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« OEdipe roi » : l'adaptation cinématographique de la pièce antique

Cours : « OEdipe roi » : l'adaptation cinématographique de la pièce antique. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  8 Juin 2016  •  Cours  •  7 785 Mots (32 Pages)  •  1 620 Vues

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« OEdipe roi » : l'adaptation cinématographique de la pièce antique

Objectifs

• Comparer le traitement du mythe d’Œdipe dans la pièce de Sophocle et dans le film de Pasolini ;
• Comprendre les enjeux de l’analyse d’une adaptation cinématographique.

1. Les points communs

a. La représentation antique et son adaptation cinématographique

Il est important de comprendre à quoi ressemblait une représentation théâtrale à l’époque antique pour pouvoir analyser les choix visuels et sonores de Pasolini.

On suppose que l’espace scénique était divisé en deux :

  • l’orchestra, dans lequel se trouve le chœur, composé de quinze choreutes, qui chantent et dansent. Au centre du chœur, un joueur de flûte, l’aulète, les accompagne ;
  • la skéné, se trouvent les trois acteurs, qui se partagent les différents rôles de la pièce.

Le chef du chœur, ou coryphée, évolue entre les deux espaces et s’adresse au chœur comme aux acteurs. La skéné était décorée d’un seul tableau qui faisait office de décor, et représentait le plus souvent une façade de palais.

Pasolini
s’inspire de cette esthétique sans aller jusqu’à une reconstitution historique fidèle :

→ Les costumes et coiffes des personnages, avec des ailes et des coquillages, rappellent les arts primitifs ;

→ La
bande sonore du film est très travaillée. Les chants que l’on entend en voix off rappellent le chœur. Certains chants proviennent de voix enfantines (le chœur, dans la pièce de Sophocle, est composé d’enfants et de vieillards). Une mélodie à la flûte accompagne certains épisodes (comme le rêve d’Œdipe), et c’est l’instrument dont joue Œdipe lorsqu’il erre dans la Rome moderne : nous pouvons y voir une référence à l'aulète antique ;

→ La présence d’une foule nombreuse rassemblée devant le palais lors des scènes clés (l’oracle, la révélation...)
s’apparente au chœur.

b. Les points communs dans la structure narrative de la pièce et du film

La pièce de Sophocle est structurée par des parallélismes et des inversions. Le prologue et l’exodos (première et dernière partie de la pièce) se répondent fortement. Ils comportent tous deux une apostrophe aux enfants, un dialogue avec Créon et une tirade d’Œdipe.

Le film de Pasolini est
construit sur un schéma similaire : la première et la dernière partie du film, qui se situent au 20e siècle, se font écho.

2. Les différences

a. Les épisodes modifiés

• Chez Pasolini, Œdipe ne résout pas l’énigme, il tue sauvagement le Sphinx ;

• Chez Sophocle, la « peste » prend la forme d’une stérilité qui s’abat sur la ville (les plantes ne poussent plus, les femmes et bêtes n’enfantent plus). Dans son film, Pasolini montre des cadavres décomposés.
Sa représentation du mal qui endeuille la ville est plus sordide ;

• Œdipe s’exile en compagnie d’un serviteur, et
non de ses deux filles : le film ne mentionne pas les enfants qu’il a eus avec Jocaste.

b. Les épisodes ajoutés

• Pasolini met en scène l’enfance d’Œdipe et sa rencontre avec le Sphinx ;
• Le film comporte
trois scènes d’union charnelle avec Jocaste qui ne figurent pas dans la pièce.

c. L'évolution des personnages

Œdipe :
Chez Sophocle, Œdipe est coupable d’emportements et d’orgueil, il est néanmoins un sauveur, un bon roi et un père de famille aimant.
Pasolini a fait du personnage d’Œdipe
un être tourmenté, violent. La première apparition d’Œdipe adulte nous le montre trichant au jeu, et s’énervant lorsqu’il est découvert. Il fait montre d’une rage presque sauvage lorsqu’il tue Laïos, puis le Sphinx. Il a souvent peur (on le voit se mordre la main pour ne pas crier).

Chez Sophocle, Œdipe est un héros. Chez Pasolini, c’est un anti-héros.

Jocaste :
Jocaste est une femme discrète, peu présente dans la pièce de Sophocle. Au contraire, Pasolini fait de Jocaste
un personnage clé, à la fois figure de Madone et femme séductrice. De nombreux gros plans s’attardent sur ses expressions faciales, en particulier ses sourires discrets et ses regards inquiets : les éclats de joie de Jocaste sont très souvent assombris par une expression de crainte.
Chez Jocaste, le doute s’apparente plutôt à une prémonition (alors qu’Œdipe adopte une démarche logique de déduction).

Ces évolutions dans la représentation des personnages sont à rattacher, d’une part, à
l’aspect autobiographique du film selon Pasolini (le réalisateur affirme, dans une interview donnée aux Cahiers du cinéma d’août 1967 : « C’est le plus autobiographique de mes films »). D’autre part, l’importance accordée à la figure de Jocaste est à relier à l’influence des théories freudiennes sur le complexe d’Œdipe.

[pic 1]


Doc. 1.
 Pier Paolo Pasolini en compagnie de sa mère
Photo La Verde. ©Agf/Leemage

L'essentiel

Étudier une adaptation cinématographique consiste à interroger les points communs et différences entre la pièce de théâtre source et le film.

À bien des égards, Pasolini est
fidèle au texte antique, en particulier à travers ses choix esthétiques (chants et sons de la flûte, costumes primitifs, présence d’un « chœur »). Le réalisateur reprend en outre le texte de Sophocle mot pour mot dans toute la seconde moitié de son film.

Néanmoins,
il apporte également sa touche personnelle. Il rajoute des épisodes, et surtout, apporte un nouvel éclairage aux personnages d’Œdipe et Jocaste. Œdipe est un être violent et tourmenté, et Jocaste est une figure ambiguë, à la fois mère et amante.

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