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Les caractéristiques du roman picaresque

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Par   •  4 Février 2014  •  Analyse sectorielle  •  6 219 Mots (25 Pages)  •  2 852 Vues

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HISTOIRE DE LA LITTERATURE

Les caractéristiques du roman picaresque

Valentine Castellarin

Le roman picaresque fait son apparition en Espagne au XVIème siècle avec un roman anonyme, Le Lazarillo de Tormes. Ce genre s’étend dès le XVIIème siècle à travers l’Europe, notamment de par l’impact des traductions et connaît un succès remarquable.

« Le récit picaresque est censé relater la tranche de vie, parfois de survie d’un narrateur à la première personne qui est un picaro, c'est-à-dire un pauvre, un rebut de la société. Ce protagoniste homodiégétique égrène, en une structure épisodique ouverte et parataxique, aventures et mésaventures, incidents et accidents, échecs et succès, toutes tribulations qui, pour subsister ou être intégré à la société, l’ont mis en contact, aux prises, en porte-à-faux avec une société concurrente, voire antagoniste, qu’il présente à son point de vue, sincère ou trompeur, avec des traits peu amènes, mais souvent drôles. A l’issu de son parcours, le héros peut parvenir à une position plus stable voir honorable, encore que précaire un rien, tout comme se retrouver au ban de la société, en prison même, encore isolé du reste du monde. Il lui reste à écrire, à se justifier par l’écriture, à afficher sa prétention sociale par l’œuvre littéraire qu’il s’apprête à écrire au nom de l’art ».

Pourtant cette veine picaresque est bien loin d’être considérée comme un genre indiscutable. En effet la critique n’est pas unanime sur le concept de roman picaresque et l’établissement de ses limites. Fernando Cabo Aseguinolaza dans son ouvrage El concepto de género y la literatura picaresca affirme que le genre picaresque reste une question ouverte. Certains critiques se sont d’ailleurs demandés si le genre picaresque existait vraiment. Il est probable que cette gêne éprouvée par les critiques pour délimiter un corpus stable et homogène soit due au caractère hybride du roman picaresque car il se situe à mi-chemin entre le roman d’apprentissage et le roman d’aventures. Alors pourquoi chercher à définir le genre picaresque ? Il est important ici de tenir compte du lecteur. En effet, le genre est à relier autant à l’énonciation qu’à la réception. H.R. Jauss parle à ce propos d’ « horizon d’attente » du lecteur car tout ouvrage suppose une précompréhension, ou tout du moins une pré-interprétation. En lisant un texte, nous émettons toujours une hypothèse qui guidera notre lecture et que nous serons amenés ou non à corriger en fonction des éléments rencontrés.

Alors, s’il est vrai que c’est à travers certaines caractéristiques de genre qu’un texte littéraire se présente aux lecteurs, celles-ci donnant forme à leurs attentes, au type de réception qu’ils en ont et permettant d’en interpréter le sens, quelles peuvent être les caractéristiques du genre picaresque ?

La définition d’une famille générique relève habituellement de la recherche d’éléments structuraux identiques. Mais il s’avère que les critiques ne coïncident pas dans l’établissement d’une liste d’œuvres picaresques pour le Siècle d’Or Espagnol. Pour Alfonso Rey Alvarez , le point fondamental de l’appartenance d’un roman au genre picaresque est essentiellement du domaine du point de vue du narrateur. Mais comme le fait remarquer Alonso Zamora Vicente « La clasificación peca de confundir el carácter del héroe con el arquitectura artística » . En effet en ne retenant que le protagoniste comme base d’analyse du genre picaresque au lieu de mettre en place une véritable étude structurelle, il devient difficile de déterminer des critères communs.

Les critiques Molho et Miller mettent en évidence quatre caractères qui peuvent être observés dans les romans picaresques : la forme narrative, le personnage principal, le milieu, le point de vue.

Claudio Guillén et Ulrich Wicks en retiennent respectivement huit, Didier Souiller six, Antonio Rey Hazas dix et Florencio Sevilla entre cinq et onze. D’où la difficulté à proposer une définition stable de littérature picaresque !

Après avoir pris connaissance des différents points de vue controversés des critiques visant à recourir aux ressemblances en tant que bases pour une définition générique, j’ai tenté de définir un corpus de romans picaresques qui m’ont semblé les plus représentatifs de la veine picaresque européenne et d’en dégager les constantes. S’agissant d’un travail ardu car devant porter sur la littérature européenne j’ai limité mon choix à six romans : les trois romans qui ont fait la célébrité du roman picaresque espagnol, à savoir : Le Lazarillo de Tormes, Le Gúzman de Alfarache et El Buscón et les trois romans les plus représentatifs du roman picaresque hors d’Espagne : Les aventures de Simplicius Simplicissimus en Allemagne, Moll Flanders en Angleterre, Gil Blas de Santillane en France. Je m’attacherai dans un premier temps à la structure des romans suscités et j’essaierai d’en mettre en évidence les similitudes, puis j’examinerai l’aspect sociologique du roman picaresque à travers le personnage principal et les milieux dans lesquels il évolue et enfin je traiterai le point de vue dans le roman picaresque : celui des classes dominantes et celui du picaro.

I- La structure du roman picaresque

La structure du roman picaresque est relativement linéaire. En effet, s’agissant d’un roman autobiographique, l’histoire suit le parcours de la vie du personnage principal : de l’enfance à la maturité et parfois même la vieillesse mais elle est sans cesse interrompue par des anecdotes, des rebondissements, des enchâssements qui s’insèrent dans le récit. Une étude approfondie des différents romans a permis de mettre en évidence deux types de structures communes :

- La structure bipolaire,

- La structure binaire.

1- La structure bipolaire :

Cette structure s’appuie sur la prise de conscience du personnage qui est partagé entre sa volonté d’aller vers le bien et son attirance fatale du mal. Le picaro n’est pas un être totalement amoral, il est conscient que son comportement peut le mener à sa perte mais l’attirance du mal est toujours plus forte. Le picaro traverse des périodes où il prend le temps de s’interroger sur ses mauvaises actions, il fait le choix de mettre fin à son comportement déviant mais il retombe très facilement

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