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Vie chronologie et fin de la démocratie...lettre écrite de la montagne de rousseau

Commentaire de texte : Vie chronologie et fin de la démocratie...lettre écrite de la montagne de rousseau. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  7 Octobre 2022  •  Commentaire de texte  •  2 526 Mots (11 Pages)  •  215 Vues

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“ D’abord la puissance législative et la puissance exécutive qui constituent la souveraineté n’en sont pas distinctes. Le Peuple Souverain veut par lui-même, et par lui même il fait ce qu’il veut. Bientôt l’incommodité de ce concours de tous à toute chose force le Peuple Souverain de charger quelques uns de ses membres d’exécuter ses volontés. Ces officiers, après avoir rempli leur commission en rendent compte, et rentrent dans la commune égalité. Peu à peu ces commissions deviennent fréquentes, enfin permanentes. Insensiblement il se forme un corps qui agit toujours. Un corps qui agit toujours ne peut pas rendre compte de chaque acte: il ne rend plus compte que des principaux; bientôt il vient à bout de n’en rendre aucun. Plus la puissance qui agit est active plus elle énerve (1) la puissance qui veut. La volonté d’hier est censée être aussi celle d’aujourd’hui; au lieu que l’acte d’hier ne dispense pas d’agir aujourd’hui. Enfin l’inaction de la puissance qui veut la soumet à la puissance qui exécute; celle-ci rend peu à peu ses actions indépendantes, bientôt ses volontés; au lieu d’agir pour la puissance qui veut, elle agit sur elle. Il ne reste alors dans l’Etat qu’une puissance agissante, c’est l’exécutive. La puissance exécutive n’est que la force, et où règne la seule force l’Etat est dissout. Voilà, Monsieur, comment périssent à la fin tous les Etats démocratiques.”

ROUSSEAU, Lettres écrites de la montagne, lettre sept.

L’idéal démocratique s’impose tellement à nous que nous en oublions le sens et les fondements; nous n’en voyons pas plus les aspects problématiques. Suite aux polémiques liés à la publication du Contrat Social, Rousseau dans les Lettres écrites de la montagne, en précise le sens dans une orientation bien peu optimiste; les Etats démocratiques semblent périr selon un enchaînement absolument nécessaire. Il s’agit donc de la vie et de la mort des démocraties selon un progrès, à la fois temporel et logique: les étapes du texte suivent, à la lettre, une chrono-logie. Partant de l’unité de l’exécutif et du législatif dans les mains du peuple, Rousseau nous montre“bientôt”le chemin qui mène à la délégation de la fonction d’exécution à des “Officiers” chargés de “commissions” qui impliquent l’exigence de comptes-rendus , d’abord fréquents, puis espacés dans le temps. Pourquoi une telle délégation? Quel est, ici, le problème? Dés lors, deuxième étape, la séparation des pouvoirs, exécutif et législatif, conduit, en raison de la nécessité urgente d’agir, à la domination de l’exécutif. Enfin , troisième étape, l’indépendance de l’exécutif se construit sur la disparition de la volonté, et donc le règne de la force. La conclusion s’impose alors, non seulement la démocratie a disparue, mais il n’y a plus même d’Etat du tout. Au centre de cette évolution nécessaire, il y a la séparation de la volonté et de la force physique: un dualisme politique qui conduit à la domination de l’acte de force sur la maîtrise de la volonté; deux pouvoirs essentiels, nécessairement unis comme l’âme et le corps, et pourtant qui conduisent à la domination de la force musculaire dans la vie concrète dés qu’il y a séparation et représentation délégataire du pouvoir de la loi; s’agit -t-il d’une contradiction sans solution, d’une fatalité du malheur politique ou bien y a-t-il d’autres résolutions de la contradiction; voire, n’est-ce pas le dualisme du vouloir et de l’agir qui est l’erreur de perspective?

S’adressant à son interlocuteur, Rousseau dit bien qu’il s’agit d’une démocratie, d’ailleurs les deux premières phrases du texte définissent bien la souveraineté populaire que toutes les démocraties mettent à l’origine de leur existence. Le souverain ce n’est pas un homme, un monarque ou un groupe d’homme, des oligarques ou des aristocrates, mais c’est la totalité du peuple assemblé sur la place publique qui selon le modèle de l’agora athénienne ou encore de l’assemblée générale insurrectionnelle, décide de son avenir. Mais, qu’est-ce qu’une souveraineté? C’est une volonté universelle s’exprimant à destination de tout le peuple, ce n’est pas une décision d’intérêt particulier concernant des individus particuliers, bref, c’est une loi, expression de la volonté générale. Dés lors le premier pouvoir fondateur de l’existence civile, c’est le pouvoir législatif que Rousseau appelle “puissance” sans doute pour montrer que ce n’est pas qu’une affaire de force mais bien une dynamique morale et rationnelle, constituante ou instituante d’un artifice échappant à la physique des rapports de force. Seulement, la souveraineté du peuple ne peut pas ainsi être désincarnée, elle doit prendre corps, elle doit s’exercer, soit comme application particulière dans des jugements concernant des actes effectifs particuliers, soit s’exécuter dans la gestion du quotidien. Il n’y a pas de pouvoir souverain sans justice et police et c’est cela que Rousseau rassemble dans le pouvoir ou “la puissance exécutive”. Bref, il faut d’abord vouloir et après faire. Et comme on ne saurait fonder l’existence civile sur la soumission, il s’agit d’autonomie, de loi qu‘on décide par soi-même et où on obéît qu’à soi-même; bref, s’il y a démocratie et non seulement Etat de droit avec différentes formes de gouvernement, c’est que le peuple non seulement fait la loi mais l’applique et l’exécute. Chez Rousseau la démocratie n’est pas un type d’Etat, mais de gouvernement. Tel est bien son problème.

En effet, l’auteur constate une “incommodité de ce concours de tous à toutes choses”. Gouverner, c’est s’occuper des affaires dans le singulier et au quotidien ce n’est pas seulement comme pour faire une loi se réunir de temps à autre, mais se réunir tous les jours ou presque. Or, un peuple ce sont aussi des hommes concrets qui doivent manger, se loger etc... Pour cela il faut travailler, échanger. La vie privée nous occupe. Nos affaires, l’économique étend son règne sur le quotidien, il s’agit bien de ce qu’on peut appeler les commodités qui font apparaître le concours permanent à la politique incommode. D’où, la tendance à se décharger des affaires publiques trop banales et donc de déléguer ce fardeau à quelques uns. Mais, attention Rousseau ne parle pas ici d’élire des représentants. Le pouvoir politique est une question de liberté et d’autonomie et cela nécessite une présence, point de représentants

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