Le roman de Stendhal, Le rouge et le noir est il romantique ou réaliste ?

Le rouge et le noir est un roman d’apprentissage de Henri Beyle dit Stendhal paru en 1830. Il met en scène un héros d’origine modeste porté par son ambition : Julien Sorel. Ce deuxième roman de l’auteur s’inscrit dans une période de grands bouleversements sociaux et politiques et est d’abord incompris par la critique qui dénonce l’immoralité et l’invraisemblance du héros ou la laideur sociale et humaine qui émane de l’œuvre. En effet, à cette époque la littérature accompagne l’évolution des mentalités et certains auteurs montrent la volonté de dépeindre la société tel qu’elle est dans cette période marquée par « le mal du siècle ». Bien que Stendhal s’inscrive dans le mouvement romantique, son roman mêle aussi certains aspects du réalisme encore méconnu au début du XIXème siècle et semble s’imposer comme une œuvre charnière entre ces deux mouvements. Peut-on dire que Le rouge est le noir, œuvre romantique relève également voire davantage d’une esthétique réaliste ? Dans un premier temps nous verrons que cette œuvre a de nombreuses caractéristiques du mouvement réaliste dont Stendhal apparaît comme un des précurseurs, puis nous traiterons des traces de sensibilité romantique qui émanent tout de même de l’œuvre.

Le rouge et le noir révèle une esthétique réaliste inattendue pour un roman des années 1830. En effet, alors que ce mouvement n’apparaît que dans les années 1850, Stendhal prône déjà, dans cette œuvre le rejet de l’idéalisation de la société et la nécessité de montrer la réalité. Il est d’ailleurs l’un des premiers à lier le style classique du roman à l’histoire contemporaine bien que son œuvre présente des angles morts qui amèneront l’expression de « réalisme stendhalien » à qualifier ce genre littéraire. Le rouge et le noir et une œuvre ancrée dans l’actualité comme l’annonce d’ailleurs son sous-titre « Chronique de 1830 ». En effet, Stendhal a retranscrit le contexte politique de son époque à travers ce récit inspiré de deux fait divers : l’affaire Berthet et l’affaire Lafargue. Centré sur les dernières années de la Restauration le roman présente les tentions entre ultras et libéraux notamment lorsque voulant se faire pardonner de Julien, Mme de Rênal doit négocier un abonnement chez un libraire libéral avec son mari ultra-royaliste. En outre, les personnages qui trempent dans la politique sont tous caractérisés par leur médiocrité et leur bêtise. Par exemple, le maire de Verrières, M. de Rênal ou encore M. Valenod, le directeur du dépôt de mendicité sans scrupule qui s’enrichit en exploitant les misérables dans la première partie. Stendhal intervient d’ailleurs se proclamant libéral dans cette société dominé par les religieux et les bourgeois ultra-royalistes qui craignent la persécution si le retour à la République avait lieu comme on le voit lorsque Mathilde demande à son amant de protéger ses enfants si elle venait à avoir des problèmes. Par ailleurs, à travers le personnage de Julien mais aussi de Falcoz on remarque la fascination portée à Napoléon et le regret de cette génération qui n’a pas connu la grandeur de l’ère napoléonienne où toutes les trajectoires individuelles semblaient possibles. En effet, dès son apparition dans le roman Julien est présenté comme porté par ce modèle de gloire qui nourrit son imagination et dont il dévore les récits dans Le mémorial de Sainte-Hélène. En définitive, Le rouge et le noir dénonce les abus des politiques et les tentions de cette époque qui marque un tournant dans l’histoire mais aussi le « mal du siècle » qui règne dans les esprits bonapartistes.

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