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Extrait Théorie générale du droit et de l'Etat, H. KELSEN

Commentaire de texte : Extrait Théorie générale du droit et de l'Etat, H. KELSEN. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  15 Février 2022  •  Commentaire de texte  •  1 856 Mots (8 Pages)  •  248 Vues

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        Dans son très célèbre Contrat social, au XVIIIème siècle, J.J. Rousseau condamne l'absence de véritable fonction politique accordée au peuple souverain dans le simple fait d'élire ses représentants : « Le peuple anglais pense être libre ; il se trompe fort, il ne l’est que durant l’élection des membres du Parlement ; sitôt qu’ils sont élus, il est esclave, il n’est rien ».

        Des siècles plus tard, le même sujet est toujours au cœur du débat politique. Celui-ci va notamment être l'objet de la réflexion d'un des juristes les plus importants de son siècle, Hans Kelsen, dans son ouvrage Théorie générale du droit et de l’État, paru une première fois en 1945. Kelsen est un juriste né en 1881, à Prague en Autriche, dans une famille juive originaire de Galicie,  et va passer la première partie de sa vie à enseigner au Juridicum de Viennes où il obtient une grande renommée. Il est notamment le fondateur de la théorie de la hiérarchie des normes et un fervent partisan du positivisme juridique qu'il tente d'expliquer avec sa pyramide dans son œuvre majeure, Théorie pure du droit. Dans son ensemble, son œuvre a opéré une réelle transformation dans la façon de considérer les systèmes juridiques dans l'Europe du XXème siècle. Pour illustrer la portée de son influence, on peut citer sa participation à la Constitution autrichienne de 1920, à laquelle il a notamment fait l'apport de l'institution nouvelle qu'est le Conseil Constitutionnel.

        En 1940, Kelsen décide d'émigrer au États-Unis peu après l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne nazie en raison de son ascendance juive, et c'est alors sur le continent américain qu'il va rédiger La Théorie générale du droit et de l’État, qui paraîtra à la fin de la seconde guerre mondiale. Cet ouvrage est une présentation claire et formelle de l'ensemble de sa doctrine, et englobe notamment les traits communs à tout les systèmes juridiques étatiques. L'extrait qui nous intéresse traite plus particulièrement de la représentation du peuple par les élus qui, selon Kelsen, est une fiction. Pour lui, il est vain d'utiliser le terme « représentation » afin de caractériser le rapport entre les électeurs et leurs mandataires, puisque ceux-ci n'ont pas l'obligation juridique de réaliser la volonté du peuple qui les élit, quand bien même il est souverain.

        Cet extrait permet donc de s'interroger sur le caractère plus ou moins superficiel de l'expression langagière « démocratie représentative ». En quoi Kelsen cherche ici à nous contraindre à admettre l'absence nécessaire de caractère représentatif au sein du système gouvernemental ?

        En réalité, le principe représentatif dans notre système démocratique moderne serait une illusion (I). Pire, quand bien même une démocratie représentative serait véritable, on pourrait lui objecter des critiques elle resterait un mythe impossible à réaliser (II).

I- La représentation fictive du peuple souverain

        Pour Kelsen, ce qui est présenté comme une représentation du peuple par les mandataires n'en est pas réellement une. En effet, le mandat représentatif retenu est insuffisant à porter en lui la véritable représentation du peuple souverain (A). Pour ce faire, il serait nécessaire d'instaurer le mandat impératif et que celui-ci soit garanti juridiquement (B).

A) L'incapacité du mandat représentatif à représenter la nation souveraine

        Dans son sens commun, représenter quelqu'un signifie avant tout d'être le reflet de sa volonté, d'accomplir un acte en son nom, mais surtout en alignement avec son souhait initial. Or, Kelsen le souligne : « [… les membres du Parlement ne sont généralement pas responsables envers leurs électeurs [...] ». En effet, dans le cadre du mandat représentatif retenu par la majorité des démocraties modernes, ceux qui sont amenés à représenter le peuple ne sont nullement tenus d’exécuter la demande de leur électorat une fois élus. Mais comment pouvoir prétendre à une représentation du peuple lorsque les parlementaires ont une autonomie et une liberté totale quant à leur prise de décision ? La volonté du peuple est complètement annihilée par l'indépendance des élus à son égard et sa souveraineté est réduite à consentir au pouvoir d'autrui.

        Ainsi, pour Kelsen, élection et représentation sont deux choses distinctes qu'il est absurde de confondre sous le même vocable. En réalité, l'élection des parlementaires par le peuple, établie comme l'incarnation de la représentation de la nation souveraine, n'est rien de plus qu'un transfert de compétence. Ainsi, le mandat représentatif n'est capable de produire que des élus, pas des représentants. C'est précisément parce-que le mandat représentatif leur confère une indépendance que les élus ne peuvent pas être le reflet de la volonté populaire. La fonction politique du peuple souverain apparaît donc comme rien de plus que la faculté de choisir ceux qui le gouverneront, ce qui constitue par ailleurs un affaiblissement démocratique.

        En effet, pour Kelsen, c'est l'absence d'un mandat impératif garanti juridiquement qui témoigne de la superficialité du titre de « représentant ». A ses yeux, seul un mandat impératif peut purement et véritablement exprimer la volonté du peuple.

B) La nécessité du mandat impératif garanti juridiquement

        Un mandat impératif implique que le pouvoir délégué à l'élu ne puisse être exercé que dans la limité des instructions prédéfinies par ceux qui lui délèguent ce pouvoir, la nation souveraine. En effet, les mandats impératifs proviennent directement de la population et non pas des candidats eux-mêmes, ce qui permet au peuple d'être inclus dans l'autorité parlementaire, plutôt que d'être réduit à faire un choix parmi ce qu'on lui propose (à noter qu'il y aurait probablement moins de votes blancs).

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