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Etat fédéral, stade suprême du régionalisme ?

Dissertation : Etat fédéral, stade suprême du régionalisme ?. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  15 Juin 2017  •  Dissertation  •  2 443 Mots (10 Pages)  •  1 035 Vues

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Dissertation

« Etat fédéral, stade suprême du régionalisme ? »

Le 6 décembre 1978, le peuple espagnol approuvait par référendum la Constitution qui allait transformer l’Etat fort, unitaire et centralisé mis en place par Franco, en un Etat dit régionalisé par la création des Communautés autonomes. L’article 137 de cette Constitution dispose ainsi que le territoire serait distribué « entre les communes, les provinces et les communautés autonomes qui le constituent », chacune jouissant d’une autonomie certaine, tandis que l’Etat assurerait la « réalisation effective du principe de solidarité ».

Dès lors, c’est à partir de ce cas, conjointement à l’exemple italien, qu’a été théorisé le modèle de l’Etat régional qui se caractérise donc par la reconnaissance à des entités régionales d’une réelle autonomie politique et institutionnelle dans le but de prendre en compte certaines particularités régionales tout en conservant l’indivisibilité de l’Etat. Certains le situent d’ailleurs comme une forme d’État intermédiaire à part entière entre Etat unitaire et Etat fédéral, tandis que d’autres n’y voient qu’une première étape, presque transitoire, vers le fédéralisme.

En effet, l’Etat fédéral peut être rapproché de l’Etat régional en ce que chaque entité membre de la fédération possède son propre gouvernement, un statut et des pouvoirs garantis par la Constitution fédérale, mais reconnait dans le niveau fédéral souverain, une autorité supérieure.

Historiquement, A. de Tocqueville démontre que la formation de l’Etat français unitaire s’est fait à partir d’un Etat dans lequel s’observaient de fortes régionalisations, la Constitution de 1791 unifiant ainsi le pays en termes de droit et mettant fin aux pouvoirs locaux, aux corporations, et à toute autre forme de particularisme qui entravait la formation d’une République indivisible.

A l’inverse, le modèle régional s’est imposé en Espagne et en Italie sur un territoire où apparaissait la nécessité de reconnaître des particularités régionales étouffées par les régimes franquiste et fasciste. L’idée d’Etat fédéral remonte quant à elle à l’Antiquité, où sont formées des associations d’Etats qui perdent en souveraineté pour des bénéfices communs, mais n’est réellement mise en œuvre qu’en 1787 aux Etats-Unis avant de devenir le plus répandu parmi les grands États tels que les Etats-Unis, le Canada ou l’Allemagne, et parmi quelques États moins étendus comme la Belgique ou le Venezuela.

Peu d’exemples permettent toutefois d’affirmer que le fédéralisme est le stade suprême d’un régionalisme qui ne serait qu’une étape provisoire : c’est le fédéralisme centripète. Parmi eux, la Belgique qui, auparavant Etat unitaire puis Etat régionalisé dans les années 1970, s’est tournée vers le modèle fédéral via la réforme constitutionnelle de 1993. Il paraît donc légitime de s’interroger sur la place de l’Etat régionalisé parmi les modèles de la division verticale du pouvoir.

Ainsi, dans quelle mesure l’Etat régional peut être considérée comme un modèle intermédiaire entre Etat unitaire et Etat fédéral de même rang que ces derniers, plutôt qu’une sorte de modèle transitionnel ou de fédéralisme inachevé ?

Sont d’abord à noter les nombreuses similarités existant entre régionalisme et fédéralisme, qui soulèvent dès lors la question d’une possible filiation entre eux qui ferait de l’Etat fédéré l’aboutissement de l’Etat régional (I). Toutefois, ce dernier apparaît historiquement comme une variante à part entière de l’Etat unitaire qui tend aujourd’hui à se diffuser, sur le continent européen notamment, en tant que modèle original à mi-chemin entre fédéralisme et unitarisme (II).

I – L’Etat régional, embryon d’Etat fédéral ?

L’Etat régional paraît avoir beaucoup emprunté au modèle fédéral, et peut donc sur certains aspects être considéré comme une sorte d’étape vers ce dernier. Cependant, des singularités notables s’observent également, venant ainsi mettre en doute l’idée d’un Etat fédéral en tant que stade suprême du régionalisme.

  1. L’Etat régional, en marche vers le fédéralisme

D’abord, l’Etat régional fait montre d’une structure décentralisée similaire à celle de l’Etat fédéral, presque une sorte de structure d’Etat fédéral en devenir. En effet, l’autonomie accordée aux régions va plus loin qu’une simple décentralisation de l’administration : la régionalisation politique débouche en effet sur la reconnaissance d’un pouvoir législatif régional. Par un effet de mimétisme institutionnel, les institutions locales sont, à l’instar de ce qui s’observe dans le modèle fédéral, très largement calquées sur celles de l’Etat et forment ainsi un régime de type parlementaire à l’échelle régionale en Espagne (à l’exception du droit de dissolution du Parlement). En découle dès lors un pouvoir législatif régional caractérisé, tout comme l’Etat fédéral, par une dualité de pouvoirs législatifs et, par conséquent, d’ordre juridique. Ainsi, en Italie chaque région peut adopter des « lois régionales », tandis qu’en Espagne les Communautés autonomes de premier rang, mais aussi celles de second rang dans la pratique, disposent d’un pouvoir législatif. Ce pouvoir est encadré par la Constitution et donc, a priori, hors de portée du législateur national ; c’est sur ce point que l’Etat régional semble bien plus proche de l’Etat fédéral qu’unitaire puisque le système fédéral voit la répartition des compétences entre Etat et régions définie par la Constitution tandis qu’un Etat unitaire décentralisé, tel que la France, laisse cette compétences aux législateurs qui peuvent ainsi la modifier au grès des fluctuations politiques.

Ces similarités semblent témoigner d’une relative continuité entre les systèmes régional et fédéral, continuité pouvant dans une certaine mesure mener à l’analyse du fédéralisme en tant que finalité du régionalisme. D’ailleurs, dans le sillage de l’exemple belge, une évolution vers le fédéralisme avait été envisagée en Italie en 1997 par la Commission bicamérale alors attelée à une réflexion sur la révision de la Constitution de 1946. Ce projet, relativement flou toutefois, n’aboutit pas mais l’adoption de lois constitutionnelles en 1999 et 2001 renforçant l’autonomie des régions a donné lieu à des débats autour de ce qui était vu par certains comme un « fédéralisme domanial ». Dans les faits, ces mesures, loin du projet de la Ligue du Nord de partition du territoire italien en trois Républiques, sont assimilables à des mesures classiques de décentralisation et, preuve peut être que le peuple italien n’aurait pas accepté un glissement vers le fédéralisme, le projet de révision constitutionnelle entendant instituer un système de type quasi fédéral est largement rejeté par référendum en 2006, bien que d’autres facteurs, tels que le fait qu’il fut porté par le gouvernement Berlusconi, entrent en jeu dans l’appréhension de ce refus. Aussi, si la prise en autonomie dans les faits des communautés espagnoles, notamment catalane, avait pu laisser à penser à une évolution vers plus de fédéralisme, le Tribunal constitutionnel a, après 4 ans de délibération, fermement rappelé les limites de l’autonomie des Communautés notamment à propos de l’usage du Catalan et de l’évocation d’une « nation catalane » dans le statut examiné.

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