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Le Rouge et le Noir ; I, 6 "L'ennui"

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Par   •  7 Mars 2021  •  Commentaire de texte  •  2 217 Mots (9 Pages)  •  1 518 Vues

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FRANÇAIS - Commentaire composé

sur le texte « L’ennui », Le Rouge et le Noir

        En 1827, un fait divers fait la une des gazettes et journaux de la société française de la Restauration. Il s’agit de l’affaire Berthet : un jeune précepteur condamné à mort pour avoir tiré deux coups de fusil sur la femme de son employeur, qui s’avère également être son amante. Cette histoire n’est pas sans rappeler l’intrigue du Rouge et le Noir, roman de Stendhal parut trois ans plus tard, et pour cause ! C’est la principale source d’inspiration qui a fait germer dans l’esprit de l’auteur l’idée à l’origine de Julien Sorel, jeune paysan dont l’ambition dépasse le peu de succès que peut lui offrir une vie de travail manuel et le destine ainsi aux ordres. Instruit par l’abbé du village, la rumeur des aptitudes du jeune homme de dix-neuf ans en matière de latin arrive bien vite aux oreilles de monsieur de Rênal, le maire, en quête d’un précepteur pour ses enfants ; il se propose de l’engager. Arrive ainsi le moment tant redouté où Julien doit présenter au « Château » pour rentrer dans ses fonctions et qui fait l’objet de cet extrait. De ce moment, qui est marqué par la rencontre entre le protagoniste et Mme de Rênal, semble pourtant se dégager le topos d’une rencontre qui annonce en filigrane du récit les principes d’une relation naissante. Mais pour déceler les étapes qui permettent d’aboutir à cette conclusion il faut d’abord nous intéresser au portrait que Julien dresse de Mme de Rênal et inversement pour comprendre toute la portée de leur réunion dans le cadre du récit.  

        Dans cet extrait, il nous est donné, à nous lecteur tout comme à Julien, de faire la connaissance de Mme de Rênal. Le narrateur nous en fait un premier portrait, ébauché dans l’imaginaire de Julien, nous permettant d’apercevoir tour à tour une femme d’une grande sensibilité, une mère aimante ou l’incarnation d’un idéal féminin.

        Tout d’abord, il semble important pour la compréhension de ce personnage de s’intéresser à la sensibilité qui en émane. Ainsi, dès la première ligne le narrateur omniscient nous indique que Mme de Rênal nous apparaît au naturel car elle se trouve « loin de regard des hommes ». Cela permet de se rendre compte que toute action de sa part est totalement sincère et que cette femme dont le rang social requiert une certaine contenance se permet plus de lâcher-prise loin des cercles mondains, par exemple lorsqu’elle « se [met] à rire avec toute la gaieté folle d’une jeune fille » (l.23) comportement dont la non-conformité aux mœurs de l’époque est relevée dans le texte par l’adjectif « folle ». Cette spontanéité en présence de Julien est notamment due au bonheur que lui procure le fait que celui-ci ne corresponde pas à l’image du « prêtre sale » (l.25) qu’elle s’est figurée comme précepteur de ses enfants. Obnubilée par cette représentation, le regard qu’elle jette sur Julien est censé être dénué de jugement subjectif, car dénué d’attente, mais le texte nous fait comprendre différemment. Nous voyons là encore une preuve de la sensibilité de Mme de Rênal, que ni sa position d’épouse du maire ni son âge ne sont parvenus à effacer, et qui se manifeste encore lorsque « [son] esprit un peu romanesque » (l.6) ne peut s’empêcher de s’imaginer Julien comme « une jeune fille déguisée » (l.7), malgré l’improbabilité d’une telle chose.  

        La compassion dont Mme de Rênal fait preuve se manifeste également par un « amer chagrin » (l.11) à l’idée que le percepteur de ses enfant puisse leur faire du mal et nous montre ainsi d’elle l’image d’une mère aimante qi se soucie du bien-être de ses enfants. Cet instinct maternel semble également réveiller chez le personnage un sentiment de pitié devant la vison d’un Julien vulnérable, qu’elle même qualifie hyperboliquement de « pauvre créature » (l.9) , mettant l’accent sur la vision pathétique offerte par le jeune homme « pâle et qui [vient] de pleurer »(l.4) . Le début de la description, jalonnée des adverbes « si » marque la subjectivité de Mme de Rênal face à Julien qu’elle regarde encore comme un enfant alors que le lecteur sait qu’il a en fait dix-neuf ans. Allant même jusqu’à l’apostropher par « mon enfant » (l.13), on remarque que la familiarité transmise par le possessif met  tout autant l’accent sur la différence d’âge entre les deux personnages tout autant qu’elle ne prouve que la sensibilité de Mme de Rênal la rend compatissante face larmes de Julien.

        Mais des pensées internes de la dame ne transpirent que peu d’éléments auxquels les spectateurs extérieur peuvent s’accrocher. Ainsi Julien ne peut se baser que sur ce que lui rapportent ses yeux pour se faire une idée de son interlocutrice. Elle se manifeste tout d’abord par « une voix douce »(l.12) , puis c’est un « regard si rempli de grâce »(l.14). La polysémie du terme « grâce » est ici déployée pour connoter à la fois la grâce divine tout comme perfection physique et morale de Mme de Rênal, par métonymie. La description que Julien en fait se poursuit ensuite ligne 20 où la négation totale « ne […] jamais » renforce la singularité de cet « être aussi bien vêtu et surtout [de cette] femme avec un teint si éblouissant »(l.20). A travers le regard naïf du jeune paysan, le narrateur nous peint l’image d’une femme d’une grande beauté qui incarne l’idéal de la gente féminine.

        Ainsi, le personnage de Madame de Rénal nous est présenté dans le texte sous différentes facettes, reflétant ainsi sa complexité par le jeu des points de vue. Ce même procédé s’applique en parallèle au personnage de Julien, connu du lecteur, mais que le texte montre sous un jour nouveau.

        Julien est présenté comme un jeune paysan presque encore enfant, pâle et qui vient de pleurer. Cette description de son physique dénote une fragilité, une sensibilité du personnage qui le rend presque féminin aux yeux de la maîtresse de maison. Cela lui donne la physionomie d’un enfant, alors même qu’il a dix-neuf ans et pour l’époque est considéré comme un homme ; elle annonce l’aspect moral d’un enfant, marqué par l’innocence, la pureté et la sensibilité. Pourtant, nous voyons également Julien « tout honteux de ses larmes qu’il essuy[e] de son mieux »(l.17), et de ce fait, son geste prend une ampleur symbolique : le personnage tente d’effacer cette part d’enfance qu’il reste en lui pour se donner une contenance.

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