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"Une Charogne" / Baudelaire

Commentaire de texte : "Une Charogne" / Baudelaire. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  15 Décembre 2021  •  Commentaire de texte  •  1 707 Mots (7 Pages)  •  348 Vues

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SÉQUENCE 1 : ALCHIMIE POETIQUE, LA BOUE ET L’OR

SÉANCE N°III : “LA BEAUTÉ DE L’EXTRÊME LAIDEUR”

OBJECTIF : Étudier comment le poète transforme l’extrême laideur en beauté.

Explication linéaire n°II : Charles Baudelaire, “Une Charogne”, in Les Fleurs du Mal, section “Spleen Idéal”, XXIX, 1857-1861 :

XXIX - Une Charogne

Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,

Ce beau matin d'été si doux :

Au détour d'un sentier une charogne infâme

Sur un lit semé de cailloux,

Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,

Brûlante et suant les poisons,

Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique

Son ventre plein d'exhalaisons.

Le soleil rayonnait sur cette pourriture,

Comme afin de la cuire à point,

Et de rendre au centuple à la grande Nature

Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;

Et le ciel regardait la carcasse superbe

Comme une fleur s'épanouir.

La puanteur était si forte, que sur l'herbe

Vous crûtes vous évanouir.

Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,

D'où sortaient de noirs bataillons

De larves, qui coulaient comme un épais liquide

Le long de ces vivants haillons.

Tout cela descendait, montait comme une vague

Ou s'élançait en pétillant

On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,

Vivait en se multipliant.

Et ce monde rendait une étrange musique,

Comme l'eau courante et le vent,

Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique

Agite et tourne dans son van.

Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,

Une ébauche lente à venir

Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève

Seulement par le souvenir.

Derrière les rochers une chienne inquiète

Nous regardait d'un oeil fâché, 

Epiant le moment de reprendre au squelette

Le morceau qu'elle avait lâché.

- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,

A cette horrible infection, 

Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,

Vous, mon ange et ma passion !

Oui ! telle vous serez, ô la reine des grâces,

Apres les derniers sacrements,

Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,

Moisir parmi les ossements.

Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine

Qui vous mangera de baisers,

Que j'ai gardé la forme et l'essence divine

De mes amours décomposés !

        Les Fleurs du mal, Charles Baudelaire

INTRO :

Baudelaire, poète aux confluents du Romantisme, du Parnasse et du symbolisme, sombrant dans les vertiges du spleen (malaise profond de l’âme qui souffre de sa condition humaine) et aspirant sans cesse à un idéal inaccessible de beauté et de pureté, publie en 1857 son recueil Les Fleurs du Mal. Il tente dans sa poésie d’extraire la beauté du mal et de transfigurer une réalité sordide. LA mort, ultime espoir d’échapper au spleen est très présente. Le poème étudié est le 29. Il se situe dans la première partie du recueil intitulé “Spleen Idéal” et a pour titre “Une Charogne”, il est composé de 12 quatrains hétérométriques (alexandrins et octosyllabes). Le texte se structure en trois mouvements, des vers 21 à 36 il fait une description crue de la Charogne puis des ver 37 à 48 il justifie cette hideuse réminiscence par un parallèle avec la femme aimée. Dès lors, en quoi Baudelaire métamorphose-t-il l’extrême laideur grâce aux vertus de la poésie ?

I/La Résurgence d’un souvenir

1)La découverte de la charogne

Il s’agit d’un souvenir comme on le voit avec l’utilisation d’un impératif présent “rappelez-vous”v.1 et d’un souvenir partagé avec une personne comme en témoigne les pronoms personnels “vous” et “nous”V.1. On constate que la personne est assez proche avec l’expression “mon âme” à la rime. Cette expression “mon âme” est reprise de la poésie traditionnelle lyrique et amoureuse mais ici elle va être détournée car elle va être associée à la charogne. Hors dans la poésie lyrique amoureuse elle est utilisée pour qualifier la femme aimée. Le poète y inscrit une notion de spectacle avec le verbe “nous vîmes”. Il s’agit d’une découverte brutale comme on le voit à la valeur de ponctualité du passé simple et l’indication de lieu “Au détour d’un sentier”v.3. Cette découverte est d’autant plus brutale qu’elle se fait dans un cadre idyllique “ce beau matin d’été si doux”v.1, les adjectifs “beau” et “doux” ainsi que l’adverbe d’intensité “si” vont créer un effet de contraste avec l’objet de cette découverte : la charogne. Dès le premier quatrain, le locuteur annonce l’objet du souvenir et du spectacle

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