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Lorenzaccio : une aventure psychologique individuelle ?

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Par   •  2 Octobre 2016  •  Dissertation  •  2 491 Mots (10 Pages)  •  755 Vues

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Littérature française

Lorenzaccio est un drame romantique écrit en 1834 par Alfred de Musset. Il traite de la société florentine du 15ème siècle, dirigée alors par le duc Alexandre de Médicis. Cette œuvre suit principalement les actes d’un personnage majeur, Lorenzaccio qui n’a qu’un but en tête : tuer le duc. On y suit l’évolution psychologique que mène Lorenzo jusqu’au moment du meurtre. Pourtant, en ne limitant la pièce qu’à un drame psychologique, ne réduit-on pas sa portée et sa richesse ? Dans ce cas, peut-on ne voir dans Lorenzaccio qu’une aventure psychologique individuelle ? Si dans un premier temps l’aspect psychologique individuel de Lorenzaccio est mis en avant, il ne faut pas pour autant occulter une portée psychologique plus large de la pièce puisque celle-ci mène une réflexion sur la condition humaine. Elle inclut de ce fait une dimension critique de la société et des domaines politiques et religieux, prônant ainsi des valeurs collectives : Lorenzaccio est donc plus qu’un drame romantique et psychologique. C’est également une pièce historique, politique et sociale.

Focalisons-nous dans un premier temps sur le personnage de Lorenzaccio, figure éponyme et principale de la pièce. Si au premier abord, Lorenzo peut sembler n’être qu’un simple jeune débauché, avide des bas plaisirs de la vie et dénué de valeurs, il se révèle au fil de l’œuvre comme ayant un profil psychologique et une personnalité bien plus complexes. La seule étude de son individualité est l’un des intérêts majeurs de la pièce, c’est pourquoi l’on peut considérer celle-ci comme représentant l’aventure psychologique individuelle de Lorenzo. Au début de l’œuvre apparaît un Lorenzo corrompu par le vice, bras droit du Duc et compagnon de débauche. Le peuple le méprise à un tel point qu’il l’a affublé d’un surnom à connotation péjorative : Lorenzaccio. Celui-ci n’aurait pu être alors qu’un libertin débauché qui cultive le plaisir de la perversion mais il n’en est rien. Musset a choisi de lui attribuer une profondeur psychologique plus intense et d’en faire un personnage protéiforme, aux limites de la schizophrénie. En effet Lorenzo se dissimule derrière un masque tout au long de la pièce, le masque du vice, de la corruption et de la perversion, ne révélant sa véritable nature que lors de la scène 3 de l’Acte 3, véritable pivot de la pièce puisque l’on passe de l’extériorité à l’intériorité de Lorenzo. Alors en pleine conversation avec Philippe Strozzi, républicain, Lorenzaccio révèle son intention de tuer le Duc, invoquant l’idée initiale de restaurer la République. On découvre alors une autre facette de sa personnalité, Lorenzino, un idéaliste républicain. Celui-ci a plongé volontairement sa vie dans le vice, a changé intentionnellement sa nature afin d’approcher le duc et de rendre son projet de meurtre plus aisé. Or, à l’approche de l’acte qu’il organise depuis des années, Lorenzo n’y voit plus grand intérêt puisque les gens pour lesquels il était prêt à commettre un meurtre ne sont pas ce qu’il pensait. La cause pour laquelle il a sacrifié sa réputation, sa pureté, ne vaut plus la peine d’être défendue. Selon lui, c’est l’Humanité entière qui est corrompue jusqu’à la moelle comme l’indique cette phrase : « l’humanité souleva sa robe et me montra […] sa monstrueuse nudité ». Le thème du masque s’inverse et c’est en réalité la vertu qui en est un, les hommes sont ou lâches ou égoïstes ou trop ambitieux : «Ce qu’on appelle la vertu, est-ce donc l’habit du dimanche qu’on met pour aller à la messe?». La corruption et la malhonnêteté ne sont pas que des caractéristiques des tyrans mais de l’espèce humaine en général : « je croyais que la corruption était un stigmate, et que les monstres seuls le portaient au front ». On observe là un Lorenzo pessimiste voire nihiliste qui n’a plus foi en la perfectibilité de la condition humaine. Il prend alors conscience que ce meurtre n’aura aucun impact et sera même inutile : nous sommes face à un futur meurtrier lucide. Cependant, si ce meurtre s’avère inutile, pourquoi vouloir tout de même le perpétrer ? D’abord par orgueil. C’est d’ailleurs l’une des premières motivations qui l’a poussé à vouloir tuer le duc : être reconnu de tous : « J'étais bon, et pour mon malheur éternel, j'ai voulu être grand. » Il énonce de grandes figures de l’Antiquité et pense qu’il entrera dans l’histoire « l’Humanité gardera sur sa joue le soufflet de mon épée ». Il se prend même pour un juge de l’humanité : «les hommes comparaîtront devant le tribunal de ma volonté ». Au-delà de cet orgueil, on remarque que le meurtre devient une nécessité pour Lorenzo. Il est le seul terme d’une alternative dont l’autre terme est le néant, le seul lien qui le raccroche encore à son ancienne vertu. De plus, son projet meurtrier est devenu autonome au point que le jeune homme éprouve du mal à contrôler ses pulsions meurtrières. « Ô ma vengeance ! qu’il y a longtemps que tes ongles poussent ! » Lorenzo est devenu une « machine à meurtre ». C’est ainsi qu’il finit par commettre ce meurtre tant attendu. Même dans la réalisation de l’assassinat on remarque qu’il est un véritable individualiste puisque tout ce qu’il entreprend, que ce soit de l’élaboration du meurtre jusqu’à l’acte, il le fait seul. Même Scoronconcolo, qui l'aide pourtant dans la mise en place de son projet, n'est pas informé de son plan exact ni de la personne à tuer. Une fois le meurtre commis, Lorenzo rapporte les faits à Philippe. Alors que l’on pourrait croire qu’il exulterait par rapport à cet événement, il n’en est rien. L'échec de Lorenzo est complet puisque le projet initial s'est soldé par un insuccès, les républicains n’ayant pas profité de la mort du duc pour instaurer la république, et qu'il s'est moralement souillé. Néanmoins en tuant le duc, le responsable de sa décadence, Lorenzo pensait peut-être retrouver sa vertu passée. Mais une fois son masque de débauché abandonné, il n’est pas pour autant redevenu l’adolescent vertueux qu’il était. Cependant cet échec n’est pas pour lui une surprise : sa cohabitation avec le vice a laissé trop de séquelles. Il s’est lancé sur la voie du vice qui est sans rémission possible et constate même en lui un certain plaisir pour ces plaisirs bas : « Le vice a été pour moi un vêtement ; maintenant il est collé à ma peau. » Avec lucidité, Lorenzo reconnaît en lui-même l'universelle médiocrité de la nature humaine. Il parait alors vide, plongé dans une mélancolie profonde : son action ne donne de

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