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Hannah Arendt et la Condition De L'homme Moderne

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Par   •  18 Décembre 2012  •  1 533 Mots (7 Pages)  •  2 472 Vues

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2) Citations d’Arendt sur l’agent et la signification de l’action :

Distinction entre commencement du monde (phénomènes, nature) et commencement de quelqu'un (action) :

« Agir, au sens le plus général, signifie prendre une initiative, entreprendre (comme l’indique le verbe archein, « commencer », « guider », et éventuellement « gouverner »), mettre en mouvement (ce qui est le sens original du latin agere). Parce qu’ils sont initium, nouveaux venus et novateurs en vertu de leur naissance, les hommes prennent des initiatives, ils sont portés à l’action. [...] Ce commencement est autre chose que le commencement du monde1 ; ce n’est pas le début de quelque chose mais de quelqu'un, qui est lui-même un novateur. C’est avec la création de l’homme que le principe du commencement est venu au monde, ce qui évidemment n’est qu’une façon de dire que le principe de liberté fut créé en même temps que l’homme, mais pas avant » (p. 233-234 Agora / p. 199-200 Calmann-Lévy).

Le langage ne tient pas un rôle secondaire dans la signification de l’action, mais l’acteur est toujours impliqué dans une parole devant autrui (dans laquelle il dit ce qu’il fait et par laquelle autrui décrit à son tour ce qu’il a fait) :

« Sans l’accompagnement du langage, l’action ne perdrait pas seulement son caractère révélatoire, elle perdrait aussi son sujet, pour ainsi dire ; il n’y aurait pas d’hommes mais des robots exécutant des actes qui, humainement parlant, resteraient incompréhensibles. L’action muette ne serait plus action parce qu’il n’y aurait plus d’acteur, et l’acteur, le faiseur d’actes, n’est possible que s’il est en même temps diseur de paroles. L’action qu’il commence est révélée humainement par le verbe, et bien que l’on puisse percevoir son acte dans son apparence physique brut sans accompagnement verbal, l’acte ne prend un sens que par la parole dans laquelle l’agent s’identifie comme acteur, annonçant ce qu’il fait, ce qu’il a fait, ce qu’il veut faire. Il n’y a pas d’activité humaine qui ait autant que l’action besoin de la parole [...] » (p. 235 Agora / p. 201 Calmann-Lévy).

L’action de l’agent ne se révèle qu’avec autrui –c'est-à-dire ni pour ni contre autrui :

« Cette qualité de révélation de la parole et de l’action est en évidence lorsque l’on est avec autrui, ni pour ni contre –c'est-à-dire dans l’unité humaine pure et simple. Bien que personne ne sache qui il révèle lorsqu’il se dévoile dans l’acte ou le verbe, il lui faut être prêt à risquer la révélation, et cela, ni l’auteur de bonnes œuvres qui doit être dépourvu de moi et garder un complet anonymat ni le criminel qui doit se cacher à autrui ne peuvent se le permettre. Ce sont des solitaires, l’un étant pour, l’autre contre tous les hommes ; ils restent, par conséquent, en dehors des rapports humains et, politiquement, ce sont des figures marginales qui, d’ordinaire, montent sur la scène de l’Histoire aux époques de corruption, de désintégration et de banqueroute politique2. En raison de sa tendance inhérente à dévoiler l’agent en même temps que l’acte, l’action veut la lumière éclatante que l’on nommait jadis la gloire, et qui n’est possible que dans le domaine public » (p. 237 Agora).

L’agent de la guerre n’est « personne », et malgré cela les hommes cherchent par leurs monuments à nommer un « qui » représentant à la fois les acteurs et les victimes de cette guerre :

«  L’action qui n’a point de nom, point de « qui » attaché à elle, n’a aucun sens, alors qu’une œuvre d’art garde sa signification même si nous ignorons le nom de son auteur. Les monuments au « Soldat inconnu » après la première guerre mondiale témoignent du besoin de glorification qui existai encore, du besoin de trouver un « qui », quelqu'un d’identifiable que quatre années de tuerie auraient dû révéler. C’est la frustration de ce vœu et le refus de se résigner au fait brutal que l’agent de la guerre n’était en réalité personne, qui fit ériger les monuments aux « inconnus », à tous ceux que la guerre n’avait pas su faire connaître et qu’elle avait ainsi dépouillés non de leurs exploits, mais de leur dignité humaine » (p. 238 Agora).

Celui qui agit n’est en aucun cas l’auteur exclusif (ou même l’auteur véritable) de son action :

« Bien que chacun commence sa vie en s’insérant dans le monde humain par l’action et la parole, personne n’est l’auteur ni le producteur de l’histoire de sa vie. En d’autres termes, les histoires, résultats de l’action et de la parole, révèlent un agent, mais cet agent n’est pas auteur, n’est pas producteur. Quelqu'un a commencé l’histoire et en est le sujet au double sens du mot : l’acteur et le patient ; mais personne n’en est l’auteur. Car la grande inconnue de l’Histoire [...] déroute la philosophie de l’Histoire

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