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Une Vie

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Par   •  30 Avril 2015  •  Cours  •  469 Mots (2 Pages)  •  474 Vues

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Dans son âme misérable et troublée, elle faisait entre elles une comparaison incessante ; et elle maudissait

Dieu, qu’elle avait cru juste autrefois ; elle s’indignait des préférences coupables du destin, et des

criminels mensonges de ceux qui prêchent la droiture et le bien.

Parfois la crise devenait tellement violente que toute idée s’éteignait en elle. Elle n’avait plus de force, de

vie, de connaissance que pour souffrir.

Dans les minutes d’apaisement elle ne pouvait détacher son oeil de Julien ; et une autre douleur, une

douleur de l’âme l’étreignait en se rappelant ce jour où sa bonne était tombée aux pieds de ce même

lit avec son enfant entre les jambes, le frère du petit être qui lui déchirait si cruellement les entrailles.

Elle retrouvait avec une mémoire sans ombres les gestes, les regards, les paroles de son mari devant

cette fille étendue ; et maintenant elle lisait en lui, comme si ses pensées eussent été écrites dans ses

mouvements, elle lisait le même ennui, la même indifférence pour elle que pour l’autre, le même insouci

d’homme égoïste, que la paternité irrite.

Mais une convulsion effroyable la saisit, un spasme si cruel qu’elle se dit : « Je vais mourir. Je meurs ! »

Alors une révolte furieuse, un besoin de maudire emplit son âme, et une haine exaspérée contre cet

homme qui l’avait perdue, et contre l’enfant inconnu qui la tuait.

Elle se tendit dans un effort suprême pour rejeter d’elle ce fardeau. Il lui sembla soudain que tout son

ventre se vidait brusquement ; et sa souffrance s’apaisa.

La garde et le médecin étaient penchés sur elle, la maniaient. Ils enlevèrent quelque chose ; et bientôt ce

bruit étouffé qu’elle avait entendu déjà la fit tressaillir ; puis ce petit cri douloureux, ce miaulement frêle

d’enfant nouveau-né lui entra dans l’âme, dans le coeur, dans tout son pauvre corps épuisé ; et elle voulut,

d’un geste inconscient, tendre les bras.

Ce fut en elle une traversée de joie, un élan vers un bonheur nouveau, qui venait d’éclore. Elle se trouvait,

en une seconde, délivrée, apaisée, heureuse, heureuse comme elle ne l’avait jamais été. Son coeur et sa

chair se ranimaient, elle se sentait mère !

Elle voulut connaître son enfant ! Il n’avait pas de cheveux, pas d’ongles, étant venu trop tôt ; mais lorsqu’elle

vit remuer cette larve, qu’elle la vit ouvrir la bouche, pousser ses vagissements2, qu’elle toucha cet avorton3

fripé,

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