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Les faibles sont-ils forts de leur faiblesse ?

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Par   •  6 Décembre 2014  •  4 281 Mots (18 Pages)  •  1 235 Vues

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Grandes Questions du Droit Robin Racasan 2A

Les faibles sont-ils forts de leur faiblesse ?

Dans Jacques le Fataliste, Denis Diderot soutient, de façon très explicite, que « les hommes faibles sont les chiens des hommes fermes ». Il s’agit alors de définir ce qu’est un « homme faible », et là n’est pas tâche aisée. D’un point de vue économique, un faible est un individu dépourvu d’une multitude de biens matériels, donc sans grandes ressources financières : c’est, sans faire usage d’un langage politiquement correct, un « pauvre ». En outre, un faible peut être perçu comme un individu diminué physiquement, c’est-à-dire un enfant, une femme, une personne âgée ou un handicapé (tant physique que mental). Reprenant l’image du chien de Diderot, les animaux sont aujourd’hui également considérés comme des êtres faibles, du fait de leur reconnaissance depuis peu comme des personnes à part entière. Toutefois, en tentant ici de définir le faible, nous nous heurtons à une conception trop réductrice et en proie à différentes considérations purement subjectives. Il convient donc dès lors, pour parfaire notre définition, d’opposer les faibles aux forts, c’est-à-dire ceux qui ont la responsabilité des personnes et des choses : parents, patrons, mais aussi élites intellectuelles ou technocratiques. Matériellement à coup sur, et intellectuellement le plus souvent, un fossé est creusé entre d’un côté le fort dominant et de l’autre le faible dominé. Or, le fort n’est pas toujours une entité physique concrète, contrairement au faible. Ainsi, en reprenant l’expression de Max Weber, l’Etat, puissance abstraite de régulation, détient le « monopole de la violence physique légitime ». Aussi, en aucun cas, les individus qualifiés précédemment de forts n’ont-ils, dans le cadre d’un Etat de droit, c’est-à-dire où règne la justice, le droit de priver autrui de sa liberté, en l’aliénant ou le contraignant. Dès lors, faibles et forts au sein d’une société sont tous deux soumis à une forme supérieure d’autorité : l’Etat de droit démocratique. Grâce à celui-ci, le faible se dote d’une arme puissante, car traduisant de l’incontestable : l’épée de la justice et le bouclier du droit.

Ainsi, il apparaît légitime de se demander si, au cœur d’un Etat de droit et de justice, les faibles ne parviennent-ils pas à « rattraper », voire égaler, les forts dans l’exercice de leurs droits fondamentaux ? Plus encore, les faibles ne sont-ils pas plus forts, juridiquement parlant, que les forts, au point de les dépasser dans l’usage et la garantie de ces mêmes droits ? A l’inverse, le fort, bâtisseur de l’Etat de droit dans lequel le faible jouit d’une relative puissance, n’exprime t-il pas d’autant plus sa domination lorsqu’il accepte d’en déléguer une partie, via l’Etat démocratique et la justice ?

Si, comme l’affirmait Gandhi dans Tous les hommes sont frères, « la démocratie devrait assurer au plus faible les mêmes opportunités qu’au plus fort » (I), rien n’empêche le fait que le droit protégeant le faible est façonné par les forts (et notamment les élites intellectuelles ou technocratiques), qui restent légitimement matrices du système juridique (II).

I) Etat de droit et Justice au service du plus faible

La jurisprudence tend à garantir un droit du plus faible permettant, par une justice casuistique, plus d’égalité entre faibles et forts au sein de la société (A). Cependant, certains voient dans ce droit du plus faible une possible dérive vers une loi du plus faible ; à l’opposé du principe d’égalité voulu (car essentiel) par la justice (B).

A. Droit du plus faible : le rôle casuistique de la jurisprudence

L’essence même de la justice, ce par quoi elle se définit, c’est qu’elle est juste, au sens où elle produit de l’irréfragable. Pour satisfaire cette exigence, la justice doit être égale pour tous (1°), surtout lorsque deux parties sont liées à travers une puissante arme juridique : le contrat (2°).

1°) Une justice égale pour tous

La société est marquée par de profondes inégalités : grands patrons du CAC 40, cadres dirigeants ou encore parents s’opposent aux SDF, employés ou enfants. Or, selon l’Article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, « la loi doit être la même pour tous, qu’elle protège ou qu’elle punisse ». Ainsi, en théorie, les inégalités entre faibles et forts ne franchissent jamais les portes d’un tribunal. Cependant, devons-nous réellement punir (car là est la fin du jugement) de la même façon un homme frappant un autre homme qu’un homme frappant une femme, un enfant, un chien ? Par ailleurs, qu’est-ce qui empêcherait le plus riche de corrompre un juge ou les jurys ? Aussi le juge est-il obligé, dans un soucis d’égalité, de prendre en compte la personnalité de l’accusé, c’est-à-dire ce qu’il est dans la société. Pour cela, il a à sa disposition des peines dites progressives. Ainsi, le trouble mental protège juridiquement le malade, qui se verra préféré à l’asile plutôt qu’en prison suite à une expertise. Il en va de même avec les 17 circonstances aggravantes pour les violences, avec le cas de la séquestrée de Poitiers, laissée enfermée nue dans une cave durant 25 ans, pour ne citer qu’un exemple de violences envers une personne handicapée mentalement. Selon l’Article 223-15-2 du Code Pénal, l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de faiblesse « d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une défiance physique ou psychique, ou à un état de grossesse est apparente ou connue de son auteur » est aussi punissable, et alourdie en cas de circonstances aggravantes selon la victime (viol sur mineur par exemple). De même, l’abus de faiblesse de consommateurs les plus vulnérables est puni par l’Article L122-8/9 du Code de la consommation. De plus, afin de protéger les enfants, ceux-ci ne sont pas tenus responsables civilement de leurs actes jusqu’à 7 ans, et 13 ans pour le domaine pénal. Selon l’Article 1384-1 du Code Civil, la responsabilité est à celui qui a la garde de la chose, donc les parents. De même, l’Article 1383 du Code Civil punit les parents pour « négligence ou imprudence », l’acte délinquant d’un enfant étant toujours présumé faute des parents. Dans la même idée de protection par la responsabilité, nous pouvons citer l’Arrêt Blieck du

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