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Dans quelle mesure le traitement du temps dans Le Cid et dans Bérénice engage-t-il une conception spécifique de l’action dramatique ?

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Par   •  14 Septembre 2021  •  Dissertation  •  1 791 Mots (8 Pages)  •  510 Vues

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Dans quelle mesure le traitement du temps dans Le Cid et dans Bérénice engage-t-il une conception spécifique de l’action dramatique ?

En 1674, Boileau théorise les règles du théâtre classique dans L’Art poétique « Qu'en un lieu, qu'en un jour, un seul fait accompli tienne jusqu'à la fin le théâtre rempli ». L’unité de temps, de lieu, d’action et de bienséance régiront le théâtre classique et influenceront le traitement dramatique des pièces ; contraignant les dramaturges à respecter scrupuleusement ces règles sous peine de virulentes critiques. Corneille comme Racine seront sujet aux critiques de leurs rivaux. En 1637, la Querelle du Cid eu un important retentissement, entraînant la publication d’une quarantaine de textes dont le dessein était de critiquer l’œuvre de Corneille. Bérénice plus discrète, en 1670 suscitera pareillement des critiques liées à la règle d’unité de temps instaurée par Boileau un siècle auparavant. Par conséquent, nous sommes amenés à nous demander en quoi l’unité de temps a influencé le traitement de l’action dramatique dans Le Cid de Corneille et Bérénice de Racine. En premier lieu, nous montrerons que ces deux tragédies classiques présentent un respect plus ou moins scrupuleux de l’unité de temps, nous n’oublierons pas ensuite, de détailler l’influence du respect « forcé » de cette règle sur le tragique des œuvres. Enfin, nous étudierons la manière dont les deux dramaturges sont parvenus à réinventer et régler une réalité historique, la mettant au service de l’art dramatique.

Bérénice tout comme Le Cid respectent l’unité de temps imposée par les règles du théâtre classique ; il nous est impossible de le nier. Se pose alors la question de la vraisemblance. En effet, Corneille et Racine nous offrent des tragédies dans lesquelles la trame dramatique se déroule en vingt-quatre heures. Néanmoins, à la lecture des pièces le respect de l’unité de temps semble invraisemblable, l’action du Cid est condensée tandis que celle de Bérénice est étirée. De plus, les indications temporelles sont absentes des textes, le lecteur ne peut se situer dans la pièce. Cette absence de marqueur temporel chez Racine s’explique par le fait que sa pièce applique le théâtre illusionniste qui a pour principe de faire correspondre les repères spatio-temporels de la fiction à ceux de la représentation. Ainsi trois heures de spectacle doivent correspondre à vingt-quatre heures d’action dans la trame dramatique. Mais cela ne résout pas le problème d’invraisemblance temporelle des deux tragédies.

L’action dramatique de Bérénice est exagérément étirée comme le déplore l’Abbé Villars « Il est certain que toute cette affaire s’expédierait en un quart d’heure, et que jamais action n’a si peu duré ». En effet, Racine pour faire durer l’action use d’une multitude de procédés théâtraux, comme les nombreuses tirades qui permettent de faire durer l’action. Nous admettons alors que si Bérénice répond bien à la règle d’unité de temps, son respect n’en est pas moins forcé. Il en est de même pour Corneille, qui l’avouera ouvertement en 1660 « je ne puis dénier que la règle des vingt-quatre heures presse trop les incidents de cette pièce ». L’invraisemblance de l’unité de temps atteint son point culminant dans la scène six de l’acte trois et la scène trois de l’acte quatre, lorsqu’il est sujet de la bataille livrée par Don Rodrigue l’opposant aux maures. Bien qu’il n’y ait pas de scène relative au déroulement du combat en question, il nous parait impossible de faire tenir en vingt-quatre heures une bataille, en plus des trois duels opposant respectivement Don Digue au Comte, le Comte à Don Rodrigue et enfin Don Sanche à Don Rodrigue. Il est également important de mentionner que la pièce de Corneille s’inspire de la pièce de Guillén de Castro, Las Mocedades del Cid parue en 1631, or le dramaturge espagnol, s’étant inspiré de faits historiques, étale les actions de sa pièce sur trois ans tandis que Corneille lui les condense en vingt-quatre heures. Ce respect forcé de l’unité de temps lui vaudra de nombreuses critiques et fera partie intégrante des chefs d’accusation lors de la Querelle du Cid.

Nous admettons alors que Bérénice et Le Cid présentent un respect forcé de l’unité de temps. Il semble alors inévitable que ce respect forcé ait des conséquences sur le traitement des pièces. Le tragique des pièces est donc inexorablement influencé par la règle des vingt-quatre heures.

L’invraisemblance temporelle garde une place importante et se ressent dans les deux pièces. Racine au même titre que Corneille va adapter son sujet aux règles. Là ou Corneille instaure une tension dramatique constante, Racine lui usera d’un registre élégiaque. En effet, Bérénice présente l’amour comme un sujet politique qui sera au centre de l’action dramatique. Pour donner l’illusion des vingt-quatre heures, Racine va faire de sa pièce l’exemple même de l’élégie, notamment grâce au personnage d’Antiochus. Dans l’acte trois scène deux, trois et quatre Antiochus par ses lamentations, permet à Racine non seulement de rallonger l’action mais aussi d’affirmer le tragique élégiaque de sa pièce « hélas ! de ce grand changement

Il ne me reviendra que le nouveau tourment

D’apprendre par ses pleurs à quel point elle l’aime ». De plus, il est important de noter que la pièce ne compte pas moins de deux monologues : le premier de Bérénice acte quatre scène une et le deuxième de Titus acte

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