Le personnage de Jocaste dans Œdipe Roi, Sophocle.

Le personnage de Jocaste dans Œdipe Roi

Les mythes sont des récits qui se veulent explicatifs et fondateurs d'une pratique sociale. Ils proposent une explication pour certains aspects fondamentaux du monde et même parfois de la société qui les diffuse. C'est ainsi que Sigmund Freud, psychanalyste Autrichien a pu argumenter un aspect psychologique courant dans notre société : Le complexe d’œdipe.

Œdipe Roi est une tragédie de Sophocle, grand dramaturge grec né en 496 avant JC et mort en 406. La tragédie est un genre théâtral ayant connu ses débuts au Ve siècle avant JC, à l'époque de la Grèce Antique. Elle nous conte l'Histoire de personnages de hauts rangs dont le destin est remis aux mains des dieux et qui le plus souvent meurt. C'est ce que l'on appelle la fatalité et nous retrouvons donc cette notion au sein de l’œuvre Œdipe Roi. Celle ci nous narre l'Histoire d'un Homme, parricide et auteur d'inceste sans le savoir dont le destin bascule au fur et à mesure de la trame. Afin de poursuivre au mieux notre étude nous nous attacherons à un second document en titre de comparaison, inspiré de la tragédie Antique de Sophocle et plus particulièrement du mythe d’œdipe : Œdipe roi (Edipo re) est un film italien sorti en 1967 et réalisé par Pier Paolo Pasolini.

Nous chercherons donc à comprendre comment apparaît le personnage de Jocaste dans la pièce et dans le film. Nous découvrirons dans un premier temps ce personnage emblématique à travers les deux œuvres présentées puis nous analyserons les positions différentes rencontrées vis à vis de l'inceste dans celles-ci.

Pour commencer, nous constatons qu'une présence très variable du personnage de Jocaste se distingue d'une œuvre à l'autre. En effet, dans les tragédies traditionnels les femmes semblent être des mères désolées, elle jouent presque un second rôle dans l'ombre de leur mari. Elles sont considérées comme des « faibles » femmes dans l'incapacité de s'opposer aux décisions de l'autorité masculine. A contrario, nous pouvons constater dans l’œuvre de Sophocle le rôle déterminant et surtout révolu de la femme tragédienne que nous apporte Jocaste. L'importance des décisions de celle ci débute avec son premier époux Laïos dans l'accord commun de l'abondant de leur enfant, le futur Œdipe. Par la suite, elle est de bon conseil puisqu'elle sait calmer les colères d’Œdipe ; c’est ce que rappelle le Coryphée aux vers 631-633 « Mais je vois Jocaste sortir justement du palais. Il faut qu’elle vous aide à régler la querelle qui vous a mis aux prises », ce qu’elle fait aussitôt. Elle obtient également de lui qu'il ne tu pas Créon lors de la révélation de l'oracle Tirésias : « Au nom des dieux, Œdipe, sur ce point-là, crois-le. Respecte sa parole – les dieux en sont garants – respecte-moi aussi, et tous ceux qui sont là. » (vers 646-648). Elle est la confidente à qui Œdipe révèle ses angoisses. « Jocaste […] Mais moi aussi, ne mérité-je pas d’apprendre ce qui te tourmente, seigneur ? Œdipe : Je ne saurai te dire non : mon anxiété est trop grande. Quel confident plus précieux pourrais-je donc avoir que toi, au milieu d’une telle épreuve ? (vers 769-773) » Nous pouvons voir ici que les deux personnages partagent un amour et une tendresse réciproques. Jocaste se trouve aux côtés d’œdipe pendant presque toute l'enquête de sa vie et surtout le réconforte sur la faillibilité des oracles : «Va, absous- toi toi- même du crime dont tu parles, et écoute- moi. Tu verras que jamais créature humaine ne posséda rien de l’art de prédire. Et je vais t’en donner la preuve en peu de mots. Un oracle arriva jadis à Laïos, non d’Apollon lui-même, mais de ses serviteurs. […] C’était bien pourtant le destin que des voix prophétiques nous avaient signifié ! De ces voix-là, ne tiens donc aucun compte. Les choses dont un dieu poursuit l’achèvement, il saura bien les révéler lui-même. » (vers 708-725) et plus loin « Désormais en matière de prophéties, je ne tiendrai pas plus compte de ceci que de cela. » (vers 858), à savoir la prophétie faite à Laïos et celle faite à Œdipe.

Pour poursuivre, dans l’œuvre de Pasolini, Jocaste est interprétée par Silvana Mangano qui est non seulement la mère de Pasolini dans le prologue, Suzanna Pasolini mais également Jocaste, l’épouse-mère d’Œdipe dans la partie mythique. Nous pouvons voir que Jocaste est quasiment omniprésente, depuis sa première apparition devant les murs de Thèbes. En effet, nous la retrouvons dans le plan la montrant dans la chambre, elle écoute les propos de Tirésias, de Créon et d’Œdipe. Elle est aussi présente dans le regard d’Œdipe qui lève les yeux vers la fenêtre de la chambre, nous pourrions supposer que celui ci se rassure de la compagnie de sa femme, ou bien quand elle se trouve actrice dans de véritables scènes comme celles dans la chambre nuptiale ou dans le jardin. Malgré cela, nous pouvons relever que la majeure partie du temps elle ne parle pas, seuls ses regards et ses mimiques apparaissent comme sa forme de langage que l'on pourrait même qualifier de plus expressives, plus « parlante » que de véritables échanges linguistiques. Jocaste ne parle effectivement qu’à la 79ème minute du film soit un peu plus de 28 minutes après sa première apparition. Nous pouvons dire qu'elle n’est donc présente que dans sa relation personnelle à Œdipe. De plus, dans la querelle entre Œdipe et Créon, Sophocle la faisait intervenir directement pour apaiser les deux hommes tandis que dans le film elle écoute les deux hommes depuis son lit sans intervenir.

Dans le film de Pasolini, il est tout de même important de relever un second aspect primordial dans la compréhension du personnage de Jocaste. Celle ci est en effet reine de Thèbes, on la voit deux fois aux portes de la ville avec ce statut, la première fois pour accueillir le vainqueur du Sphinx, et la deuxième fois alors qu’elle s’apprête à aller prier les dieux et qu’elle voit le berger de Corinthe. Mais pendant la plus grande partie du film on la voit restreinte dans un cadre et un domaine féminin à travers la chambre, seule ou avec son époux mais aussi dans le jardin avec ses servantes quand elles jouent. Même si Jocaste se trouve être reine de Thèbes il n'y a pas de pouvoir politique apparent, sans oublier bien sûr le fait que c'est tout de même grâce à elle qu'Œdipe se voir hériter (sans prendre en compte qu'en tant que fils de Laios le trône lui été légitime mais celui ci l'ignore à cet instant de la tragédie) le statut de roi de Thèbes, bien que

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