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Les emprunts entre reflet social et tradition dans L’Enfant du Liban du Père Mansour LABAKY

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Par   •  23 Mars 2020  •  Analyse sectorielle  •  3 268 Mots (14 Pages)  •  309 Vues

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Introduction

Son histoire est marquée par la succession, sur son territoire, de différentes civilisations. Sa géographie le place sur un carrefour entre l’Orient et l’Occident. Ses quelques dix-huit confessions religieuses réparties sur une superficie de 10 452 km2 font de lui, le pays de la tolérance et de la liberté, de la polyvalence et de la spécificité. Il s’agit de l’un des plus petits pays du monde mais parmi les plus diversifiés en culture et en langue : c’est le Liban. Ainsi, qui dit Liban dit multilinguisme. En fait, les Libanais sont voués à la pluralité des langues, ils sont « fous de langues » , elles les nourrissent intellectuellement et deviennent en quelque sorte comme le sang qui coule dans leurs veines. Dans ce pays, l’arabe est la langue nationale. Deux autres langues y sont aussi pratiquées : l’anglais et le français. Ce dernier jouit d’un statut particulier puisque c’est la langue étrangère la plus utilisée. Un sondage révélateur est réalisé par Ipsos-Stat pour le compte de la Fondation Cedrona en octobre 2008 sur un échantillon de 601 personnes dans toutes les régions du Liban montre que 38,1% des personnes s’expriment en famille en français (après l’arabe) contre 29,5% en anglais, ce qui prouve que l’anglais est surtout utilisé comme langue d’affaires .

Or, en littérature, bon nombre d’écrivains libanais ont opté pour le français en tant que langue d’écriture. C’est ainsi que Père Mansour LABAKY publie L’Enfant du Liban, en 1986, en français, aux éditions Fayard. Dans ce roman, l’insertion de la langue arabe dans le texte français est claire. Cet auteur libanais d’expression française met en exergue sa langue maternelle et, la valorise dans un texte français. Pendant la guerre civile qui a secoué le pays, Père LABAKY veut dire les blessures de son pays. Il projette ainsi l’histoire d’un jeune garçon nommé Nassim qui a perdu tous ses parents dans une guerre libanaise. Cet enfant, placé dans un orphelinat, rencontre Jad qui devient son porte-parole et son ami préféré. Ce roman livre un message sur l’amitié : du plus noir des moments de la vie peut surgir l’amour et l’espoir. Il traite d’une amitié idéale, sur fond de guerre civile, où se mêlent les doux souvenirs de la vie d’avant et l’atroce, l’insoutenable réalité de la guerre ainsi que ses conséquences tragiques.

Cette œuvre pleine d’émotion métamorphose la guerre en un jeu de langue à travers divers emprunts et calques. C’est ainsi que nous pouvons tenter de comprendre, dans quelle mesure la langue source marque-t-elle le métissage de la tradition libanaise dans L’Enfant du Liban du Père Mansour LABAKY ?

Pour répondre à cette problématique, nous analyserons, dans une première partie, les emprunts comme le reflet de la société et, dans une deuxième partie, nous mettrons en évidence les emprunts liés à la tradition culinaire libanaise.  

1. Les emprunts : un reflet social

Les langues ne sont pas isolées l’une de l’autre mais elles sont en contact par l’intermédiaire de leurs utilisateurs, à cause du voisinage, de la coexistence, des migrations ou des colonisations, phénomènes qui mènent souvent au bilinguisme. Ainsi, l’emprunt est-il le phénomène sociolinguistique le plus important dans le contact entre langues.

1.1. Les langues « de nulle part »

Un emprunt est un mot ou une expression qu’un locuteur ou une communauté emprunte à une autre langue, sans le traduire, mais en l’adaptant généralement aux règles morphologiques, phonétiques, graphiques et sémantiques de sa langue. Dans le dictionnaire Le Petit Robert (2016) la définition de l’emprunt est la suivante : « Acte par lequel une langue accueille un élément d’une autre langue ; élément (mot, tour) ainsi incorporé. Emprunts à l’anglais.  anglicisme ; aussi américanisme, canadianisme, germanisme, hispanisme, italianisme, latinisme. Le fonds primitif et les emprunts. Emprunt assimilé ; francisé ; traduit  calque. » Et le Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage (1994, Larousse) définit l’emprunt de cette façon : « Il y a emprunt linguistique quand un parler A utilise et finit par intégrer une unité ou un trait linguistique qui existait précédemment dans un parler B (dit langue source) et que A ne connaissait pas ; l’unité ou le trait emprunté sont eux-mêmes qualifiés d’emprunts. »

L’emprunt doit être clairement distingué de l’héritage qui, pour le français, correspond à l’évolution, par voie orale et selon des processus complexes, de mots latins et germaniques (fr. verre < lat. vitrum). Chaque langue est ainsi composée de mots « autochtones », qu’elle a créés ou hérités de ses racines, et de mots empruntés à d’autres langues.

Le mécanisme de l’emprunt suppose des contacts entre les langues et entre les personnes. Un emprunt est d’abord effectué par un locuteur individuel ou par un groupe ; certains sont ensuite adoptés par la langue, d’autres disparaissent.

C’est ainsi que Père Mansour LABAKY insère divers emprunts arabes (plutôt libanais) dans son roman en français L’Enfant du Liban. Ces derniers peuvent être regroupés selon leur sens et leur fonction dans le texte. En fait, l’auteur utilise des surnoms de personnes comme « Geddo(s) », « Téta(s) », « Abou », « Emm » et « Mara » pour désigner le grand-père, la grand-mère, le père et la mère d’une personne et une femme. De plus, il emploie des termes religieux montrant l’intégration de l’auteur dans la vie religieuse : « Allah », « Inchallah », « Mar » et « Abouna ». La cuisine libanaise prend également un grand espace, vers la fin du roman, lorsque Père LABAKY exploite des mots typiquement libanais pour parler de cet art : « arak », « zbib(s) », « sfoufs », « labneh », « meghleh » et « mouneh ». Et enfin, l’auteur n’a pas oublié l’emploi de certains termes se rapportant à différentes traditions libanaises : « sobhieh », « helweyneh » et « zajal ». La diversité des emprunts dans ce roman explique l’implication du Père LABAKY dans la société libanaise. Il semble attacher à sa terre et voudrait diffuser les us et les coutumes du Liban dans le monde francophone.

1.2. L’espoir de découvrir une langue étrangère

Les cinq emprunts des surnoms des personnages « Geddo(s) », « Téta(s) », « Abou », « Emm » et « Mara » marquent l’attachement à la famille libanaise. Le « geddo » et « Abou » sont le grand-père et le père qui sont considérés au Liban comme la « tête » de la famille véritable figure de la force et de la sécurité.

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