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Perceval, étude de texte

Commentaire de texte : Perceval, étude de texte. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  6 Mai 2013  •  Commentaire de texte  •  2 109 Mots (9 Pages)  •  1 537 Vues

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Elle occupe peu de place apparente dans le roman et meurt dès le départ de son fils ; on pourrait donc se demander si elle présente vraiment un intérêt significatif. Son statut social exact reste ambigu. Ses relations avec son fils sont très intenses et justifient le rôle de cette femme peu présente physiquement mais si importante pour comprendre la psychologie de son fils. On peut par ailleurs penser qu’elle joue un rôle négatif dans l’éducation qu’elle donne à Perceval, mais l’auteur la réhabilite à la fin et son rôle essentiel reste de poser des jalons narratifs que développera au fur et à mesure Chrétien de Troyes.

La mère de Perceval a des origines difficiles à établir. Le royaume des Îles dont vient Clamadeu apparaît comme rival du royaume arthurien. Le siège de Beaurepaire en prend une dimension nouvelle : s'attaquer à Βlan¬chefleur, c'est s'attaquer indirectement au roi Arthur. Mais le double lignage, paternel et maternel, de Perceval est également originaire de ces Îles de la Mer. C'est ce que la mère apprend au jeune homme an début du roman : « nul ne fut si redouté [que votre père] parmi les îles de la mer » (p. 41) et « De mon temps, il n'y eut lignage plus prestigieux que le mien ». Pourtant la mère semble reconnaître la suzeraineté d'Uter Pandragon et de son fils, qu'elle appelle «le bon roi Arthur » (p. 42). Faut-il comprendre que, durant la période de guerre et d'anarchie qui a suivi la mort d'Uterpandragon, de mauvais chevaliers se sont emparés des Îles de la Mer pour y instituer un royaume ennemi de celui d'Arthur ? En luttant contre Clamadeu, Perceval vengerait donc aussi son père, ancien vassal d'Uterpandragon, blessé et spolié par les ennemis du roi. Présentée comme totalement isolée au milieu d’une forêt, c’est cependant vraisemblablement une femme riche avec des « herseurs » et des « chambrières ».C’est enfin un personnage codé :les veuves seules avec un fils abondent dans le folklore et la littérature médiévale(Arthur, Merlin, Lancelot, Tristan) :le thème permet d’ouvrir le héros à l’aventure et l’apprentissage ;quant au thème des conseils (surtout donnés par trois !) donnés et mal compris ou mal écoutés (qui permet de mettre en perspective la mère et Gornemant), c’est un classique des contes populaires.

Ses relations avec Perceval sont particulières, quasi fusionnelles. Il est « tout son réconfort » et « tout son bien ».Elle est si attachée à lui que le moindre retard la perturbe ;c’est qu’il est un survivant dans cette famille meurtrie par les guerres (le père, d’abord blessé comme le roi pêcheur, et les deux frères sont morts) et elle ne vit plus qu’à travers son fils qu’elle surprotège, prive de toute identité par une série de mensonges par omission, et isole du monde extérieur, avec la complicité du personnel du château,-et d’abord, de la chevalerie- : d’ailleurs, quand il s’en va, elle meurt. Pour Perceval, sa mère reste une obsession :il la cite constamment au début du roman (huit fois devant Gornemant qui le lui reproche), veut revenir vers elle après l’épisode de Beaurepaire et après l’épisode du Graal mais il apprend qu’elle est morte de chagrin à cause de son départ et qu’il doit payer pour ce péché (à moins qu’il faille comprendre autrement le péché, la phrase est ambiguë ;en tout cas, postérieurement aux faits, la cousine et l’ermite jugent ainsi le silence). Symboliquement, il garde les vêtements qui le rattachent à son enfance près d’elle jusqu’à ce que Gornemant l’oblige à y renoncer : on voit ainsi mises en parallèle deux formes d’éducation, féminine puis masculine.

La mère de Perceval a eu une étrange conception de l’éducation à donner à son fils. Après l’avoir tenu dans l’ignorance de toute instruction chevaleresque, amoureuse et religieuse, ce qui a pour conséquence d’en faire un nice dont on peut se moquer et de redoubler ainsi la réputation de rustres faite déjà aux Gallois à l’époque (voir p.38), elle expédie à toute allure des bribes de connaissances dans ces trois domaines.A l'heure de la séparation, la mère anxieuse essaie de discipliner l’impétuosité de son fils. Elle lui donne trois conseils et règles de conduite. Elle recommande en premier lieu à Perceval de porter assistance aux dames qui ont besoin de secours et aux pucelles sans appui, d'honοrer et de servir dames et demoisel1es, de ne rien faire qui leur déplaise. Sur ce chapitre, la « veuve-dame » est assez curieusement précise et trace une certaine ligne de démarcation : « Et si vous en priez aucune, gardez que vous ne soyez fâcheusement importun. Ne faites rien qui lui déplaise. Pucelle donne beaucoup quand elle donne un baiser. Si elle νοus accorde cela, je vous défends le surplus, si vous voulez bien 1e laisser pour moi. Et si elle a un anneau à son doigt οu une aumônière à sa ceinture et qu'elle veuille bien par amour οu par prière s’en priver pour vous, je ne vois pas de mal à ce que vous emportiez son anneau et je vous donne congé de garder l'aumônière. ».

Autre conseil : en chemin ou « en ostel » (dans une demeure, chez. quelqu'un), qu'il ne reste pas longtemps avec un compagnon sans lui demander son nom. Perceval ne sait même pas son nom à lui, et il est étonnant que sa mère oublie de le lui apprendre au moment où il la quitte pour s'élancer dans le vaste monde. Il recherchera, lui dit aussi la « veuve dame », la compagnie des « prodomes » (des hommes sages et droits, expérimentés et déjà d'un certain âge), car ils ne dorment jamais de conseils trompeurs . Enfin la mère recommande à son fils d'être pieux et d'entrer- à l'église et au moutier pour y prier Notre Seigneur. Naïvement, le valet interroge : « Mère, qu'est-ce qu'une église et un moutier? » Suit in extremis un rappel des principaux mystères de la foi, une petite leçon de catéchisme, d'un ton pathétique, consacrée au Christ, à la Passion, à la Rédemption et à l'Eucharistie .Ce passage peut laisser perplexe le lecteur : comment se fait-il que Perceval n'ait aucune idée de ce qu'est une église? Il n'y avait donc pas de chapelle ou d'autel domestique dans ce manoir solitaire, habité cependant par un assez nombreux personnel ? Aucun prêtre n’y est donc jamais venu célébrer la messe le

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