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Le roman et la vérité

Dissertation : Le roman et la vérité. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  4 Février 2022  •  Dissertation  •  2 262 Mots (10 Pages)  •  548 Vues

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DISSERTATION SUR LE ROMAN

Dans son œuvre Mauvaises pensées et autres (1942), l’écrivain Paul Valéry réfléchit sur des mauvaises, subversives pensées concernant des thèmes variés  comme l’intelligence, la littérature, l’amour, l’histoire etc. Les notes de l’auteur réunies dans cette œuvre montrent des réflexions profondes et parfois philosophiques à propos du «poids» de la vérité dans les différents domaines. Valéry se questionne dans son œuvre : «Ce que nous nommons certitudes pourraient bien être nos doutes, mais multipliés par l’assentiment du plus grand nombre, et ainsi parés des prestiges du vrai. Mais au-delà de ces convictions pratiques, qu’en est-il de la vérité ? »  et il se répond ainsi « …elle nous échappe généralement : on oublie trop qu’elle ne suit pas la forme de nos désirs ».                                                                                                    Dans la même œuvre, Valéry écrit à propos du roman : «le roman voit les choses et les hommes exactement comme le regard ordinaire les voit. Il les grossit, il les simplifie, etc. Il ne les transperce, ni les transcende». Il semblerait alors que la vérité, ne suivant pas la forme de nos désirs, n’habiterait pas dans le regard de l’homme vers le monde et les choses. Le regard ordinaire de l’homme serait-il alors considéré comme mensonger et non objectif et transparent.                           Et si le regard ordinaire de l’homme serait donc « mensonger », est-ce que le roman le serait aussi ? Le roman, relèverait-il seulement un coté mensonger ou contiendrait aussi une partie de vérité ? N’est-il pas le roman, un «mentir-vrai»  comme suggérait Louis Aragon ? Comment ces deux extrêmes de «vérité» et «mensonge» trouveraient-ils leur synthèse dans le genre du roman ? À travers quels techniques d’écriture, l’auteur du roman parviendrait-il à situer sur le même plan vérité du roman et mensonge romanesque ?                                                                                    Nous analyserons dans notre réflexion le poids que la vérité conquiert auprès du genre romanesque. Ainsi, nous verrons dans un premier temps le coté véritables dans les romans, dans un deuxième moment nous concentrerons notre attention sur l’aspect mensonger et fictif des romans. Enfin, dans une troisième et dernière partie, nous observerons, de plus près, l’habilité du romancier de synthétiser les deux caractères différents de «mensonge» et «vérité» dans son œuvre qui est le roman.

Premièrement, le roman part de la réalité que le romancier voit avec ses propres yeux, l’histoire fictive du roman est presque toujours ancrée dans des élément qui appartiennent à la réalité, une partie de vérité est donc toujours présente. Il existe une vérité dans tout roman, parfois assez évidente, autrefois présente de forme presque cachée, représentée par le romancier seulement à travers quelques détails, grâce à des références à faits historiques réels, ou à des lieux, des personnes, des évènements qui ont vraiment existés. Guy de Maupassant disait à ce propos, dans la préface de Pierre et Jean, : « Raconter tout serait impossible, car il faudrait alors un volume au moins par journée, pour énumérer les multitudes d’incidents insignifiants qui emplissent notre existence. Un choix s’impose donc ».                                                                                                            Nous retrouvons cette première vérité «presque cachée» dans les inégalités de la société parisienne qu’on voit dans le roman Le Père Goriot (1834)de Honoré de Balzac ou dans l’inégalité dans les romans de Victor Hugo, surtout dans Les Misérables(1862). Même Madame Bovary(1856) de Gustave Flaubert est inspiré d’une histoire vraie, un fait divers sur une femme qui se suicide en Normandie ou La Boule de Suif (1880) qui se passe après la défaite française de 1870 et qui s’inspire à un fait divers pendant la guerre de 1870.                                                                 Cependant, la vérité dans le roman peut aussi assumer un rôle fondamental, par exemple dans les romans réalistes. Les romanciers réalistes se définissent en effet par leur volonté d’exprimer la réalité d’une manière fidèle et non idéalisée, donc une reproduction du réel assez véridique. Le mouvement littéraire réaliste nait comme réaction au romantisme et au symbolisme et la réalité doit avoir désormais une place dans les œuvres littéraires. Un exemple très célèbre de ce mouvement est La Comédie Humaine (1830-1856) de Honoré de Balzac, précurseur du réalisme, a pour représenter le réel tel qu’il est et de transcrire dans ses textes des réalités qui n’avaient auparavant pas leur place dans le roman. Balzac prône de manière quasi scientifique (comme Zola plus tard) de reproduire à l’écrit la réalité de son temps (préface de la Comédie Humaine). On aperçoit dans les romans réaliste une attention scrupuleuse aux détails. Mais, un romancier ne dispose pas de toutes les connaissances nécessaires sur un sujet et pour élaborer un roman plaisant pour le lecteur, il se base sur le réel pour inventer une histoire et après il ajoute son invention.

Effectivement, le roman ne se base pas que sur la réalité, étant le component fictif propre au genre littéraire du roman. Le roman, comme le regard ordinaire de l’homme, n’est pas une « mimesis » parfaite, une reproduction parfaite de la réalité. Il y a dans le roman, comme dans le regard ordinaire, une déformation de la réalité telle qu’elle est. Nous pourrions ajouter que dans le cas du roman, il s’agit d’une déformation volontaire de la réalité, alors que le regard ordinaire déforme de manière involontaire la réalité. Le roman est par nature « fictif », c’est-à-dire un lieu d’invention et de création d’un monde à partir de celui qui nous connaissons.                                                        Cette nature fictive du roman est bien connue par les romanciers. Le genre romanesque est caractérisée par la fiction narratologique donc par la création d’une version «fausse» du monde qui nous entoure. Par nature, le roman ne doit pas représenter le monde tel qu’il est. C’est un exercice de style. On le voit par exemple dans un extrait d’une lettre de Gustave Flaubert à Louise Colet du 16 janvier 1852 : «  Ce que je voudrais faire, c’est un livre sur rien, un livre sans attache extérieure, qui se tiendrait de lui-même par la force de son style » . Don Quichotte de Miguel de Cervantès peut aussi bien représenter ce mélange entre réalité et fiction propre au roman. Il s’agit d’un roman à la fois médiéval et roman de l’époque alors naissante( XVIIe siècle) où l’on retrouve l’exemple d’un homme qui vit dans et grâce à son imagination. Don Quichotte aime tellement les histoires qu’il retrouve dans les romans de chevalerie qu’il finit pour façonner sa réalité quotidienne comme celle des romans qu’il a lu. Son désir « romanesque » de vivre transforme son monde dans un monde des romans… Il voit dans le moindre auberge un château enchanté, prend les filles pour de belles princesses et les moulins à vent pour des géants. Il fait même d’une paysanne des alentours de sa demeure sa « Dulcinée du Toboso » et lui jure amour et fidélité. Don Quichotte crée son propre monde. Emma Bovary fait la même chose, elle crée un monde imaginaire à partir des pages des romans qu’elle lit. Elle adore lire, et quand son mari Charles Bovary s’absente pour aller travailler, elle se plonge dans les infinis mondes possibles et imaginables qu’elle retrouve dans les romans qu’elle lit. Elle crée sa propre réalité pour s’enfuir d’un quotidien qu’elle n’aime pas. Il y a dans ces deux exemples de roman une double fiction : la première crée par le romancier en écrivant le roman et une deuxième crée par les personnages de Emma Bovary et de Don Quichotte en imaginant un nouveau monde.

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