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Explication du texte, La conscience est durée de Bergson

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Par   •  1 Novembre 2016  •  Commentaire de texte  •  3 695 Mots (15 Pages)  •  1 925 Vues

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La conscience est durée

BERGSON

L ’énergie spirituelle

Dans un extrait de  L'énergie spirituelle, Henri Bergson aborde le thème de la

conscience. Le problème qui se pose à lui est  de saisir la réalité de la vie psychique

sans la dénaturer : l’intelligence est-elle en mesure d’appréhender le réel dans ce qu’il

a  de  singulier ;  définir  une  réalité  vécue,  n'est-ce  pas  la  réduire  à  une  généralité

abstraite ?  C'est  pourquoi,  plutôt  que  d'en  proposer  une  définition  générale,  la

démarche  de  Bergson  consiste  à  s'installer  dans  l'expérience  vécue,  pour  retrouver

l’intuition  que  nous  avons  de  nous-même.  Cette  approche  descriptive  et  non

analytique, cherchant à coller au plus près du réel, permet à l'auteur de défendre la

thèse  que  la  conscience  se  caractérise  par  la  « durée ».  L'expérience  que  nous

avons de nous-même n'est pas une juxtaposition discontinue d'instants, elle a une

continuité, une « épaisseur de durée »,  en raison du travail de liaison qu'opère la

conscience avec le passé et l'avenir.

Bergson organise son argumentation en quatre mouvements. La première partie,

jusqu'à la ligne cinq (« apparent ») pointe les limites d'une approche intellectualiste

qui proposerait une définition abstraite de la conscience. La seconde partie, jusqu'à la

ligne  douze,  et  la  troisième,  qui  se  clôt  ligne  dix -huit,  décrivent  successivement  la

conscience  comme  rétention  du  passé  et  ouverture  sur  l'avenir.  Ce  qui  permet  à

l'auteur, dans le dernier  mouvement, de  poser une  équivalence  entre  conscience  et

durée :  le  temps  de  la  conscience  n'est  pas  une  juxtaposition  d'instants,  il  est

continu.

Alors  que  Bergson  se  propose  de  répondre  à  la  question  « qu’est-ce  que  la

conscience ? »,  contre  toute  attente,  il  élude  toute  tentative  d’en  proposer  une

définition,  préférant  chercher  à  la  « caractériser ».  Derrière  cette  opposition  de  la

ligne  quatre,  entre  définir  et  caractériser,  se  joue  une  distinction  qui  travaille  toute

l’œuvre  bergsonienne,  entre  intelligence  et  intuition.  Par  utilité  pratique,  pour  les

besoins  de  l’action,  l’homme  est  conduit  à  classer  le  réel  en  rubriques ;  c’est

l’intelligence  qui  opère  cette  classification  de  la  diversité  concrète  suivant  des

catégories  générales,  induisant  un  rapport  abstrait  avec  le  réel.  Chez  Bergson,

l’intuition désigne au contraire le rapport immédiat que nous avons avec le monde.

Le  réel  a  pour  caractéristique  d’être  multiple  et  mouvant.  Or,  définir  une

réalité  singulière,  ce  n’est  pas  la  caractériser  dans  ce  qu’elle  a  de  spécifique  et

d’original, c’est la ramener à une essence générale : aux caractéristiques essentielles

qu’elle a en commun avec les autres réalités appartenant à la même classe d’objets.

Définir  la  conscience,  ce  serait  donc  la  ramener  à  une  signification  générale ;

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l’exercice  de  définition  correspond  au  rapport  abstrait  que  l’ intelligence  entretient

avec  le  réel :  la  pensée  analytique,  en  envisageant  une  réalité  concrète  suivant  son

appartenance à un genre, est ainsi incapable de la ressaisir pour elle-même.

Ce refus de définir la conscience renvoie à la critique du langage que Bergson

a exposée dans un ouvrage antérieur :  Le Rire. Dans ce dernier, le philosophe défend

la thèse que  nous voyons le monde à travers le voile des mots :  le langage  nous

masque l’accès non seulement à la réalité physique  transcendante, hors de nous,

mais à notre propre réalité psychique immanente,  il nous rend étranger à notre

propre vie intérieure. Pour montrer que le langage appauvrit le réel, parce qu’il en

ramène  la multiplicité foisonnante à un nom unique et parce qu’il en fige les nuances

dans une catégorie tranchée, Bergson donne l’exemple du mot « amour ». A des fins

pratiques,  pour  exprimer  ce  sentiment  de  notre  vie  psychique  à  la  personne  pour

laquelle nous l’éprouvons, nous sommes amenés à le nommer ; mais pour que le mot

soit  compréhensible à  autrui, il ne  retient  d’expériences  singulières  que  ce  qu’elles

ont  en  commun :  ainsi  pensons-nous  sous  le  même  nom  commun  « amour »  des

expériences amoureuses singulières et diverses et figeons nous dans une signification

stable, un sentiment qui a des nuances, qui évolue au cours du temps.

C’est  donc  parce  que  le  langage  réduit  la  diversité  changeante  du  réel  à

une signification générale appauvrie que Bergson refuse de définir la conscience ;

la signification générale du mot « conscience » serait incapable de rendre compte de

l’expérience immédiate, vécue, que nous avons de nous-même.

On  pourrait  objecter  à  Bergson  que  sa  critique  du  langage  se  détruit  d’ellemême,  en  ceci  qu’il  le  critique  en  l’utilisant :  elle  est  elle-même  formulée  par  des

mots.  Mais  Bergson  n’a  pas  la  naïveté  de  nous  inciter  à  renoncer  au  langage :  il

s’efforce  seulement  de  l’utiliser  autrement.  C’est  là  tout  le  sens  de  la  distinction

opérée ligne quatre entre définir  et caractériser : il ne faut pas partir du langage mais

du  réel,  ne  pas  réduire  la  multiplicité  foisonnante  et  mouvante  de  la  réalité  à  des

significations générales, mais chercher, par le langage, à décrire l’intuition immédiate

du  réel,  à  approcher  au  plus  près  la  réalité  concrète.  Ainsi  Bergson  invite -t-il  le

...

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