Iphigénie: Le Dilemme Du Roi

D’une part, Agamemnon subit un dilemme moral; il est un roi qui doit faire face à ses obligations. Les dieux s’attendent à ce qu’il sacrifice Iphigénie, la princesse qui est sa fille, pour que les vents reviennent. En effet, Agamemnon est accablé par le poids de ses obligations. Les vers 10 à 12 rendent compte de ce destin exemplaire qui est le sien : «Heureux qui satisfait de son humble fortune, libre du joug superbe où je suis attaché, vit dans l'état obscur où les Dieux l'ont caché!» La métaphore introduite par le nom «joug», qui signifie «pièce de bois que l'on fixe soit en avant, soit en arrière des cornes du bœuf pour y attacher un dispositif d'attelage» (TLFI) présente le roi comme étant une bête de somme attachée à son travail, à sa fonction royale. Aussi, le terme «joug» symbolise la domination, l'esclavage du souverain prisonnier des désirs des dieux qui sont ses tyrans. On observe que l’effet produit est celui d’un poids important sur les épaules de l’homme; il perçoit que sa fonction ne lui accorde aucune liberté. Il devra consentir au sacrifice de la princesse pour servir les dieux et aller à la guerre. Bien qu’Agamemnon ait peine parfois à assumer son titre, cet homme a une très grande soif de pouvoir : c’est ce qui motive ses actions, lorsqu’Ulysse l’entretient quant à la bataille prochaine, Agamemnon se laisse séduire par les propos de celui-ci qui lui rappelle la gloire promise par l’oracle : «[Ulysse] me représenta l’honneur et la patrie, tout ce peuple, ces rois à mes ordres soumis, et l’empire d’Asie à la Grèce promis.» (v.73-76) Nous retrouvons dans cet extrait une énumération de tous les éléments qui motivent la décision du roi de sacrifier la princesse. Les termes «honneur», qui renvoie à «un principe moral d'action qui porte vers une conduite conforme (quant à la probité, à la vertu, au courage) à une norme sociale et qui permette de jouir de l'estime d'autrui» (TLFI), et «empire», nom auquel correspond «un régime, forme de gouvernement caractérisé par la présence, à sa tête, d'un empereur qui possède généralement tous les pouvoirs» (TLFI), ont une forte connotation positive liée à l’orgueil du souverain. La gradation aussi présente dans ces vers accentue la gloire et le nombre d’individus qui dépendent de sa décision et qui bénéficieront de la victoire sur Troie. On comprend donc les raisons pour lesquelles Agamemnon doit accepter le sacrifice malgré la difficulté du choix qu’il a à faire. Dans le même ordre d’idées, on observe aux vers 79 à 82 l’orgueil qui caractérise Agamemnon et qui le poussera à consentir à la mort d’Iphigénie : «Moi-même […] charmé de mon pouvoir, et plein de ma grandeur ces noms de roi des rois, er de chef de la Grèce chatouillaient de mon cœur l’orgueilleuse faiblesse.» La métaphore introduite par le verbe «chatouiller», qui signifie au sens figuré «flatter une personne ou certains de ses penchants par d'aimables paroles ou attitudes» et au sens propre «procurer une sensation de satisfaction et de plaisir», rend compte de la complaisance du roi face à son statut, à ses titres, à son pouvoir. Il est satisfait de se voir ainsi décrit par Ulysse. Sa grandeur sera louangée s’il sacrifie sa fille. Le parallélisme du vers 80 présente l’orgueil démesuré du souverain et sa soif de pouvoir.

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