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La mulatresse solitude - Explication Roman

Commentaire d'oeuvre : La mulatresse solitude - Explication Roman. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  26 Janvier 2023  •  Commentaire d'oeuvre  •  4 656 Mots (19 Pages)  •  573 Vues

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Le roman La Mulâtresse Solitude est l’un des plus grands romans de résistance à l’esclavage, et un hommage au personnage historique Solitude, qui y prend vie sous la plume du militant noir André Schwarz-Bart en 1972. Il est structuré en deux parties : la première, « Bayangumay », retraçant la vie de la mère de Solitude avant sa naissance ; et la seconde, « Solitude », qui se focalises sur les aventures du personnage éponyme.

Il s’agit de se demander dans quelles mesures cet ouvrage révèle l’héroïne Solitude en tant que fanm doubout ?

Dans cette optique, il convient de rendre compte des épreuves de la vie de Solitude (I) pour témoigner de sa résilience et de son héroïsme (II), qui attestent son statut de fanm doubout.

I - Les épreuves de la vie de la mulâtresse Solitude

En premier lieu, le plus grand obstacle à la vie de Solitude est sa condition d’esclave mulâtresse, aboutissant à son rejet à la fois par la communauté noire et par la communauté blanche.

La Mulâtresse Solitude, de son vrai nom Rosalie, est une femme métisse originaire d’une première génération d’esclaves guadeloupéens. Elle est issue de la Pariade, série de viols se déroulant sur le bateau négrier pendant la déportation des esclaves aux Amériques. En outre, elle est née d’un père blanc, colon, et d’une femme noire, esclave.

Son statut d’esclave en fait, comme tous les autres personnages noirs du récit, une femme déshumanisée. A titre d’illustration, elle est tout d’abord vendue de propriétaires en propriétaires. L’histoire fait clairement figurer les dates auxquelles elle subit ces changements de propriétaires : « Vendue et livrée le 8 février 1784 à Basse-Terre » (page 82). Elle est par la suite vendue à Pointe-à-Pitre le 23 août 1787, où elle est esclave jusqu’à la révolution de 1795 (page 85), avant de se faire capturer pour travailler dans une plantation : « A ce moment, Solitude tendit le cou et le nœud se referma sous son menton » (page 94). Ces énonciations de situations font du roman un récit historique, qui précise bien le contexte esclavagiste duquel il est imprégné. En outre, de propriétaires en propriétaires, elle subit les atrocités de l’esclavage, notamment chez son premier maître : « M. Mortier fit donner un coup de rasoir sous la langue de l’enfant » (page 70).

En tant qu’esclave, la déshumanisation de Rosalie passe par des jeux de noms et d’appellations, qui s’étendent à tous les personnages noirs et esclaves du récit.

Son nom « Rosalie » lui vient ainsi d’une esclave qui portait ce nom alors que le système du fichier perpétuel était en place dans sa plantation : les noms sont attribués aux nouveau-nés à la mort des esclaves. En outre, elle n’est pas unique, et fait partie d’une chaîne sans fin, porteuse de cette identité jusqu’à ce qu’une nouvelle Rosalie prenne sa place à sa mort. Cette organisation s’apparente à celle d’un bétail ou d’un troupeau, et renforce la déshumanisation faite des esclaves. On retrouve dans cette optique le champ lexical déshumanisant et d’ordre animalier tout au long du roman pour désigner les esclaves : « forces » (page 49) ; « capital indéniable » (page 66), « femelle » (page 67), « créature » (tout au long du roman, notamment pour désigner Rosalie), « objet » (page 70), « troupeau » (page 83).

Cette assimilation souligne bel et bien que Rosalie est prisonnière de son statut d’esclave dès la naissance. Mais au-delà de son statut d’esclave, c’est son métissage qui représente dans le récit un fardeau qu’elle va devoir porter tout au long de sa vie.

Dès sa naissance, son entourage semble la considérer comme une aberration : les mulâtres ont mauvaise réputation dans les plantations, méprisés en raison de leurs incohérences et considérés comme des créatures étranges. Le vocabulaire énigmatique que sa mère emploie pour la décrire semble ainsi désigner une apparence douteuse et empreinte d’ambiguïtés : « Les enfants de Pariade avaient souvent les traits qui se contrariaient, filaient dans tous les sens, des sourcils hésitants, des yeux entre deux mondes » (page 50) ; « êtres jaunes qui servaient d’intermédiaire entre les Noirs et les Blancs » (page 51) ; « Un œil sombre et l’autre verdâtre, et qui semblait chacun appartenir à une autre personne » (page 50). En outre, sa description physique fait apparaître Rosalie comme un personnage irrégulier : ses traits contradictoires de mulâtresse sont très souvent déplorés par ses pairs, qui ne la reconnaissent pas comme des leurs.

Dans la même optique, c’est encore par des appellations que passe sa différenciation. Des surnoms péjoratifs liés à sa qualité de mulâtresse sont utilisés pour la désigner tout au long du roman : « Deux-âmes » (page 71), « Sapotille » (page 50), « poings jaunes » (page 57), « fiente jaune » (page 97), « métive » (page 68). Ces appellations servent d’encrage principal au traitement que subit la femme en raison de son métissage tout au long du récit.

Ainsi, sa condition de mulâtresse entraine qu’elle n’est acceptée ni chez les Noirs, ni parmi les Blancs. La métaphore du « cordon ombilical » mal sectionné (pages 68 et 69) revient à plusieurs reprises pour désigner les origines noires chez les mulâtres ; leur lien persistant avec leurs racines Africaines. « L’odeur de négresse » (page 70) est également un élément qui la rattache à ses origines noires – d’ailleurs déploré par les blancs, en dépit de son appartenance partielle à la communauté blanche.

En outre, elle ne peut faire abstraction ni de ses origines blanches, ni de ses origines noires : elle n’est pas acceptée chez les premiers et rejetée de chez les seconds. Un passage du récit illustre cette ambivalence : alors que les rebelles noirs libèrent les esclaves de l’Atelier de Baie-Mahault où la jeune fille est esclave, Rosalie tente de rejoindre le groupe. « Qu’est-ce que tu viens faire par ici, espèce de fiente jaune ? » (Page 98). La jeune femme n’est pas acceptée dans le groupe en raison de son métissage, et la suite du récit précise que « Seuls étaient demeurés les citoyens mulâtres » (page 98). C’est bien là la preuve que son métissage s’est souvent mis au travers de la route de Rosalie.

En second lieu, elle a eu à surmonter le tumulte que fut sa relation avec sa mère.

Dans le roman de Schwarz-Bart, l’histoire de Solitude est profondément ancrée dans celle de sa mère. De prime abord, ce lien se traduit par la séparation du roman en deux parties, la première (page 1 à 47) mettant en scène la jeunesse

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