contemporaines ont une forte tendance à mettre l’accent sur le paraitre, nos failles narcissiques ont plus de chances de se fixer sur ces questions-là.

Notre identité sociale se construit par nos expériences interactives avec notre environnement familial et amical, lui-même pris dans un ensemble de règles et de valeurs, implicites et explicites, qui constituent la société. Ainsi, nous nous construisons en fonction de là où nous sommes assignés par autrui, cela peut concerner notre estime de soi (si nous évoluons dans un environnement bienveillant ou malveillant), notre genre, notre race (au sens du terme permettant d’expliciter des rapports sociaux, non pas au sens d’espèce), notre classe sociale, notre appartenance à un groupe religieux, et un ensemble d’autres aspects. Nous faisons toujours l’objet d’assignations diverses, qui peuvent se contredire, et nous nous construisons tout au long de notre vie en fonction de l’interaction de notre psychisme avec l’altérité d’autrui. Par conséquent, il est à noter que, dans nos sociétés occidentales, certaines catégories d’identités sociales font l’objet d’une attention plus prégnante portée sur leur corps, n’excluant pas la possibilité pour des individus qui ne correspondent pas à ces catégories de pouvoir éprouver envers eux-mêmes de fortes préoccupations corporelles. Ainsi, un accent particulier est porté sur le corps, entre autres, des individus perçus comme « femmes », comme ayant une expression de genre peu aisée à identifier dans une catégorie hommes/femmes, comme racialisé (c’est-à-dire qu’on ne perçoit pas comme étant caucasien), comme handicapés, comme malade ou encore comme obèse. En effet, les corps étant perçus comme appartenant à ces catégories sont plus facilement victime des stigmates dispensés par les « normes » implicites que définit notre société en nous présentant toujours les mêmes types de beauté hégémoniques.

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