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Commentaire Prologue d'Antigone de Anouilh

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Par   •  11 Décembre 2018  •  Commentaire de texte  •  1 556 Mots (7 Pages)  •  1 668 Vues

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Antigone, Le Prologue

L'explication de l'action et la présentation des acteurs du drame est faite par un personnage de convention théâtrale, le Prologue.

Dans un décor peu défini, sans indication de temps ni d'espace, se trouvent rassemblés les personnages de la pièce, tout à leurs occupations. Antigone semble concentrée sur son rôle de jeune fille insignifiante qui, par la fatalité de son nom, va devoir se dresser contre l'autorité et mourir. A côté d'elle, sa sœur Ismène paraît se moquer du public, parlant et riant avec un jeune homme. Celui-ci est le fiancé d'Antigone, Hémon, dont la déclaration d'amour a surpris tout le monde. Nous voyons ensuite le père d'Hémon, le roi Créon, auprès de son page. II est décrit comme un homme fatigué du pouvoir, qui se souvient avec nostalgie de son passé de riche esthète. C'est la mort d'Oedipe et de ses fils qui l'a obligé à s'atteler à la tâche ingrate du politique. Quant à sa femme, Eurydice, elle tricote à côté de la nourrice, et ne fera rien d'autre durant toute la tragédie. Viennent enfin les personnages secondaires : le Messager, pâle comme la mort qu'il doit annoncer et qui le rend digne, et les gardes, rougeauds, qui jouent aux cartes dans leur coin : pères de famille aux allures de mauvais garçons, ils ont pour fonction d'appliquer les décisions de justice comme des machines bien huilées.

Après avoir présenté tous les personnages, le Prologue annonce le début de l'action et résume la situation : la rivalité des deux fils d'Oedipe, leur mort et l'interdiction de rendre au « mauvais frère », Polynice, les honneurs funèbres.

Pendant que le Prologue parlait, les personnages sont sortis un à un, comme dans un défilé. Le Prologue s'en va maintenant lui aussi. La Tragédie peut commencer.

COMMENTAIRE

Une « exposition » bien particulière

La pièce débute par une présentation étrange, distanciée et presque artificielle des personnages, qui tient lieu de scène d'exposition. II s'agit d'un tableau vivant, direct et visuel, où le langage employé est familier, très accessible au public. Les présentant (« voilà », « c'est ») sont nombreux, ainsi que les adjectifs démonstratifs (« cet homme », « ce garçon pâle »...), comme si les personnages étaient montrés du doigt, et les phrases sont le plus souvent courtes et juxtaposées en asyndète. Sont ainsi soulignés et mis en valeur les noms ou les fonctions que devra retenir le public, à qui le Prologue s'adresse d'ailleurs directement (« Vous les connaissez tous »)et dont il se fait le complice (« nous tous »).

Le prologue et la tradition théâtrale

Pour l'habitué du théâtre classique, le personnage du Prologue est surprenant Or, cette ouverture — où un personnage se charge de présenter le sujet de la pièce au public — était tout à fait courante chez tes tragiques grecs. Et l'on trouve également ce procédé chez des auteurs comiques romains comme Plaute et Térence, où le Prologus est chargé de gagner les faveurs du public.

Cette double origine — tragédie et comédie — peut contribuer à expliquer le mélange des tons et des registres que l'on constate ici : d'une part ces princes et ces rois nous apparaissent bien proches de nous, d'autre part, le couple royal côtoie des personnages de comédie (la nourrice) ou de mélodrame (les gardes). Mais c'est également d'une certaine conception de la tragédie qu'il s'agit. Cette dernière, sans rien perdre de sa noblesse, ne concerne plus exclusivement les princes. En revenant à la tradition antique, Anouilh abolit les règles classiques du genre, et propose une vision contemporaine de la tragédie.

En 1944, le tragique est quotidien et concerne tout le monde : « nous tous » dit le Prologue, comme si le public était le peuple de Thèbes, frappé par le destin. Et s'il est dit que l'humble Eurydice doit mourir, comme la fière Antigone, c'est parce que la tragédie n'épargne personne.

La présentation des personnages

Deux phrases délimitent la première partie de cette exposition : « Ces personnages vont vous jouer l'histoire d'Antigone » (p. 9), et « Et maintenant ils vont pouvoir vous jouer leur histoire » (p. 12). Le Prologue y fait le portrait de chacun des personnages dans un ordre déterminé par leur importance respective : on va de l'héroïne aux gardes anonymes, et de l'individu au groupe. D'autre part, les portraits se succèdent logiquement : le lien est avant tout familial (Hémon, puis Créon, puis Eurydice), même si certains rapprochements, comme celui d'Antigone et d'Ismène, ont également pour but de créer un effet de contraste.

De fait, les oppositions manifestes de gestes et de comportements révèlent la coexistence de deux humanités : l'une frivole (Ismène), ou fruste (la reine et la nourrice), voire grossière (les gardes), l'autre responsable, et presque accablée par cette responsabilité (Antigone et Créon, bien sûr, mais aussi le Messager). Le jeune page, parce qu'il est encore un enfant, est le seul à échapper à cette classification.

Les personnages sont également caractérisés par leur nom. Les protagonistes ont un nom propre (Antigone, Ismène, Hémon, Créon et Eurydice), tandis que les autres sont désignés par l'activité qu'ils exercent. L'anonymat frappe donc les humbles, instruments du destin peut-être, mais non ses victimes. Car le nom porte en lui-même la marque du destin : « Mais il n'y a rien à faire. Elle s'appelle Antigone... »

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