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Commenter d'arrêt Civ. 1ere, 7 juin 1989, n° 87-19.049

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Par   •  11 Mars 2019  •  Commentaire d'arrêt  •  3 447 Mots (14 Pages)  •  2 561 Vues

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Proposition de corrigé de l’arrêt suivant : Civ. 1ere, 7 juin 1989, n° 87-19.049, Non publié au Bulletin.

 « Mettre les couples dans leur diversité à l'épreuve de la solidarité ménagère, c'est vérifier dans quelle mesure, à vouloir vivre en ménage, chacun s'expose à éprouver au passif "la douloureuse éthique de la mise en commun" ». C’est en ces termes que le Professeur DAURIAC envisageait le principe de solidarité à la dette des époux en raison des difficultés pratiques qu’il génère. L’arrêt de cassation rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 7 juin 1989, soumis à notre commentaire, en offre justement une illustration.

En l’espèce, deux époux demeuraient avec leurs enfants dans un appartement pris en location. À la suite d’une requête en divorce, le juge aux affaires familiales attribua provisoirement, par une ordonnance de non-conciliation, la garde des enfants ainsi que la jouissance du logement à l’épouse. L’époux quitta alors le logement. Ultérieurement, alors que le bail avait pris fin par l’effet d’une clause résolutoire, en raison du défaut de paiement des loyers, l’épouse se maintint dans les lieux.  

Partant, le bailleur mécontent réclama le paiement d’une indemnité d’occupation non seulement à l’épouse, occupante sans droit ni titre, mais également à l’épouxLe jugement rendu en première instance étant probablement insatisfaisant pour l’une des parties, l'affaire est portée devant la Cour d’appel.

En effet, le bailleur a interjeté appel devant la Cour d’appel de Versailles. Réunie en la seconde section de sa première chambre, cette dernière a rejeté, par un arrêt rendu le 3 juillet 1987, la demande en indemnité d’occupation formulée par le bailleur à l’égard de l’époux seulement. En ce sens, les juges du fond ont rappelé qu’en l’absence de jugement de divorce définitif et malgré une ordonnance de non-conciliation, l’époux reste normalement cotitulaire du bail. Toutefois, ils ont expliqué qu’il en va différemment lorsqu’une clause résolutoire a mis au contrat de bail concernant les deux époux, de sorte que l’épouse seule demeurée indûment et personnellement dans les lieux est tenue au paiement de l’indemnité d’occupation, l’époux y étant totalement étranger.

Le bailleur a alors formé un pourvoi en cassation.

Selon un moyen unique à l’appui de son pourvoi, le bailleur souhaitait que soit reconnue la solidarité de l’époux au paiement de l’indemnité d’occupation

        Des époux en instance de divorce peuvent-ils être solidairement tenus au paiement d’une indemnité d’occupation due à l’occupation illégale d’un logement par l’épouse ? / Le principe de solidarité ménagère est-il applicable à une dette non contractuelle née au cours de l’instance de divorce ?

La Cour de cassation répond par la positive et casse et annule dans toutes ses dispositions la décision d’appel.

En premier lieu, elle énonce au visa de l’article 220 du Code civil le principe selon lequel il pèse sur les époux une obligation solidaire qui a vocation à s’appliquer à toute dette même non contractuelle ayant pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants.

En second lieu, elle précise que dans la mesure où le divorce n'est opposable aux tiers qu'à partir du jour où les formalités de mentions en marge prescrites par les règles de l'état civil ont été accomplies, l’épouse ne peut, en vertu de l'article 220 du Code civil, être seule tenue au paiement des indemnités d'occupation, si bien que la Cour d’appel a violé ce texte

Bien que n’étant pas publié au Bulletin, cet arrêt revêt une certaine importance en ce qu’il se prononce clairement sur la portée de l’article 220 du Code civil. D’autres décisions similaires l’ont précédé, mais lui a le mérite d’exposer clairement et expressément l’interprétation du principe de solidarité des époux s’agissant des dettes ménagères et son application. La solution de cet arrêt étant toujours d’actualité, celui-ci est souvent évoqué par la doctrine pour illustrer ce principe

Ce faisant, la première chambre pose clairement une interprétation extensive du principe de solidarité à la dette des époux qui se révèle discutable (I), tout autant que l’application temporelle de ce principe qui peut paraître inadaptée au cas d’espèce (II

L’interprétation extensive discutable du principe de solidarité à la dette des époux

La Cour de cassation, au visa de l’article 220 du Code civil, énonce l’interprétation qu’il convient d’avoir de ce principe. Si le caractère ménager de la dette semble justifié au regard de la lettre dudit article (A), l’admission de son caractère non contractuel l’est beaucoup moins (B). 

  1. La justification du caractère ménager de la dette  

Si l’on s’en tient à la formule de l’article 220 du Code civil, la dette ménagère est celle qui a pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants.

Or, dans la présente affaire, la dette litigieuse est précisément une indemnité d’occupation due à la suite d’une occupation illicite d’un logement. De prime abord, le caractère ménager de la dette n’est pas évident, en tout cas moins que pour la dette de loyer du logement occupé personnellement par un époux que la jurisprudence reconnaît régulièrement (Cass. 1e civ., 9 oct. 1990 ; Cass. 1e civ., 25 juin 1991).

En admettant que le logement soit un lieu nécessaire à l’éducation des enfants et à la vie du ménage, on comprend alors que la dette résultant de l’occupation illégale de celui-ci, surtout si le parent occupant n’avait pas d’autre lieu où installer sa famille, constitue une dette ménagère.  

À y regarder de plus près, en se conformant à l’esprit même des dispositions régissant le mariage, notamment eu égard à l’article 203 du Code civil qui instaure l’obligation des époux « de nourrir, entretenir et élever leurs enfants », on peut à plus forte raison admettre que le logement est un lieu bien nécessaire pour élever les enfants et donc que l’indemnité d’occupation arbore un caractère ménager.

Plus encore, eu égard spécifiquement au devoir de secours imposé par l’article 212 du Code civil, l’occupation exclusive ou privative du logement pendant l’instance en divorce peut être regardée comme une modalité d’exécution de ce devoir (Cass. 1e civ., 25 juin 1991).

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