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Le roman

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Par   •  13 Janvier 2019  •  Cours  •  2 731 Mots (11 Pages)  •  288 Vues

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LET - ROMAN - N. PIEGAY-GROS

Introduction

Intro

  • MAUPASSANT écrivait dans Pierre et Jean « le critique qui après Manon Lescaut, Paul et Virginie, Don Quichotte […] etc., ose encore écrire : « ceci est un roman, et cela n’en est pas un » me parait doué d’une perspicacité qui ressemble fort à de l’incompétence ».

  • TOUTE ENTREPRISE qui viserait à définir le roman est hasardeuse : elle serait le fait d’un esprit faux qui n’entend pas ce qui fait la spécificité du genre : son indétermination.

  • TOUTES les définitions que l’on a pu donner du roman ont le mérite de mettre en avant une des spécifiés essentielles du genre mais aucune ne suffit à rendre compte de son immense diversité et plasticité. 
  1. Un genre indéterminé

On essaiera donc de montrer son infinie capacité de renouvellement, en s'intéressant aux jugements et discours sur lui, mais aussi aux questions de sa finalité et son éventuelle utilité.

La dynamique du roman est liée à la critique de ceux déjà écrits et au soupçon sur les précédentes définitions du genre. Repoussant encore ses frontières, nous nous intéresserons au romanesque, y compris hors du roman : y voir un impérialisme ? Ou à l'inverse, le roman serait-il le lieu naturel où s'exprime le besoin de rêver et sublimer son existence, expression archaïque d'une nécessité anthropologique ?

La tentation fut grande de chercher le PGCD du genre. Si les premières définitions ont mis l'accent sur les thèmes (« [les] romans sont des fictions d'aventures amoureuses », préface de Zaïde, Mme de Lafayette) aucun sujet n'en est exclut, c'est même par excellence selon la modernité le genre sans sujet. La longueur – pourtant variable – le distingue de la nouvelle ou du conte. Il y a de l'artifice à en distinguer forme et contenu, car ce qui y importe sont non les idées de l'auteur, mais sa façon de voir le monde.

On peut vouloir établir la typologie sur les statuts des personnages, piliers du roman jusqu'au Nouveau Roman. Thibaudet distinguait romans actifs – isolant une crise, peinture de l'époque dans sa complexité – et passifs – centrés sur un personnage, destin individuel. Freud définit romans « égocentriques », moi est acteur, et « excentriques », où le héros est spectateur. La diversité du genre explique aussi la grande diversité de ses formes, sa cohérence étant très liée au sujet développé. Le roman peut être pensé selon le modèle dramatique (Hugo), musical (Flaubert), poétique (Sarraute), ou même cinématographique. Le refus moderne d'une composition linéaire (Cf le chemin stendhalien) donne l'impression de fragmentation. Dans A la recherche du temps perdu, la question du roman n'est jamais posée, point aveugle de la recherche : le roman est autre, « l'autre de tous les genres » (Quignard, texte XXXVII). Il faut donc toujours très attentifs aux métaphores pour caractériser le roman, identité en mouvement.

On retrouve cette diversité sur le plan énonciatif : première ou troisième personne, narrateur personnage ou témoin de l'histoire, se tenir en marge du récit ou l'interrompre, singer l'énonciation d'autres genres (historien, autobiographe, diariste), Dieu ou s'effaçant derrière la polyphonie des personnages (roman épistolaire) … On peut se demander si cette force d'appropriation et d'assimilation ne rend pas caduque la définition générique.

Déplaçons le propos : raconte-t-on pour peindre un monde idéal ou représenter la réalité ?L'opposition est trop massive, plutôt deux pôles aimantant l'histoire du roman. On peut articuler POV diachronique et synchronique :  voir le mouvement comme balancier moteur du genre ou tension dans un courant/une oeuvre.  Bakhtine a distingué deux grands courants à l'origine du roman : le premier (paradigme du roman de chevalerie) se caractérise par une clôture, pureté littéraire, le second, plus parodique, veut intégrer les discours environnants (paradigme Don Quichotte ou Rabelais). Peu à peu, le second va prédominer à partir du XVIII et surtout XIX siècle. (texte XXXIII et « Dialogisme », VM). Le critique canadien Northrop Frye distingue entre « novel » (roman réaliste) et « romance » (roman romanseque). Le novel a remporté le succès au XIX : c'est en se défaisant de sa part de merveilleux que le roman a acquis ses lettres de noblesse. Le but n'est plus de conter mais de décrire, rendre un objet dans toute sa réalité. Le roman romanesque, jugé peu sérieux, est refoulé. Marthe Robert distingue le roman du bâtard (novel) au roman de l'enfant trouvé (romance). (texte XIII). Aron Kibédi voit dans tout roman un « antniroman » (« Romance », « Antiroman », VM). La critique propose de nommer roman tout ce qui conteste ou parodie le roman traditionnel. Ici encore, on voit la tension entre les deux pôles. La remise en cause du roman romance, sa parodie, donne le roman réaliste. Le Nouveau Roman, contestant les deux premiers, se veut non mimétique et sans message ni connaissance à apporter (Robbe-Grillet et Sarraute, textes XXXI et XXXII). Schématique, la ligne d'opposition permet de croiser approche théorique et historique, et de faire sa place à la catégorie problématique du romanesque, registre – comme le tragique ou le comique – dérivé d'un genre non circonscrit à ses bornes mais aussi tension ou plutôt tentation du roman, qui se légitime en refoulant sa part romanesque pour se présenter comme propre à délivrer un savoir.

  1. Savoirs romanesques

Longtemps cantonné aux enseignements moraux, par lesquels on justifiait le choix d'un genre maintenu en suspicion, il prétend délivrer une maitrise des phénomènes sociaux et une voie pour les déchiffrer (Zola, texte III), tous les discours de connaissance ont été déterminants sur la légitimation du genre, alors que ses détracteurs dénoncent le caractère fallacieux du savoir délivré. Sa libido sciendi explique sa capacité à absorber tous les discours. La Comédie Humaine veut rivaliser avec les discours scientifiques contemporains (Balzac, texte II). La Semaine Sainte maîtrise parfaitement le vocabulaire de l'art de ferrer les chevaux. D'où sa propension à la digression, son savoir est infini. Le savoir délivré par le roman, comme l'a noté Descombes, est « l'extraversion », ce savoir n'apparaît qu'incarné par des personnages, des évènements (texte IV). Cela révèle le goût essentiel de la poétique romanesque : la domination du concret, qu'il soit héroïque, sentimental ou réaliste. Cela peut susciter une ampleur du détail, qui selon Baudelaire, distingue le roman de la poésie.

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