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Etude de quelques incipits de Zola

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Par   •  29 Mars 2016  •  Commentaire de texte  •  1 921 Mots (8 Pages)  •  950 Vues

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Étude de quelques incipits de Zola

La fortune des Rougon-Macquart

« Lorsqu’on sort de Plassans par la porte de Rome, située au sud de la ville on trouve, à droite de la route de Nice, après avoir dépassé les premières maisons du faubourg, un terrain vague désigné dans le pays sous le nom d’aire Saint Mittre. »

L’incipit permet  de présenter la place. Le mélange des lieux réels et irréels est gage d’une volonté totalisante. Le personnage tout comme le lecteur évoluent dans le même mouvement de découverte des rues de la ville. Le pronom personnel en fait écho aux opérateurs d’existence (« on sort », « on trouve »). L’impersonnel introduit le regard d’un être animé et sa participation à l’action. Il peut s’agir de tout le monde et de n’importe qui à la fois comme si le lecteur recevait une réponse après avoir demandé son chemin. Il en ressort une technique propre aux incipits de Zola par le fait de supposer un avant texte, une histoire avant le texte. D’où une action coupée à laquelle le lecteur est intégré.

« Outre les références au hors texte et les topoï, les renvois à un avant texte hypothétique constituent une caractéristique importante de l'amorce naturaliste […].Un narrateur implicite ou un narrateur explicite homodiégétique prend alors la parole et fait débuter le récit in medias res, soulignant le « toujours-déjà-la » de l'histoire par des marques d'antériorité telles que : noms propres supposés connus, renvois anaphorique, situations narratives de continuité, temps verbaux évoquant une antériorité, références discursives et intertextuelles ( rappel, souvenirs) et un narrateur et/ou narrataire préexistant au texte. »p 301 VAN TOOREN, Marjolein, Le premier Zola : naturalisme et manipulation dans les positions stratégiques des récits brefs d’Émile Zola, Éditions Rodopi B. V., Amsterdam,1998

  1. La curée

« Au retour, dans l’encombrement des voitures qui rentraient par le bord du lac, la calèche dut marcher au pas ».

L’incipit débute par le GND « au retour » qui implique un cadre présupposé connu. Les personnages comme le lecteur sont placés dans l’attente d’être informés. La calèche, métonymie des chevaux fait ombre aux personnages qui s’y trouvent et qui doivent attendre pour rentrer. Le lecteur rentre directement dans l’action. Le complément circonstanciel d’espace-temps « au retour » a une forme définie, mais pour qui ?, pour les personnages qui subissent l’action. On plonge alors au cœur de la conscience des personnages et des dialogues à suivre. Les deux compléments antéposés par rapport au sujet ont un effet de contraste. « Au retour » permet une plongée dans la conscience car spécifique aux personnages. Après « dans l’encombrement », il y a un recul en arrière par le retour des voitures et une vision extérieure. La juxtaposition des cadratifs déplace le champ de vision créant un contraste dans une vision panoramique. Le narrateur gomme la présence des personnages qui se trouvent  dissimulés derrière le véhicule. On ignore alors si les propos énoncés sont ceux d'un personnage ou ceux du narrateur rapporteur.

« Le paradoxe de ce type de texte est que, alors que le discours direct est censé réduire au minimum la distance avec le lecteur par le gommage de la source énonciative du narrateur, cette distance avec le personnage est concrétisée par l'impossibilité où nous sommes d'accéder à leurs pensées. Cette proximité énonciative, couplée à une forte rétention d'informations sur les pensées du personnage, contribue à cette impression d'étrangeté ressentie par le lecteur. D'une part, le personnage est là, sans intermédiaire, et d'autre part, il reste opaque. »P109-110 Rabatel, Alain, L'introuvable focalisation externe. De la subordination de la vision externe au point de vue du personnage ou au point de vue du narrateur dans Littérature, N°107, 1997. Récits anterieurs. pp. 88-113. Persé [en ligne]

Le complément est intégré au sémantisme du SV « marché au pas » et déterminé par « l’encombrement ». La relation du prédicat « marché au pas » et le circonstant montre un rapport sémantique « sous l’effet de ». Le processus d’existence par extraction d’un élément (ici la calèche) d’un ensemble pluriel (des voitures) est une forme d’anaphorisation des voitures (du SND au SNI) où la calèche en fait partie. Un élément est dérivé de l’autre créant un arrière plan et un premier plan. Un élément particulier est dérivé d’un antécédent pluriel. Ce système d’anaphore associative permet d’introduire des SND alors que c’est la première fois qu’on les voit. Il y a alors un double effet de zoom, d’une part le rapprochement entre un arrière plan et un premier plan à l’imparfait et au passé simple ; d’autre part, l’extraction existentielle et identificatrice des voitures et de la calèche.

  1. Le ventre de Paris

« Au milieu du grand silence », et dans le désert de l’avenue, les voitures de maraîchers montaient vers Paris, avec les cahots rythmés de leurs roues, dont les échos battaient les façades des maisons, endormies aux deux bords, derrière les lignes confuses des ormes. »

L’incipit présente un lieu réel, une scène de nuit à l’aspect pictural. Les voitures spécifiées, celles des maraîchers, évoluent dans un décor nocturne et bruyant. Le lecteur plonge au cour d’un Paris se réveillant.

Le nom propre est au centre de la phrase. La personnalisation du cadre par l’expression dynamique qu’insuffle le SV « montaient vers Paris » est créditée de nombreux compléments circonstanciels. La valeur de vérité des propositions énoncées ne vaut que dans le cadre défini. Il s’agit d’un élément tangible, les éléments qui en découlent en sont l’écho. La portée des cadratifs (initial et final) clôt un cadre d’ensemble. Ils s’incluent les uns aux autres par des prépositions qui obligent le lecteur à suivre la progression visuelle et sonore de la scène.

L'incipit est alors représentatif d'une organisation d'ordre référentiel où la modalité, le temps, les personnes et les lieux servent à donner un sens et une intention au texte. Il est ouvre les liens avec la narration à venir. Pour Ewa Lenart : « l'organisation d'un texte long est régie par une quaestio – la question générale à laquelle le texte apporte une réponse. Le déroulement de l'information dans un texte cohérent est donc contraint, au niveau global (discours) comme au niveau local (énoncé), par cette quaestio  à laquelle répond le type de discours. La quaestio définit ainsi la structure principale – la trame du discours, ainsi que l'appartenance de l'information […].  La progression de l'information, déterminée par la quaestio à laquelle répond le texte, est visible par les marques textuelles de cohésion : connecteurs, anaphores, ordre des mots, ect. Le locuteur qui présente l'information sous forme d'une narration, par exemple, choisit une perspective.[ …] En somme, la quaestio permet de relier les intentions communicatives/communicationnelles du locuteur et leur formulation linguistique. Elle détermine la sélection et la linéarisation de l'information. »P  39-40 LENART Ewa Acquisition des procédures de détermination nominale dans le récit, thèse de doctorat, Université de Paris 8 – Vincennes – Saint-Denis, 2006

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