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Corniche kennedy incipit

Commentaire de texte : Corniche kennedy incipit. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  14 Mai 2019  •  Commentaire de texte  •  2 617 Mots (11 Pages)  •  7 772 Vues

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Présentation de l’oeuvre : Corniche Kennedy est un roman réaliste contemporain, écrit par Maylis de Kerangal et publié en 2008, qui raconte l’histoire d’un groupe d’adolescents durant un été à Marseille. Cette bande de jeunes s’affirme en opposition avec le reste du monde en passant l’été à plonger dans l’océan, du haut de la corniche Kennedy. Situation de l’extrait : L’extrait étudié est la fin de l’incipit dont les fonctions sont d’informer et d’intriguer. Pour cela, après nous avoir présenté le lieu, la corniche Kennedy, puis La Plate forme où se réunissent les jeunes et qu’ils appellent “la plate”,  le narrateur nous présente maintenant les personnages à travers une description tout à fait originale, voire une étude. Caractérisation de l’extrait : En effet, cette description est un jeu sur les points de vue et sur les discours. Le narrateur est externe (c’est-à-dire qu’il n’est pas un personnage de l’histoire, mais il introduit les voix des personnages dans cet incipit) , et lui-même adopte différents points de vue pour décrire le groupe. LECTURE.

Comment sont présentés ces jeunes dans cette fin d’incipit ? Dans un premier temps nous nous intéresserons à l’originalité de la description faite par le narrateur, et dans un second temps à la polyphonie, c’est-à-dire à l’introduction par le narrateur d’autres voix que la sienne dans son récit.

  1. L’originalité de la description du narrateur

Nous avons un narrateur externe (il n’est pas un personnage) qui présente les jeunes de trois manières différentes : comme s’il était un spectateur au théâtre, puis comme s’il était un cameraman qui filmait la plateforme vue du ciel, et enfin comme un ethnographe.

  1. Premièrement, le narrateur présente les filles et les garçons comme deux équipes dans un tournoi sur une scène de théâtre. Nous pouvons relever le champ lexical du théâtre : l’ambiance est donnée dès la ligne 2, “la plate est une scène” Cela correspond à ce sur quoi Maylis de Kerangal a beaucoup insisté dans ses interviews sur son roman : elle a voulu faire de la corniche un lieu d’exhibition où les jeunes se donnent en spectacle en plongeant. Le mot “s’exhibent” est d’ailleurs présent : “une scène où ils s’exhibent”. Les autres mots du champ lexical du théâtre : “prologue”, et le mot “théâtre” (l.11). Le prologue correspond à l’exposition dans les pièces de théâtre grec. Les personnages y faisaient leur entrée et se répartissaient sur la scène, ou parfois c’était seulement le choeur qui entrait en scène, et ce choeur était scindé en deux, d’un côté les hommes, de l’autre, les femmes. Les mouvements du groupe des filles, et du groupe de garçons qui se répartissent d’un côté et de l’autre de la plate rappellent ces mouvements des acteurs du théâtre antique : “le prologue est invariable : les filles s’installent à proximité de l’échelle, en bordure de Plate, quand les garçons eux se regroupent sur les rochers, en recul, partition sexuelle du terrain vouée rapidement à l’explosion”. Comme au théâtre, cette première distribution de l’espace ne dure pas, et les personnages rapidement cherchent à entrer en relation les uns avec les autres, soit de manière directe pour les “plus frontaux” en montrant ouvertement qu’ils sont disponibles ou en adoptant une stratégie du contournement très repérable : Ils se tournent autour (“contournements ostentatoires”), ou s’esquivent (“évitement”) ou entrent indirectement en contact par le truchement d’un tiers : “envoi de messagers dévoués”. Le personnage du “messager” rappelle aussi le théâtre antique, il était celui qui aidait le protagoniste. Leurs attitudes outrancières également rappellent le jeu des acteurs grecs, Ils campent des rôles en exagérant leur comportement, notamment sexué : “les plus frontaux outrent leur genre et leur disponibilité”, ou ils adoptent des attitudes de drague très codées : “combinent des stratégies d’approche vieilles comme le monde” “L’adjectif “faux” dans “fausses salopes”, et “faux baiseurs sans scrupules” soulignent qu’ils sont dans des jeux de rôles, mais qu’ils sont à l’intérieur plus sensibles que leur apparence outrée ne le laisse suggérer. Ce qui va se jouer sur cette scène, ce n’est pas une comédie ou une tragédie, c’est un tournoi. Le mot apparaît ligne 4 “tournoi”, et nous avons d’autres mots qui forment le champ lexical du jeu “terrain de jeu”, “lices” (qui signifie les joutes, les jeux d’affrontement). C’est un tournoi où le but est clairement annoncé : il s’agit de “se foncer dessus”, mais il y a des règles (un “rituel” à respecter l.4.). En premier, il y a le prologue, puis un deuxième moment qui correspond à “échauffer celui ou celle d’en face” soit en l’attaquant frontalement, soit par à une esquive et un contournement. Cette présentation est originale car les personnages sont présentés en groupes, et non pas individualisés comme on s’y attendrait dans un incipit.

  1. Deuxièmement, le narrateur présente la bande comme une image, comme si les jeunes formaient un dessin. Là encore, c’est le groupe qui est décrit et qui forme une unique image, mobile, métamorphique. Le narrateur souligne qu’ils forment un ensemble indéfini par les mots “ensemble”, “pauses indéfinies”, “vautrés les uns contre les autres”, ou “étalés”. Les images qu’ils forment sont tour à tour : une araignée (“en formation arachnéenne”), des “nénuphars très ouverts”, un arbre (“telle arborescence bizarre”), une carte (“tel cadastre”), un nuage (“fondus dans l’air du temps et contemporain du plus petit nuage”). Cela veut dire que le narrateur les regarde de loin, et d’en haut. Il a changé de focale et de point de vue par rapport au premier paragraphe où il les décrivaient de face. Il montre toutes ses potentialités en tant que narrateur omniscient, qui peut adopter tous les points de vue.
  1. Il se fait aussi ethnographe. Un ethnographe est quelqu’un qui décrit de manière scientifique les modes de vie d’un groupe social (en général dans les sociétés primitives).

La neutralité de sa description au début lorsqu’il présente les personnages selon une “partition sexuelle” en distanguant “les filles” et “les garçons”, rappellent la manière d’écrire des ethnologues. Comme dans les écrits ethnographqiues, le groupe social se définit par le lieu où il habite : “la Plate”. Un groupe ethnographique se définit également par ses actions : le narrateur énumère toute uen série de verbes à l’infinitif pour décrire ce que les adolescents viennent faire sur la plate durant les deux premières lignes : “frimer, tchatcher, sauter…”. Lorsqu’il présente leur “rituel” (le mot “rituel” est généralement employé pour décrire des sociétés primitives par les ethnologues) en deux temps. Ou quand il énumère “les attitudes qui signent leur communauté”, il décrit parmi ces attitudes des gestes et des phrases toutes faites, et des phrases accompagnées de gestes : “un penalty de folie”, “un service canon”, “une ride de malade sur un skate pourri”… (à partir d ela ligne 18). Tous ces gestes et ces phrases sont énumérés par le narrateur comme autant de stéréotypes qui représentent la jeunesse. Le fait aussi qu’il les présente comme un groupe indifférencié, au singulier : pour lui, les adolescents forment un groupe qui s’apparente à uen seule personne, c’est l’inverse de ce que l’on attend dans un incipit où le lecteur attend des caractéristiques précises pour chaque personnage, attend de savoir ce qui le distingue des autres.

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