Rhinocéros, pièces de théâtre

Acte II tableau 2

Introduction :

Rhinocéros est une pièce en 3 actes de Eugène Ionesco, qui fut publiée en 1959 et jouée pour la première fois la même année. Elle met en scène une étrange épidémie, la rhinocérite, par laquelle les habitants d’une petite ville se métamorphosent en rhinocéros.

En mêlant comique et tragique, cette pièce montre les dangers du conformisme qui fait disparaitre la pensée individuelle et favorise la mise en place des idéologies totalitaires. C’est une contre-utopie originale. Elle est aujourd’hui, comme La Peste, de Camus ou 1984 de Orwell, un classique mondial de la littérature antitotalitaire.

L’histoire se résume ainsi : dans une petite ville de province, un dimanche matin, l’irruption d’un rhinocéros fait scandale. L’animal est bientôt suivi d’un deuxième. Malgré les sceptiques, il faut bien se rendre à l’évidence : les rhinocéros se multiplient, et envahissent peu à peu la ville. Mais on découvre qu’il ne s’agit pas d’une invasion : ce sont les hommes qui, peu à peu, se métamorphosent en animaux. Jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un seul être humain…

Le texte dont nous avons à faire l’étude constitue un moment clé de la pièce. Il s’agit en effet de la seule mutation d’un personnage en rhinocéros directement représentée sur la scène. Bérenger est venu rendre visite à Jean pour tenter de se réconcilier avec lui après l’altercation de la fin de l’acte I et pour lui relater la métamorphose de M.Boeuf (Acte II tableau 1)

La scène se déroule dans la chambre de Jean.

LECTURE DU TEXTE

- quels sont les procédés dramaturgiques de la métamorphose

- en quoi cette scène illustre la fracture désormais inévitable entre Bérenger et Jean

I) Procédés dramaturgiques de la métamorphose :

Utilisation de l’espace scénique :

Cette scène se déroule autour d’un double espace, comme l’indique la didascalie : il y a d’une part la chambre de Jean (espace visible par le spectateur) et d’autre part la salle de bains (située hors scène) qui est le lieu de la transformation proprement dite.

Les allées et venues de Jean de la salle de bains à la chambre permettent d’une part de réaliser techniquement le processus physique de la métamorphose, d’autre part de rendre perceptibles au spectateur les différentes étapes de ce processus comme l’apparition effrayante » de Jean et cela renforce l’inquiétude du spectateur face au mystère de la métamorphose.

Eléments sonores :

Par ailleurs, les éléments sonores participent également à la métamorphose. Ils concernent d’abord le langage de Jean : s’opère une déconstruction progressive de son discours, une dislocation de la syntaxe.

Les répliques sont brèves et parfois réduites à un mot ou deux avec l’emploi de l’infinitif et l’absence de pronom devant le nom : « chaud…trop chaud. Démolir tout cela, vêtements, ça gratte, ça gratte ».

C’est une parole incompréhensible où se fait entendre le souffle du fauve (« soufflant bruyamment » vers 22, « paroles furieuses et incompréhensibles » vers 45). Les onomatopées remplacent progressivement les mots « Brrr … » (vers 30).

On assiste à une perte progressive chez Jean du langage humain, remplacé peu à peu par des barrissements (« il barrit presque » vers 31 « il barrit de nouveau » vers 34 « à peine distinctement » vers 47).

A la fin de la scène, il y a de plus en plus de didascalies parce que le dialogue devient impossible entre eux. A la fin de l’acte II, le texte est même saturé en didascalies parce que le dialogue est devenu littéralement impossible entre les deux personnages.

Eléments visuels :

La métamorphose de Jean ne se passe pas dans la chambre mais dans la salle de bain : les deux personnages ne sont pas toujours dans la même pièce, ce qui montre le refus de communication de Jean.

Les indications scéniques révèlent la volonté d’Ionesco de donner une dimension réaliste à la métamorphose de Jean. Celui6ci devient vert et une bosse grossit sur son front jusqu’à devenir une corne de rhinocéros.

Ionesco multiplie les signes visuels de cette transformation : Jean ne cesse de se déplacer, se débarrasse de ses vêtements, caractéristiques de la civilisation.

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