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Peut-on parler de monarque républicain ?

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Par   •  4 Avril 2022  •  Dissertation  •  2 501 Mots (11 Pages)  •  205 Vues

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Peut-on parler de monarque républicain ?

« La Vème République, c'est la somme de toutes celles qui l'ont précédée. Quand on ajoute des quantités négatives, on se dirige toujours un peu plus vers l'infiniment moins », cette citation tirée de l’essai de Maurice G. Dantec, American black box, sous-entend entre autres le risque d’abus de pouvoir du chef de l’Etat comme ce qu’il fut notamment avec Louis Napoléon Bonaparte ou Philippe Pétain. La question du titulaire de la souveraineté d’un Etat est récurrente. Maurice Duverger, juriste du XXème siècle a, par ailleurs employé l’expression de « monarque républicain » pour désigner le Président de la République, mais peut-on réellement le qualifier ainsi ? Selon le dictionnaire en ligne Larousse, la République se caractérise comme une « forme d'organisation politique dans laquelle les détenteurs du pouvoir l'exercent en vertu d'un mandat conféré par le corps social ». En effet, ce concept se réfère étymologiquement à la chose publique (Res publica), qui est donc administrée par des individus élus parmi et pour le peuple. Cela corrobore avec l’article 2 de la Constitution qui dispose que le principe de la République française est « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Et de continuer avec l’article 3 qui dispose que « la souveraineté nationale appartient au peuple ». La visée sui generis de la République est donc d’éviter toute centralisation, tout abus de pouvoir et de veiller à laisser le peuple se gouverner, par le prisme de ses représentants, dans son intérêt. En somme, la République s’oppose littéralement à une monarchie, organisation politique caractérisée par la concentration des pouvoirs dans les mains d’un individu. Cette contradiction entre les deux termes est intéressante puisque Maurice Duverger les a apposés afin de former une antinomie conceptuelle. Cette expression utilisée pour désigner la fonction présidentielle dans la Vème République, en opposition à celle dans la Quatrième, caractérise les nouveaux pouvoirs à disposition du Président. L’expression de « monarque républicain » souligne donc la concentration massive des pouvoirs dans les mains du représentant de la République, désigné par ses membres.   Sans nier les travaux et la sagacité de Maurice Duverger, il convient néanmoins de s’interroger sur la pertinence d’employer cette expression pour désigner le Président de la République française tel qu’il est prescrit par la Constitution du 4 octobre 1958. D’où la problématique sous-jacente à cette interrogation : les attributions singulières du Président de la République en font-elles un monarque ? Si le Président à une apparence de monarque dans la République (I), ces attributions respectent néanmoins le cadre Républicain imposé par la Constitution (II).

  1. Le Président de la République sous la Cinquième République, une conception à propension monarchique

Avant tout, si le Président de la République française est parfois vu comme un monarque, c’est qu’il dispose d’un large choix de pouvoirs qui peut rappeler celui dont disposait certains rois.

A/ Un panel de prérogatives propres grâce aux dispositions de la Constitution

Les pouvoirs propres du Président n’exige aucun contreseing ministériel. Ce sont donc des prérogatives qui lui sont reconnues personnellement.

Premièrement, le Président dispose de pouvoirs de garantie et d’arbitrage en matière constitutionnelle et judiciaire. L’article 5 dispose que « Le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État ». Ce premier alinéa lui confère, de facto, un pouvoir d’interprétation de la Constitution comme lorsque le général De Gaulle décida d’appliquer l’article 11 au lieu de l’article 89 pour le référendum de la loi du 6 novembre 1962. Cette interprétation a également été employée sur le premier alinéa de l’article 13 disposant de la signature des ordonnances. Le Président a donc ce pouvoir constitutionnel d’interprétation. Dans ce domaine, le Président détient le droit de nomination de trois membres du Conseil Constitutionnel en vertu de l’article 56. De plus, selon l’article 61, le Président dispose du droit de saisine dudit Conseil afin de vérifier la constitutionnalité des lois avant leur promulgation. En matière judiciaire, le Président est le « garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire » selon l’article 64. Le président est, ipso facto, le garant et l’arbitre des fondamentaux constitutionnels et judiciaires.  En parallèle, le Président dispose de pouvoirs exceptionnels en cas de crise et ce, en vertu de l’article 16. Les dispositions prévues par cet article confèrent au président, lorsque la République est menacée « d'une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu », la primauté en matière exécutive et législative. Cet article n’a été appliqué qu’une seule fois depuis 1958 lors de la tentative de putsch militaire à Alger en 1961. Cette situation de crise conforte les controverses autour de cette article critiqué pour la concentration des pouvoirs qu’il permet car le général De Gaulle avait alors utilisé les mesures de l’article 16 bien au-delà de la crise. L’usage de cet article fut donc encadré par une révision constitutionnelle de juillet 2008. Si l’appréciation des conditions d’exercice des pleins pouvoirs revient au Président, le Parlement pourrait toutefois se réunir en Haute Cour afin de contrer le Président en cas d’abus excessif et injustifié de cet article. Un énième pouvoir propre au Président consiste en son droit de dissolution. En effet, le Président de la République doit informer les Présidents des Assemblées et son Premier ministre mais il lui revient de prononcer la dissolution. Quand bien même les modalités d’application de cette prérogative sont encadrées, il dispose d’un droit lui permettant soit d’agir en cas de crise, de dégager une majorité parlementaire ou bien de régler une tension substantielle avec ledit Parlement. Le Président détient également des prérogatives vis-à-vis du gouvernement et du Parlement. Dans le premier cas, il nomme le Premier ministre en vertu de l’article 8 et préside le Conseil des ministres de par les dispositions de l’article 9. Dans le second cas, le Président communique avec les deux Assemblées par messages lus ne donnant lieu à aucun débat ou vote (article 18). Il peut aussi réunir le Parlement en Congrès où il peut s’exprimer directement et ses mots peuvent donner lieu à un débat hors sa présence. Le Parlement a été réuni en Congrès la dernière fois le 3 juillet 2017. Un pouvoir propre du Président qui en fait un véritable chef de l’Etat est disposé dans l’article 15 : « le Président de la République est le chef des armées ». C’est notamment en cette qualité que lors de la fête nationale, le Président se rend jusqu’à la tribune en véhicule militaire et non pas civil et qu’il passe en revue ses armées. C’est une prérogative qui lui est propre qui lui donne un statut de défenseur de la Nation. Ainsi, le Président de la République dispose de prérogatives propres, larges et puissantes. Son statut et son rôle sont sans commune mesure dans les autres démocraties occidentales. Alors que ses pouvoirs propres lui confèrent une importante latitude, il jouit également d’une irresponsabilité indubitable.

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