Dissertation sur la passion.

Méthode: Dissertation

Sujet : « La passion est moins la recherche de quelque chose que la quête d’un objet dont la fondamentale et double condition est d’être d’une part obscur et indéfinissable, d’autre part hors de toute portée utile, dans le double sens de l’expression : hors d’atteinte et inutile. Elle traduit donc à la fois un dégoût (ou un inintérêt) à l’égard du réel et un intérêt à l’égard de l’irréel » (l.47-50). Dans quelle mesure votre lecture des œuvres au programme vous permet-elle de valider cette affirmation de Clément Rosset ?

Analyse :

Reformulation :

Problématique proposée : la passion serait-elle irrémédiablement une quête insatiable?

Proposition de plan :

1. CERTES,

1.1. D’une part,

- Valérie Marneffe enflamme la passion d’Hector pour elle parce qu’elle semble inaccessible : elle joue en effet l’épouse vertueuse : « à chaque présent, c’était un fort à emporter, une conscience à violer » (p.133 ; chap.25) ; « Mme Marneffe, âgée de vingt-trois ans, bourgeoise pure et timorée, fleur cachée dans la rue du Doyenné, devait ignorer les dépravations et la démoralisation courtisanesques qui maintenant causaient d’affreux dégoûts au baron, car il n’avait pas encore connu les charmes de la vertu qui combat » (p.133 ; chap.25). Voir aussi la quête de la jeunesse éternelle qui anime Hector : « Tant que le baron Hulot d’Ervy fut bel homme, les amourettes n’eurent aucune influence sur sa fortune ; mais, à cinquante ans, il fallut compter avec les Grâces. À cet âge, l’amour, chez les vieux hommes, se change en vice ; il s’y mêle des vanités insensées. Aussi, vers ce temps, Adeline vit-elle son mari devenu d’une exigence incroyable pour sa toilette, se teignant les cheveux et les favoris, portant des ceintures et des corsets. Il voulut rester beau à tout prix. Ce culte pour sa personne, défaut qu’il poursuivait jadis de ses railleries, il le poussa jusqu’à la minutie » (p.52 ; chap.8).

- L’objet de l’amour et de la vertu d’Andromaque, Hector, est mort et n’a donc plus d’existence dans le réel. Pourtant, Andromaque continue à toute force de lui être fidèle, comme elle le rappelle à Céphise : « Quoi donc ? As-tu pensé qu’Andromaque / Pût trahir un époux qui croit revivre en elle ; / Et que de tant de morts réveillant la douleur, / Le soin de mon repos me fît troubler le leur ? » (v.1077-1080).

- Hume fournit à une explication à ce phénomène : « l’absence détruit les passions faibles alors qu’elle accroît les fortes ; tout comme le vent mouche une chandelle et attise un incendie. Une longue absence affaiblit naturellement notre idée et diminue la passion ; mais lorsque l’affection est assez forte et assez vive pour s’entretenir elle-même, le malaise qui provient de l’absence accroît la passion et lui apporte, avec la force, un impact nouveau » (VI, 7 ; p.91).

1.2. D’autre part,

- Pour l’empiriste sceptique qu’est Hume, le réel en lui-même ne peut être connu, et le sujet n’a affaire qu’à la représentation du réel que lui proposent ses sens et que construisent ensuite ses passions et son imagination : « nous n’avons pas connaissance d’une connexion réelle entre une chose et une autre. Tout ce que nous avons, c’est que l’idée d’une chose est associée à celle d’une autre et que l’imagination effectue une transition facile entre elles » (IV, 7 ; p.85).

- Hermione vit ainsi dans un monde fantasmé, conditionné par sa passion et dont elle constitue le centre : elle ramène ainsi à elle tout ce que fait Pyrrhus ou tout ce qui le concerne. Voir par exemple la façon dont elle comprend la démarche de Pyrrhus en IV, 5 : « Vous veniez de mon front observer la pâleur, / Pour aller dans ses bras rire de ma douleur » (IV, 5 ; v.1227-1228).

- Bette, sous l’effet de son attachement à Wenceslas, va jusqu’à fabriquer un monde qui finira par s’effondrer au premier contact avec le réel. Ce monde est celui de la maison de la rue du Doyenné, à la fois prison et refuge. « Eprise réellement depuis quatre ans, elle caressait le fol espoir de faire durer cette vie inconséquente et sans issue » (p.102 ; chap.19). Cf. Adeline, passionnément amoureuse d’un époux qu’elle fantasme complètement : « Pour Adeline, le baron fut donc, dès l’origine, une espèce de dieu qui ne pouvait faillir » (p.49 ; chap.7) ; « après s’être bien dit que son mari ne saurait jamais avoir de torts envers elle, elle se fit, dans son for intérieur, la servante humble, dévouée et aveugle de son créateur » (p.49 ; chap.7).

NB : on aurait aussi pu parler ici de la folie dans laquelle la passion enferme le sujet.

1.3 Enfin,

- Hume affirme certes que « la sécurité affaiblit les passions » (VI, 5 ; p.91) : quand le sujet est certain de la satisfaction de sa passion, cette dernière disparaît. Mais nous avons vu qu’en réalité, l’objet d’une passion vraie est toujours, d’une certaine façon, hors de portée du passionné, ce qui renouvelle constamment « l’incertitude », qui est l’une « des circonstances qui rendent une passion […] violente » (VI, 1, p.88 ; le cas de l’incertitude est examiné en VI, 5, p.91).

- L’érotomanie d’un Hector Hulot est insatiable : Jenny Cadine, Josépha Mirah, Valérie Marneffe, Olympe Bijou, Elodie Chardin, Atala Judici et, pour finir le roman, Agathe Piquetard : la vie d’Hector est un cycle dont les étapes sont perpétuellement répétées. Cette passion infinie entraîne ainsi des dépenses infinies, qui amènent Hector à des manœuvres infinies (le prêt du baron de Nucingen, les malversations en Algérie…).

- Chez Racine, la passion dure même après la disparition de l’objet de la passion : Andromaque envisage ainsi sa propre mort comme moyen de retrouver Hector, père de son fils Astyanax (« j’irai revoir son père ») ; en V, 5, Oreste déclare, en parlant du fantôme d’Hermione : « je lui porte ainsi mon cœur à dévorer ».

Bilan sur le sujet :

2.CEPENDANT, LES PASSIONS SONT AUSSI DES PHENOMENES EN PRISE DIRECTE AVEC LE REEL

2.1 Tout d’abord, l’objet d’une passion est, par certains aspects,

- Pour

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